L’inégalité entre les étudiants est de plus en plus prégnante et ceux qui semblent s’en sortir le mieux restent les étudiants boursiers. A l’école de la République, l’aide pécuniaire est une chance que tous rêve d’avoir et que beaucoup remette en question. 

Comme d’habitude c’est le branle-bas de combat pour trouver une place au restaurant universitaire. Mais en ce jour béni du 12 février 2013, quatre places royales près de la baie vitrée nous font de l’œil. La concurrence est rude, mais nous arrivons à atteindre notre but. Nous passons d’un sujet frivole à un autre jusqu’au moment ou Bénédicte nous apprend qu’elle va enfin pouvoir emménager dans sa chambre d’étudiant.

Elle surenchérie en affirmant que son loyer ne s’élève seulement à 73€ et qu’elle est à deux pas de la fac ! La stupéfaction se dessine peu à peu sur les visages. J’arrive à comprendre que Bénédicte regrette son excès d’euphorie. « Mais comment as-tu pu te dégoter une chambre si peu chère ? », enchaîne Sonia. « J’ai tout simplement reçu un mail du Crous dans lequel on me mettait au courant des démarches à suivre pour obtenir un appartement. »

Tout le monde la regarde l’air faussement intrigué, chacun sait très bien que Bénédicte est boursière, que le sujet la met mal à l’aise, mais ils feignent l’ignorance. « C’est bizarre, je n’ai jamais reçu ce genre de mail de la part du Crous, comment cela se fait-il que tu reçoive ces informations et pas nous? », demande Raphaël. « C’est sans doute car je suis étudiante boursière », ajoute Bénédicte, l’air penaud. Un ange passe à table. Mais la conversation reprend de plus belle.

«C’est cool pour toi que tu aies trouvé un appartement près de la fac, vu que tu avais plus d’une heure de trajet, ça te laisse plus de temps pour tes études. Mais je dois t’avouer que j’ai quelques rancœurs. Pas contre toi, mais contre ce système de bourse qui laisse certains étudiants sur le carreau ». J’écoute attentivement et demande à Zoé ce qu’elle reproche à ce système, bien que je connaisse la réponse à ma propre question.

« C’est très simple ce système est injuste. Mes parents sont trop ‘riches’ pour que je touche la bourse. Et comme j’habite à 3h30 de la fac je suis obligé d’avoir un pied à terre près de la fac. Mes parents doivent tout financer de leur poche. Une chambre à 150€ par mois. Et on peut pas dire qu’elle soit très accueillante. Sans parler des courses, de la carte Navigo pour que je rentre à la maison le week-end et que je puisse me déplacer librement à Paris. Toutes ses dépenses pèse sur le budget de la famille. Ils ne se permettent plus aucuns loisirs pour que je puisse étudier l’esprit tranquille. Et pas si tranquille l’esprit vu que je m’en veux de leur coûter aussi chère. Du coup, je vais devoir prendre un job en même temps que mes études. Résultat, je suis désavantagé face à certain étudiants boursiers.»

Raphaël brise la glace : « moi non plus je ne suis pas boursier. Comparé à la plupart de mes amis boursiers qui ont un appartement et arrivent petit à petit à prendre leur indépendance et sans travailler, moi je vis encore chez mes parents. J’habite à Melun, je prends le TER pour venir à la fac. J’ai 2h30 de trajet quand tout va bien. J’ai peur de compromettre mes études en travaillant. Même les profs à la fac nous le rappelle sans cesse, « les étudiants qui travaillent ont moins de chances de réussite ». Si je suis cette logique je pourrais, dans le meilleur des cas, prendre mon indépendance à l’âge de 25 ans.»

Bénédicte rétorque alors d’un air taquin : « en plus bonjour l’étiquette de looser. Le fiston à sa maman qui ne veut pas quitter le nid ». Un rire franc sort ma petite bande d’amis de ce sujet trop sérieux pour une pause déjeuner. Il n’empêche que cette discussion fait ressortir un réel problème concernant le système de bourse. Celui-ci, basé sur une idée d’égalité des chances offre les chances mais pas tant l’égalité. Non pas que les boursiers ne méritent pas leurs bourses. Mais un affinement des critères serait le bienvenu. Peut-être faudrait-il instaurer un système de bourse au mérite et ne plus se baser seulement sur les critères sociaux des parents ?

Myriam Nécib

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