« Nous ouvrons pour qu’existe un endroit où puisse se reconstruire la solidarité entre français et étrangers, entre exilés et sans-papiers, entre les immigrés et leurs enfants », détaillait le communiqué lancé par le collectif pour justifier l’action.

Le collectif La Chapelle Debout qui lutte pour le droit des personnes immigrées, pour l’accès de toutes et tous à des papiers et des logements, a sélectionné les locaux d’une entreprise américaine inoccupés depuis trois ans pour lancer son action. Une occupation illimitée lancée à partir du 18 avril dernier pour demander un logement digne aux personnes exilées.

Un squat, ça ne peut pas être une solution pour toute la vie, c’est juste pour un bout de temps.

Militant du collectif La Chapelle Debout, Aboubakar explique : « Aujourd’hui on occupe pour lutter pour nos droits. Ça fait trois ans que je suis en France, et si on est à la rue, c’est à cause de l’État », explique l’exilé qui faisait aussi partie du mouvement de contestation sociale des sans-papiers en 2019 appelés gilets noirs.

Depuis le début de l’action, exilés, résidents étrangers et bénévoles se relaient pour continuer l’occupation des bureaux parisiens.

Pendant le Covid-19, on a été les oublié·e·s. On n’a eu aucune solution, aucune solution d’urgence, on ne nous a pas proposé
de logement.

« Si je suis ici, c’est pour soutenir les collectifs à l’initiative de cette occupation et dans l’espoir de pouvoir bénéficier à terme de mes droits, d’un logement adapté à ma situation », ajoute E.L, bénévole indépendant en tant que traducteur (principalement afin d’aider des personnes dans leurs démarches administratives et de santé).

Il développe : « Pendant le Covid-19, on a été les oublié·e·s. On n’a eu aucune solution, aucune solution d’urgence, on ne nous a pas proposé de logement. Alors les personnes qui s’organisent et celles qui nous viennent en aide, c’est un espoir. »

Quand le gouvernement français propose des solutions pour les Ukrainiens, c’est bien, mais il faut comprendre que les souffrances sont les mêmes pour tout le monde.

Ce jour-là, à 17 heures, une assemblée générale s’est tenue pour informer les personnes réunies à l’intérieur de l’état d’avancement des négociations avec la police : « Ce qu’ils demandent prioritairement c’est qu’il n’y ait de problème ni dedans, ni dehors. » La réunion a aussi été l’occasion d’expliquer un peu plus en détails la manière dont fonctionne le lieu, destiné à accueillir entre 70 et 80 personnes : « On voudrait avoir des solutions pour tout le monde, mais ça ce n’est pas une solution à long-terme. Tout le monde devrait avoir le droit à une maison, personne ne devrait avoir à vivre dans un squat toute sa vie. On veut juste l’égalité. Rien de plus, rien de moins », clame E.L.

Les bureaux vides ont été rebaptisés : « Ambassade des immigré·e·s ».

C’est également ce que note Basul, étudiant syrien venu en soutien, et tenu informé du déroulé de l’action par le collectif des Sans-Papiers 75 et La Chapelle Debout ! : « Un squat, ça ne peut pas être une solution pour toute la vie, c’est juste pour un bout de temps. Ce n’est pas normal que des personnes doivent dormir dans la rue. Quand le gouvernement français propose des solutions pour les Ukrainiens, c’est bien, mais il faut comprendre que les souffrances sont les mêmes pour tout le monde. »

Installé·e·s au 17, rue Saulnier, à Paris, les occupant·e·s sont toujours là et compte le rester aussi longtemps qu’il le faudra pour faire valoir leurs revendications et leurs droits.

Eva Fontenelle

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