Il est 17h00 à l’institut du Monde Arabe. Je me présente à l’entrée de la salle où doit se projeter le documentaire « Palestine », documentaire réalisé par Nadir Dendoune. 17h00, c’est l’heure à laquelle doit commencer la conférence de presse au sujet de l’arrestation du journaliste. A l’entrée, un membre du comité de soutien pour la libération de Nadir Dendoune m’arrête et me dit en souriant: « la conférence de presse, c’est que pour les journalistes ». Après lui avoir dit que j’étais là pour écrire un article, elle me demande mes coordonnées. Sur une feuille blanche qu’elle a dénichée en vitesse, elle note nom et prénom. Elle semble agitée, perturbée et pour cause, cette conférence a été organisée la veille : « Ça a été fait à l’arrache ». Le personnel s’agite aussi, il chuchote monte, descend, remonte.

17h15, la conférence commence. Emilie Raffoul, membre du comité de soutien prend la parole. Elle replace le contexte : « Nadir est actuellement détenu par les autorités irakiennes. Il est parti avec un visa pour un reportage pour Le Monde Diplomatique et avec une lettre de mission en tant que journaliste. Il avait servi de bouclier humain en 2003 devant une usine de traitement d’eau et avait promis de retourner voir les gens qu’il avait rencontrés lors de ce voyage.  J’ai été en contact avec lui trente minutes avant son arrestation, il me disait que tout allait bien, les gens l’avaient reconnu. Il est actuellement détenu par l’armée, on lui reprocherait d’avoir pris des photos de sites sensibles. Le Quai d’Orsay est  mobilisé. On pense qu’il est interrogé de manière régulière par des militaires, avec des techniques de militaires tous les jours mais il est bien traité, c’est ce qu’on a pu comprendre. Nadir est arrivé avec un passeport algérien,  le profil de quelqu’un comme lui peut sembler suspect pour des gens qui sont adossés aux USA. Il est dans une situation fragile, nous n’avons eu aucun contact direct avec lui et l’armée ne communique pas. La situation est très complexe, c’est compliqué entre les civils et l’armée. Nous journalistes, nous ne pouvons pas accepter cette situation ».

Le but de ce voyage était de rapporter des informations sur un pays « qui est devenu un trou noir » depuis le changement de gouvernement. Madjid, élu de Seine-Saint-Denis mais aussi ami du détenu, explique que Nadir a annoncé lui-même son arrestation en ayant passé un appel à une amie. Il fait le point sur les conditions de vie du détenu : « Il est interrogé depuis 4-5 jours, il a le moral et il est en cellule avec 28 charmants codétenus. Nous n’avons pas eu de contact direct depuis lundi 18 heures. On commence à être inquiets. Demain, c’est son  dixième jour de  détention. Le connaissant, on s’imagine qu’il va commencer à tourner en rond, à péter les plombs, ça devient urgent, la famille est très inquiète. »

Pendant la conférence, plusieurs mises au point ont été faites, particulièrement sur le fait que certains critiquent le statut de journaliste français du détenu  mais aussi sur le manque de considération des médias télévisés pour le détenu : « Nadir a une protection au-dessus de la tête, Nadir est journaliste et il est français. J’insiste sur le fait qu’il soit français. On a besoin des journalistes pour pouvoir entourer Nadir, lui donner du soutien.  Il a le droit à autant de considération qu’un autre détenu. Ce qui va l’aider, c’est la forte mobilisation qu’il y aura autour de lui ».

La conférence se termine avec un message adressé à tous : «  On compte sur vous pour que la mobilisation ne faiblisse pas jusqu’à la libération de Nadir». Un rassemblement de soutien à Nadir Dendoune est d’ailleurs prévu  ce vendredi à 17H30 à la fontaine des Innocents, à Châtelet-les-Halles.

Wassila Belkadi

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