Une foule se forme en bas de l’immeuble où résidait Tidiane. Par dessus leurs manteaux matelassés, de jeunes hommes enfilent des t-shirts blancs où l’on peut lire « Pour Tidiane » ou « En mémoire de Tidiane ». La mine grave, un petit groupe de femmes tient des roses blanches entre leurs mains.

L’adolescent de 16 ans a été tué de plusieurs coups de couteaux lors d’une rixe entre jeunes. Le traumatisme est d’autant plus grand que la scène s’est déroulée à quelques centaines de mètres de son lycée à Thiais, dans le Val-de-Marne, le lundi 16 janvier. Un autre jeune a lui été blessé.

Une famille meurtrie, mais déterminée à ce que la violence cesse

Selon plusieurs témoins, le jeune Tidiane était en train de s’interposer entre les deux groupes. Ce règlement de compte résulterait d’une rivalité ancienne entre des bandes de jeunes de Thiais et Choisy-le-Roy, deux villes voisines. Comme dans la plupart des conflits entre quartiers, l’origine de cette inimitié reste floue.

Samedi 21 janvier, à 15 heures, la marche organisée par la famille de Tidiane a réuni quelque 1 500 personnes. En tête de cortège, les proches du jeune homme se tiennent par les mains. Dans un froid pénétrant, la marche rejoint le lieu où Tidiane a perdu la vie. Le père de Tidiane dépose alors une gerbe sur les lieux du drame. « Prônez la paix, même si nous sommes dévastés, appelle le père du défunt. Nous n’avons aucune rancœur envers qui que ce soit ».

Faites en sorte que ça ne se reproduise plus

Couvre-chef et longue écharpe bleue autour du cou, le père de Tidiane enjoint ainsi les jeunes à ne pas alimenter le cycle de violence et à ne pas chercher à se venger. C’est aussi le message de la grande-sœur de l’adolescent. La voix brisée, elle insiste : « Surtout, les jeunes, faites en sorte que ça ne se reproduise plus. » 

« C’est votre petit frère à tous. On vous remercie du fond du cœur d’être là », poursuit-elle. L’émotion est forte et quelques jeunes fondent en larmes. Amateur de football, Tidiane était très apprécié dans son quartier.

Cheraz, 16 ans, était une de ses amies. « Cette marche va permettre d’ouvrir les yeux aux jeunes », veut-elle croire, tout en appuyant sur les conséquences de ces violences, « ça détruit des familles et des amis ».

Les manifestants appellent à une véritable prise de conscience

Des habitants d’autres villes sont venus à la marche. C’est le cas de Nassira qui réside à Bonneuil-sur-Marne : « On n’est pas là de gaieté de cœur, on est là parce qu’il est normal de soutenir la famille. » Pour la quarantenaire, cette marche est déjà la marche de trop. « On avait tiré la sonnette d’alarme (sur les rixes entre jeunes). On le fait depuis longtemps, mais on ne nous entend pas. »

Il faut arrêter avec les demi-mesures. Ce n’est pas un fait divers !

Même constat pour Fanta, membre de l’association Femme solidaires de Villeneuve-saint Georges. « Il faut arrêter avec les demi-mesures. Ce n’est pas un fait divers ! Il doit y avoir une concertation, des actions de prévention pour protéger la jeunesse », s’exclame-t-elle. Pour Fanta, cette énième mort est le symbole d’une faillite collective. « Il faut que tout le monde se donne la main : l’État, les parents et l’Éducation nationale. Que tout le monde arrive à prendre ses responsabilités », insiste-t-elle.

Lire aussi. Violences entre jeunes : une responsabilité collective pour des solutions de terrain

Présent lors de la marche, le maire de Thiais a assuré la famille de son soutien et s’est engagé à agir : « Je reverrai le père de Tidiane. J’essaierai aussi de réunir le proviseur du lycée pour réfléchir à des actions que nous pourrions mener ensemble. » L’édile a aussi appelé à ce que personne ne se fasse justice à soi-même.

Pour l’heure, l’enquête est toujours en cours. Quatre mineurs âgés de 15 et 16 ans ont été mis en examen pour homicide volontaire en bande organisée et tentative d’homicide volontaire pour leur participation à la rixe.

Hervé Hinopay

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