De la place de Fontenoy, dans le 7ème arrondissement, on aperçoit très bien l’Ecole militaire. D’une architecture racée, quelque peu guindée, l’édifice est parfaitement inséré dans ce quartier cossu de la capitale. La Tour Eiffel qui se profile dans le panorama renforce le pédigrée de cette jolie petite portion de Paris. 

Qu’on tourne le dos à cette carte postale, et c’est un bâtiment d’une grande laideur qui surgit, comme sorti d’un plan quinquennal du Soviet suprême. Telle apparaît la façade du secrétariat d’Etat à la politique de la ville, d’où est censée sortir la solution aux problèmes de cette matrice urbaine tellement appréciée par les caméras de Droit de savoir : la banlieue.

Aux Twingos et 206 estampillées 93 ou 94 – rares dans le quartier mais toutes garées devant le « ministère » de Fadela Amara -, on devine qu’une once de banlieue est présente dans la stalinienne bâtisse. Le va-et-vient du personnel peut également être un indice, pour peu qu’on ose faire le lien entre Noirs et Arabes, et résidents de la périphérie. Interrogés sur le plan banlieue, dont les mesures seront annoncées le 22 janvier à Vaux-en-Velin, ils ont tous quelque chose d’urgent à faire qui les empêche de répondre. Heureusement, le durcissement de la loi Evin et les bataillons de fumeurs qu’elle entraîne à l’extérieur du bâtiment, permettent aux petits casse-bonbons de mon acabit d’insister un peu. En gros, personne n’est habilité à parler du plan, c’est top secret, et puis : « Ici ce n’est pas la poste ! On est dans un ministère, faut être habilité pour poser des questions », m’annonce un employé.

Expliquant que c’est plus en tant que citoyen que journaliste que je viens glaner des réponses, ce jeune homme me répond comme si j’étais du caca, quelque chose que je traduirais par : « Ça ne marche pas comme ca! » Je comprends, ce monsieur travaille au ministère, il a un statut et un protocole que je dois respecter pour pouvoir échanger deux, trois mots avec lui. Néanmoins, je tente : « Pourtant Fadela Amara, ça rime avec sympa, ça nous intéresse, nous, en banlieue, ce que vous faites. » Cette phrase semble adoucir mon interlocuteur, mais un de ses collègues nous rejoint, concluant la conversation en ces termes : « En passant par le canal officiel, nous parler c’est possible », ponctués par plusieurs « chut !!! » vindicatifs à l’attention du premier monsieur.

Je ne demandais certainement pas un scoop, juste une petite indication sur la façon et le genre de personnes qui ont élaboré le plan, ou quelques mots sur le parcours d’un de ces gentlemans du ministère. La peur de gaffer, sans doute, les aura fait se taire.

Idir Hocini

Idir Hocini

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