Chawki a 16 ans, Yanis 17 ans. Ce sont deux des petits gars qui ont jeté des insultes, et peut-être un peu plus, à l’équipe de FR3 venue tourner la semaine passée. La présence de L’Hebdo à Bondy les laisse perplexes, pour ne pas dire réticents, de même que l’hospitalité offerte par certains. « Pour l’instant, l’installation de l’Hebdo ici ne nous a rien apporté, explique Chawki. Nous, on espérait quelques petits trucs. »

Quoi?

Yanis et Chawki expliquent alors qu’il leur manque un local, un centre de jeunes dans le quartier. Il y a bien le Centre Georges Brassens, mais c’est loin, et on y trouve aussi les jeunes des autres quartiers. Eux, ils aimeraient quelque chose de plus proche, réservé à leur groupe de cités. Ils ont l’impression qu’aucune offre ne leur est adressée, ils se sentent un peu laissés à eux-mêmes. Si le journaliste le fait savoir « en haut lieu », peut-être servira-t-il enfin à quelque chose.

Il y a chez eux un mélange de naïveté tendre et de rugosité précoce. Pendant les émeutes, ils ont tous deux été arrêtés et placés en garde à vue pendant 24 heures; pour pas grand-chose: ils étaient en bande, près de la gare, quand la police les a coincés avec 15 autres jeunes à coup de balles en caoutchouc et de placage au sol. C’était préventif, avant les émeutes du soir auxquelles un ami qui les accompagne, lui, a participé.

Pourquoi ont-ils jeté des pierres à l’équipe de FR3? « On était révoltés à cause d’un reportage d’Envoyé spécial sur France 2, explique Yanis. On les avait reçus, mais ils ont pas retenu ce qu’on voulait. » Chawki intervient et complète la pensée: « Ils nous ont fait passer pour des gentils, comme si tout allait bien ici. » Comme ils veulent un local, Chawki et Yanis n’ont pas envie de passer pour des gentils, sinon ils estiment qu’on ne les prendra pas au sérieux.

Par Alain Rebetez

Alain Rebetez

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