Depuis quelques jours, suite à l’émotion suscitée par la photo du petit Aylan Kurdi notamment, il existe une unanimité sur le fait qu’il faut « agir ». Et concernant l’action justement, les migrants d’Austerlitz ont des revendications extrêmement claires. Parmi elles, la nécessité d’une absence de présence policière lors des opérations de sortie du campement vers des lieux d’hébergement ou encore l’ouverture d’un guichet unique d’accueil des migrants pour leurs démarches administratives.
Ce rassemblement est le quatrième depuis le 5 août pour les migrants et ceux qui les soutiennent. Le 20 juillet, les élus municipaux parisiens ont assuré que des solutions d’hébergement allaient être trouvées sous quelques jours. Pourtant, aujourd’hui les migrants sont toujours sur place, et sont plus nombreux comme l’indique Marc Naetlen, membre du « Réseau éducation sans frontières » « Il y avait 250 migrants à Austerlitz au mois de juillet, ils sont plus de 500 actuellement. La situation qui se déroule est insupportable, rien n’avance et les moyens mis en œuvre par les politiques sont proches de zéro ».
Cette situation, c’est pour les migrants qu’elle pèse le plus bien évidemment, Mohamed, un jeune érythréen campant à Austerlitz, prend à son tour la parole « nous venons du Soudan, du Darfour, de pays en guerre, nous sommes passés par la Libye où l’accueil a été très difficile et maintenant qu’on est ici on ne voit rien venir. Ca fait deux-trois mois qu’on est à Austerlitz, on ne mange pas tous les jours, ça n’est pas propre, que pouvons-nous faire d’autre que subir ? »
Pour aller au-delà du simple stade de l’émotion, Marc Naetlen rappelle que « c’est notre mobilisation qui fera que les moyens nécessaires sont apportés et que les migrants seront accueillis dans ce pays ». Il s’agit effectivement de se rassembler, de se mobiliser afin d’interpeller les hommes politiques afin qu’une solution soit trouvée face à un exode massif et inédit depuis la Seconde Guerre Mondiale. Bon nombre de citoyens s’interrogent sur comment apporter de l’aide et du soutien mais il est nécessaire d’appeler à des situations concrètes prises à l’échelle de l’Union Européenne et au sein des Nations Unies.
Aller au-delà de l’émotion et adopter une logique politique c’est ce qu’ont décidé de faire certains membres du groupe de soutien aux migrants d’Austerlitz en refusant de se rendre le 5 septembre au rassemblement qui aura lieu à République. Selon eux, ce rassemblement est davantage une initiative de communicants souhaitant récupérer la situation actuelle plutôt que la revendication de solutions concrètes en faveur des migrants. Anne-Marie, très active auprès des migrants d’Austerlitz depuis le mois de juin adopte une position plus nuancée « j’ai entendu que c’était Raphaël Glucksmann qui était à l’origine de ce rassemblement et je m’étonne un peu, on ne sait pas trop quel est le but, quelles sont les revendications. Je vais y aller mais seulement à titre individuel ». Le groupe de soutien aux migrants d’Austerlitz comme celui de La Chapelle n’appelle pas au rassemblement du 5 septembre, un communiqué de deux membres craint même « la fin de leur mouvement » avec cette récupération.
Quoi qu’il en soit dans « la base », des gens agissent comme Cindy et Sarah qui assurent une permanence en droits sociaux auprès de Domasile depuis le mois de février. Un volontarisme, un passage à l’action que l’on aimerait voir chez beaucoup d’hommes politiques.
Latifa Oulkouir

Migrants du quai d'Austerlitz : une « situation insupportable », et qui dure
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