Lorsqu’il a ouvert le 1er avril, le centre ambulatoire de Bondy était une première en Seine-Saint-Denis depuis le début de l’épidémie. « Au début nous avions surtout des gens qui avaient peur, raconte Marmia Mamri, coordinatrice du centre. Ils entendaient ‘coronavirus’ partout sans savoir ce que c’était, du coup ils venaient nombreux. Ils avaient aussi peur de contaminer leurs proches. »

Cette infirmière vacataire de métier a rejoint le centre dès son ouverture et y exerce en tant que coordinatrice. Elle fait partie d’une équipe composée de médecins généralistes, d’infirmiers et d’aides-soignants qui sacrifient de leur temps pour endiguer l’épidémie : « On a deux équipes : une qui vient le matin de 8 à 14h et l’autre qui reste l’après-midi jusqu’à 20h. Dès que l’une des équipes a fini son service, tout le monde retourne sur son poste de travail : à l’hôpital, dans les cabinets ou dans les EHPAD. Les infirmières libérales retournent faire leur tournée à domicile. »

La mise sur pied du dispositif a pu être possible grâce au partenariat de la municipalité, de l’hôpital Jean Verdier et de la communauté professionnelle territoriale de santé (CPTS). « La mairie nous a mis à disposition le palais des sports pour l’accueil des patients, explique Marmia Mamri. On a reçu des barnums aussi. La CPTS, le CMS (conseil municipal de santé) et l’hôpital Jean Verdier nous ont donné le matériel nécessaire pour ausculter les patients. Et l’ARS (agence régionale de santé) nous a fourni les équipements de protection. Au début c’était tendu au niveau des masques mais maintenant on reçoit de grosses quantités chaque semaine. »

Des panneaux d’information en français, en turc, en arabe…

Mariama et ses collègues s’estiment suffisamment protégés pour accueillir les patients : « On a reçu les protections nécessaires bien assez tôt de la part de la ville. Depuis le 1er avril, on a eu qu’un seul cas parmi les soignants, mais je ne sais même pas si elle l’a attrapé ici. » Et pour cause, ici, les précautions sont strictes : à l’entrée du Palais des sports, il est écrit en gras sur plusieurs panneaux de ne rien toucher et de respecter la distanciation sociale. Sur les portes, les recommandations du ministère de la santé ont été traduites en plusieurs langues dont l’arabe et le turc pour qu’elles soient accessibles à tous.

Durant les premières semaines qui ont suivi l’ouverture, les médecins présents se contentaient de donner des diagnostics aux patients via des examens et des scanners pulmonaires : « On a une régulation téléphonique comme au Samu, c’est-à-dire que lorsque vous appelez, un médecin se charge de vous examiner par téléphone. Ensuite il peut vous donner un rendez-vous pour venir au centre et avoir un diagnostic plus poussé. On vous ausculte et on vous fait passer au scanner. Et puis le médecin vous donne le verdict : s’il pense que vous êtes infecté, il vous donne un protocole à suivre. »

Elle poursuit : « On a des critères pour les diagnostics : il faut avoir plus de 16 ans et ne pas vivre seul, parce que si vous avez été confiné seul et que vous avez bien respecté le confinement, il y a peu de chance que vous ayez contracté le virus. » Depuis quelques semaines, le centre est désormais « Covisan » c’est-à-dire qu’il y est possible de se faire dépister dès lors qu’on est symptomatique : « Les dépistages ne sont ouverts qu’aux personnes symptomatiques uniquement. Il faut venir sur présentation d’une ordonnance, et le médecin qui s’occupe de vous fait une enquête sociale. Il vous demande si vous avez respecté le confinement, si vous vous vivez avec des gens, et si ces gens sont des sujets à risques. »

Si le patient est déclaré positif il suivra des mesures d’isolement demandé par le médecin, ses proches seront également dépistés dans les 7 jours qui suivent afin de casser la chaîne de contamination.

L’épidémie recule mais pas la vigilance

A ce jour, le centre s’est chargé d’accueillir un peu plus 2000 personnes soit 4 à 5 patients par jour. Il n’y a pas de profil type qui se dégage parmi les patients, mais Marmia constate que certains viennent parfois de très loin : « On n’a pas eu uniquement des gens de Bondy Nord, on accueillait des gens de Livry-Gargan, Bobigny, certains de Paris, du 77 ou même du 95. Je dirai que 50 % venaient de Bondy et le reste d’ailleurs »

Seules 5 villes de Seine-Saint-Denis disposent d’un centre Covisan comme le raconte l’infirmière : « Les centres de dépistages nécessitent de grosses structures et de gros moyens, c’est pour ça qu’on en trouve que dans des hôpitaux comme à Bobigny ou Aubervilliers. Mais nous on a la chance d’avoir l’appui matériel et humain de Jean Verdier. ». L’autre avantage que présente le service de Bondy est d’être ouvert le dimanche et les jours fériés.

Alors qu’on se rapproche petit à petit de l’épilogue de cette triste crise sanitaire, la coordinatrice salue le sang-froid des soignants : « Vous savez, on a l’habitude de faire face à ces choses-là, c’est notre métier, c’est comme ça.  Alors oui, au début, ce Covid-19 personne ne le connaissait, on a entendu tout et son contraire, mais dans tous les services dans lesquels on exerce, on est habitués à avoir des patients mal en point. »

« Aujourd’hui, rien ne change. Même si la maladie est nouvelle, on doit se tenir prêt quand on fait appel à nous », explique-t-elle avec beaucoup de détermination dans la voix. Marmia et ses collègues seront sur le pont jusqu’au mois d’août afin d’accueillir des patients qui heureusement pour eux sont de moins en moins nombreux à se présenter au Palais des sports.

Félix MUBENGA

Crédit photo : FM / Bondy Blog

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