Article initialement publié le 17 mars 2020

« Ça s’est fait du jour au lendemain. Je me suis dit ‘Putain, je respire ! Je suis en train de respirer à pleins poumons !’ A ce moment-là, j’ai compris que le cauchemar était fini pour moi. » Aujourd’hui, Marine raconte avec le sourire comment elle est sortie du tunnel. Elle fait partie des milliers de Français.e.s atteint.e.s du Covid-19 qui n’ont pas été testées ni hospitalisées. Pourtant, loin d’être une personne à risque, Marine a souffert pendant ces deux semaines de maladie.

C’est au soir du samedi 14 mars que les premiers symptômes se manifestent chez la jeune femme, entrepreneuse dans la communication digitale. La Nantaise passe la soirée chez des amis et elle commence à se sentir très mal. « En fait, j’ai eu la malchance d’avoir tous les symptômes d’un seul coup, explique-t-elle. J’ai eu très chaud puis très froid, j’ai compris que j’avais de la fièvre. J’ai ensuite eu très mal à la tête puis je n’arrêtais pas de tousser. En même pas deux heures, j’ai tout eu. »

Bien que paniquée, Marine ne prend pas tout de suite la mesure de ce qu’il se passe. Elle qui se portait parfaitement bien quelques heures avant décide d’écourter sa soirée et de rentrer chez elle : « Je suis rentrée chez moi et j’ai pris ma température. J’étais à 38,8. Je ne comprenais pas ce qu’il se passait, j’étais vraiment paniquée. Je me disais ‘Mais qu’est-ce que j’ai ? Pourquoi je me sens mal d’un seul coup ?’ »

La migraine, elle, redouble d’intensité. « C’est ce qui m’a le plus choqué, dit-elle. Je me suis endormie en me disant que ça irait mieux le lendemain. La nuit s’est bien passée mais, en me levant, j’avais un mal de tête comme je n’en ai jamais eu de ma vie. » A cela viennent vite s’ajouter les courbatures sévères, qui empêchent Marine de se tenir debout et de bouger.

Au fil de la journée, Marine, clouée au lit, voit sa température grimper en flèche. Elle se rend alors à l’évidence : c’est le coronavirus qui l’a frappée de plein fouet. La Nantaise appelle alors le numéro vert mis en place par les autorités : « On m’a pris en charge rapidement, salue-t-elle. On m’a demandé de quand dataient les symptômes, si des gens vivaient avec moi… » On lui confirme qu’il s’agit vraisemblablement de Covid-19 et on la met en lien avec l’hôpital et son service d’urgences.

Là, un médecin lui confirme la sentence : Marine est contaminée. « Elle m’a demandé si j’avais du mal à respirer, je lui ai dit que non. » On lui explique alors la marche à suivre : « Vu que vous ne présentez pas de soucis de respiration, vous allez rester chez vous et attendre que le virus passe. Prenez des Doliprane et ça va passer. »

Des migraines violentes, des difficultés respiratoires

A ce moment-là, la jeune femme est seule avec sa mère et elle a obligation de rester confinée afin de ne pas l’infecter. « Je suis restée chez elle et on a fait en sorte de ne pas se croiser, dit-elle. C’est un peu triste à dire mais vu que je n’avais pas de problème pour respirer, on s’est dit que ça ne servait à rien de se faire hospitaliser. »

La mère s’occupe de la fille avec soin, tandis que de l’autre côté l’anxiété grandit peu à peu chez ses proches : « Mes amis et ma famille étaient inquiets, forcément. Vu que je suis jeune et que je n’ai pas de problème respiratoire, on se disait que tout allait bien aller pour moi, il suffisait juste d’attendre. De toute façon il n’y avait que ça à faire ».

Les journées se suivent et ne se ressemblent pas pour la Nantaise puisque les symptômes se succèdent tour à tour mais seul le mal de tête demeure : « En fait j’ai eu mal à la tête du début à la fin et ça c’est vraiment ce qui m’a fatigué. Puis ce n’était jamais un mal de tête ‘pas très fort’ et ensuite un mal de tête ‘très fort’, non c’était toujours violent. Et c’est vraiment ce qui m’a empêché de me lever et de bouger. Je continuais aussi d’avoir des courbatures et beaucoup de fièvre ».

Au bout de quelques jours, un nouveau symptôme fait son apparition : « Je me rendais compte que je ne pouvais plus inspirer de toute mes forces, j’avais de plus en plus de mal. Je disais à ma mère que j’avais l’impression de fumer deux paquets de clopes en une heure et que mes poumons étaient bloqués. Et en plus de ça, j’étais vraiment de plus en fatiguée. » Marine est terrifiée et sent que le virus prend l’ascendant sur elle. Elle trouve néanmoins la force de poster un Tweet en guise de prévention, suite auquel elle reçoit énormément de soutien notamment de la part de jeunes.

« J’étais vraiment à bout parce que les symptômes se relayaient, dit-elle avec le recul. En me réveillant, je me demandais lequel j’allais avoir : est-ce que j’allais pouvoir me lever, marcher, inspirer correctement ? J’ai posté ce message parce qu’à 25 ans on se dit qu’on est jeune et invincible alors que pas du tout. » Elle poursuit : « J’ai eu la chance de ne pas être allée à l’hôpital, j’ai eu la chance de ne pas aller en réa mais j’ai quand même eu de vraie angoisse et des vraies frayeurs. Puis on est tout seul dans ce moment-là donc ce n’est pas facile à gérer ».

Sur les derniers jours la fièvre disparaît mais les poumons sont durement éprouvés et au bout du dixième jour, Marine se réveille sans le mal de crâne qui la rongeait depuis le 14 mars. « J’ai réussi à me lever, j’étais soulagée, se souvient-elle. J’ai passé une journée à peu près normale mais j’étais quand même très fatiguée. »

Je me suis rendu compte qu’à 25 ans, on n’est pas invicible

Le lendemain, enfin, elle ne ressent plus aucune gêne aux poumons, elle ne présente plus aucun symptôme, Marine est guérie : « J’ai dit à ma mère ‘Maman ! Je peux inspirer de toutes mes forces sans être dans le mal !’. J’avais l’impression d’avoir eu un bouchon dans les poumons et qu’on me l’avait enfin retiré ! »

Aujourd’hui, Marine se rétablit à petits pas, consciente qu’elle revient de très loin. « Je me suis rendu compte qu’à 25 ans, on n’est pas invincible et que notre corps est fragile, analyse-t-elle aujourd’hui. Ce qui a joué sur mes poumons est le fait que je fume énormément, je tournais à 1 paquet et demi par jour ces derniers temps. Mais là, je me suis dit qu’il fallait arrêter parce que mes poumons le payaient. »

Marine, désormais heureuse et pleine d’énergie selon ses dires, reste néanmoins lucide sur la situation actuelle : « Je me sens en vie et suis hyper contente. Mais d’un autre côté, je n’arrête pas de penser à tous ces gens qui étaient à l’hôpital. Pendant ces dix jours, mes amis me forçaient à aller y aller mais je ne voulais pas prendre la place de quelqu’un qui avait vraiment besoin d’y aller. Je suis consciente que j’ai gagné une bataille mais la guerre n’est pas terminée, il reste beaucoup à faire. »

Félix MUBENGA

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