Depuis la démission de Nicolas Sarkozy du Ministère de l’Intérieur, la grande question qui se posait jusque-là portait sur l’éventuel retour du candidat en banlieue. A la suite de ses nombreuses annulations, la dernière en date lors de son déplacement à Lyon dans le quartier de la Croix-Rousse, le candidat UMP officiellement en visite à Meaux en Seine et Marne pour un grand meeting n’avait plus d’excuse aujourd’hui, d’autant que certains chibanis avaient spécialement troquée leur plus belle chemise pour l’occasion.

Attendu à 17 heures dans une salle du quartier de Beauval d’ordinaire réservée aux jeunes de la ville qui viennent s’entraîner à la boxe, le candidat UMP est finalement arrivé avec une heure et demie de retard : Nicolas Sarkozy aurait tout bonnement hésité, jusqu’au dernier moment, craignant tout débordement, en sa défaveur à 10 jours du premier tour de la présidentielle. Pourtant, comme l’ont dit les jeunes sur place, « On n’est pas à Argenteuil ici ! « . Au programme, un débat avec des jeunes Meldois engagés au niveau associatif, des habitants du quartier ainsi que Karim Zéribi, fondateur du Parlement des Banlieues qui remercie M. Sarkozy de s’être déplacé pour ce débat, « Je suis un homme de gauche. Pour moi, Nicolas Sarkozy est un républicain et un démocrate, ceux qui le diabolisent, à mon avis, ont tort. Moi, je ne refuse pas le débat, dans les quartiers populaires nous savons ce qu’est le respect « . Les premiers mots de Nicolas Sarkozy furent un récital de phrases toutes faites sur les quartiers populaires: l’oisiveté, les trafics de drogue, le Plan Marshall 2. Mais Karim Zéribi n’est pas venu pour entendre ce que tout le monde sait déjà, mais pour discuter sur des choses concrètes et l’interpeller aussi sur « le principe empoisonné de la discrimination positive, ou encore sur ses propos caricaturaux des moutons égorgés dans la baignoire », ce à quoi l’auteur à vite fait de faire une impasse pour parler de la jeunesse des quartiers populaires.

Ainsi, derrière le Plan Marshall pour les banlieues, Nicolas Sarkozy promet de faire en sorte qu’au « 1er janvier 2008, les 250 000 jeunes en difficulté aient une formation et un contrat de travail d’un an« . Une jeune femme, Saïda, fait remarquer au patron de l’UMP que « dans les banlieues, il y a des jeunes non qualifiés en difficulté mais aussi des jeunes surdiplômés, au chômage du fait de la discrimination à l’embauche ». Tout le monde veut prendre la parole, un père de famille demande à Monsieur Sarkozy de « retirer deux mots : racaille et Kärcher« , M. Sarkozy ne se démonte pas pour répondre en expliquant qu’il a repris ses propos en réponse à une mère de famille « d’apparence, d’origine maghrébine, avec des vêtements de type maghrébin, avec un foulard sur la tête » lors de sa visite à la dalle d’Argenteuil en 2005. Etait-il besoin de préciser à ce point l’origine de cette femme ? 

Le débat se termine, les organisateurs desserrent les dents, le candidat de l’UMP s’extrait de la foule et se jette dans sa voiture. Tout le monde a compris que la rencontre touchait à sa fin, les gamins de la cité se réjouissaient par avance de voir leur immeuble au journal de 20 heures.

Hanane Kaddour

Hanane Kaddour

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