9 septembre 2005, Dominique Strauss-Kahn publie sur son blog son questionnement sur l’opportunité d’appliquer une TVA supplémentaire sur certains produits avec l’idée, entre autres, de lutter contre les délocalisations. 10 juin 2007, Laurent Fabius passe à l’offensive au soir du premier tour des législatives concernant le projet de la droite d’augmenter la TVA. J’aurais aimé sourire d’une telle situation, mais malheureusement le terme pathétique me semble plus approprié. Mon premier propos ici n’est pas de discuter si cette TVA sociale est bien ou mal, c’est de constater que la machine démagogique continue de tourner à plein régime. Les socialistes avaient besoin de sauver les meubles et ils l’ont fait en agitant la hausse de TVA comme un épouvantail effrayant pour les Français. Le but n’est pas d’analyser rationnellement le bienfondé et l’infondé de ce projet, il est de capitaliser sur le comportement émotionnel du citoyen : réussir à provoquer une peur irrationnel et systématique sans débattre du fond de l’idée.

Quant au fond justement, je me permettrai d’en dire ceci. Le concept est le suivant : en réduisant les charges sociales sur les entreprises de l’hexagone et en les transférant sur la consommation des produits, le gouvernement espère obtenir un transfert des réductions du coût du travail vers les prix hors taxe. Dans une mécanique bien huilée de loi de l’offre et de la demande cela serait probablement vrai mais comme l’économie française est loin de posséder un fonctionnement très fluide, on peut émettre de sérieuses réserves quant au bon fonctionnement de ce transfert. Le raisonnement n’est pas forcément fallacieux, c’est juste que l’économie n’est pas une science exacte et que le résultat n’est pas assuré. En revanche, les produits d’importation ne bénéficiant de la réduction du coût du travail que dans le processus de distribution local, leur prix devrait logiquement augmenter. C’est l’objectif protectionniste de la TVA sociale : forcer les productions étrangères vendues en France à contribuer à notre protection sociale. C’est alors que se pose le problème traditionnel de la TVA. Pour les foyers les plus pauvres, le pourcentage de budget réservé à la consommation est plus grand (au détriment de l’épargne). Or la TVA est un impôt à la consommation, donc les foyers les plus pauvres sont proportionnellement plus impactés par une telle situation. En simplifiant, on pourrait dire qu’avec ce mode de fonctionnement, les produits d’importation deviennent des « produits de luxe ».

On peut aussi questionner l’impact réel à long terme d’une telle mesure sur l’équilibre de compétitivité entre produits locaux et produits d’importation. En ce sens les idées avancées par Dominique Strauss-Kahn étaient intéressantes dans la mesure où elle forçaient davantage l’impact sur les produits d’importation. Malheureusement son idée complexifie aussi énormément le modèle, de quoi transformer la TVA en une nouvelle usine à gaz fiscale : du travail pour les développeurs de logiciel d’entreprises, les comptables et les employés du ministère des Finances mais un gain de compétitivité pas si évident que ça pour notre économie.

Bref, en attendant que nous sachions à quelle sauce nous allons être imposés, la gauche a réussi à suffisamment préserver sa situation à l’Assemblée nationale pour qu’elle ne sente pas nécessaire de se remettre réellement en question. Et finalement, c’est peut-être cela le plus inquiétant.

Cédric Roussel

Cédric Roussel

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