Pour une première impression, je n’ai pas été franchement dépaysé. J’ai retrouvé Alain Rebetez comme je l’avais laissé à la rédaction de L’Hebdo, avec son large sourire, son enthousiasme, sa chaleur rigolarde, m’expliquant dix choses à la fois tout en rédigeant un dernier texte pour le Bondy Blog, puis filant à grandes enjambées vers la station du RER, du même pas pressé qui le pousse d’ordinaire vers la gare de Lausanne: Alain est un type qui passe sa vie à courir après des trains.

Me voici donc à Bondy pour lui succéder, et j’imagine que mon collègue Serge Michel (l’initiateur du projet, celui qui a déployé une formidable énergie pour rendre ce Bondy Blog possible) doit être somme toute satisfait.

Au fond, je sens bien que Serge me soupçonne de trop faire confiance à la littérature, mon péché mignon, au lieu d’aller me frotter aux rugosités du terrain. C’était gentiment sous-entendu quand il m’a proposé d’aller faire un tour à Bondy: va donc voir si la réalité des banlieues ressemble vraiment à ce qu’on en raconte dans tes livres…

Pour tout dire, j’ai un peu triché puisque j’ai quand même emporté deux livres avec moi. Le premier est un polar de Raymond Chandler, The long good-bye, qui montre l’inoubliable Humphrey Bogart en couverture. Et le second est un très gros roman, aussi rempli de personnages qu’un annuaire téléphonique, dont j’ai souvent différé la lecture: Illusions perdues de Balzac. J’ai profité du trajet en TGV pour l’ouvrir et j’en ai retenu une phrase sur les journalistes, accusés de tenir « une boutique où l’on vend au public des paroles de la couleur dont il les veut ».

Bien vu Honoré! Le traitement médiatique des banlieues a souvent servi, en effet, à flatter des opinions toutes faites. Mais c’est précisément pour résister à cette tendance que nous avons lancé ce blog. Voilà, c’est dit. Pour moi, les choses sérieuses peuvent maintenant commencer.

Par Michel Audétat

Michel Audétat

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