Céleste, 20 ans, est attablée à une brasserie de la gare du Nord avec un ami. Ils boivent un café, papotent. L’ami, qui a posé son iPod sur la table, ne remarque pas la main discrète venue de nulle part qui tente de s’en emparer. Céleste, elle, la voit tout de suite et pose sa main juste à temps sur l’objet convoité avant de crier. Le prix à payer pour avoir sauver l’iPod sera son sac. Alors qu’elle est concentrée sur l’objet, celui qui semble bien maîtriser son « sujet » se saisit du sac posé près d’elle sur une chaise et disparaît aussi vite qu’il est apparu. Céleste et son ami n’ont pas eu le temps de réagir ni même de voir le visage du voleur, déjà disparu avec son larcin au milieu de la foule pressée de la gare.

Dans le sac de la jeune femme, il y a ses papiers d’identité, sa carte d’étudiante, sa carte bleue, etc. Son portable, lui, était dans sa poche. Toujours ça de sauvé. Céleste va porter plainte au commissariat et retourne à sa vie. Quelques jours plus tard, Florence que je ne vous présente plus, travaille comme toujours au passage piétons métro Ourcq dans le 19e. Elle fait traverser les enfants aux heures d’entrée ou de sortie d’école. Tout le monde la salue. On l’aime bien, Flo, qui affiche sa bonne humeur constante dès le matin, quel que soit le temps ou ses préoccupations personnelles.

Jeudi dernier, elle vient de finir son service, va rentrer chez elle, quand elle remarque quelque chose dans une poubelle. Les poubelles parisiennes sont toutes transparentes pour éviter les attentats. Elle y met sa main et en sort un sac à main noir quelque peu usé mais en bon état. Elle se rend compte qu’il est plein à l’intérieur. Elle fouille dedans et oh surprise, y découvre un portefeuille rempli de cartes dont une d’identité. Il y aussi du maquillage et tout le barda féminin habituel. Florence se dit qu’elle vient de mettre la main sur un sac volé à « l’arrache ». Le voleur a dû le jeter là après avoir pris l’argent car c’est tout ce qu’il n’y a pas.

Elle rentre chez elle libérer la nounou et vaque à ses occupations en pensant apporter le sac au commissariat dès le lendemain. Mais le lendemain, elle change ses plans et tente de trouver le numéro de téléphone de la propriétaire sur les pages jaunes. Sur Internet, elle tape le nom inscrit sur la carte d’identité et voit s’afficher des coordonnées correspondantes. Elle appelle le numéro indiqué, se présente, explique la situation. Elle se rend compte qu’elle parle à la maman de la jeune fille qui s’est fait voler le sac à la gare du Nord. La maman explique à Florence que la famille vit à Chartres mais que sa fille est montée à Paris pour faire ses études à la Sorbonne.

« Elle n’en revenait pas que quelqu’un se soit donné la peine de faire des recherches pour restituer le sac, elle ne savait pas comment me remercier, raconte Florence, tout étonnée à son tour. Moi, je lui ai expliqué que c’est normal et qu’il ne faut pas se mettre dans un tel état. Elle avait du mal à croire que les gens honnêtes, ça existe encore, je crois. » Enfin, après moult remerciements, la mère prend le numéro de Florence pour le transmettre à sa fille afin qu’elle puisse venir récupérer son bien.

Quelques minutes plus tard, Céleste appelle Florence qui lui indique la route qui mène chez elle. Quand une heure après, la jeune étudiante arrive et que Florence lui remet son sac, elle lui demande l’autorisation de l’embrasser en dévisageant sa bienfaitrice comme si elle voyait la vierge marie. Elle se balance d’un pied sur l’autre, ne trouve pas ses mots. Elle veut absolument la remercier mais ne sait comment. Enfin elle fouille dans son sac et constate que rien ne manque à part les vingt euros qui s’y trouvaient.

Elle raconte à Florence les démarches qu’elle a dû entreprendre. « J’ai fait opposition à ma carte bleue, déclarée ma carte d’identité volée. Je devais passer mon permis de conduire lundi mais j’ai annulé. Mais c’est pas grave, ils vont sûrement me redonner une date pour dans un mois. Ce qui compte, c’est que j’ai tout retrouvé grâce à vous. Est-ce que je peux vous offrir un verre, enfin qu’est-ce que je peux faire pour vous ? » Mais Florence ne veut rien, elle répond à la jeune fille qu’elle aussi aimerait qu’on fasse la même chose si ça lui arrivait.

La station de métro Ourcq se trouve sur la ligne 5, qui dessert aussi la gare du Nord : ce fut ici un heureux hasard. On suppose que le voleur vit dans les parages et que c’est pour cette raison que le sac dérobé s’est retrouvé sur le chemin de Florence. Le bien, le mal, le ying et le yang se sont croisés dans la vie de Céleste, ce qui lui aura permis de rencontrer Florence, une fée du 19e arrondissement de Paris.

Nadia Méhouri

Céleste est un prénom modifié.

Nadia Méhouri

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