Le prix du pétrole flambe, les pays de l’OPEP attendent encore avant d’augmenter la production. La demande croît, l’offre stagne. Une solution, parmi tant d’autres : arrêter de déverser accidentellement, et en pure perte, des tonnes d’hydrocarbures, qui une fois raffinés auraient pu alimenter nos voitures, ou les bateaux de pêcheurs mécontents. Les étudiants de l’université de Saint Quentin en Yvelines ne seraient pas contre !

Alors que l’après-Grenelle de l’environnement est enfin discuté à l’Assemblée nationale et au Sénat, une cinquantaine d’étudiants en droit et sciences politiques ont décidé de présenter leur propre Déclaration pour la sauvegarde et la protection juridique de l’environnement. Le texte regroupe une vingtaine d’articles et sera débattu par des représentants du MEDEF, du ministère de l’environnement et d’associations impliquées dans la préservation de l’environnement, ce mardi.

« Dans le contexte d’incertitudes actuel, la société se tourne vers le législateur, comme s’il était le sauveur, explique Laurent Neyret, maître de conférences en droit privé à l’université de Saint Quentin et spécialiste des questions de droit de l’environnement. Avec ce travail, Nadège Reboul-Maupin et moi-même avons voulu mettre les étudiants dans la peau du législateur et leur faire comprendre que le droit n’est pas une technique sans idéologie, mais une discipline porteuse de valeurs. »

Dure épreuve ! pense Maria Bonita, une des étudiantes investies dans le projet. Elle n’a rien du cliché de l’étudiante en droit, celui qu’ont façonné mes amies étudiantes en droit notarial. Elle ne porte pas de talons, a même un piercing sous la lèvre et ses joues rougissent d’engagement à l’évocation des droits des Aborigènes à disposer de la nature. Elle envisage d’en faire son sujet de thèse. L’article sur lequel elle a dit « avoir réfléchi, même en prenant sa douche » c’est le numéro 14 : droit international pénal.

Une catastrophe écologique, c’est : la disparition des milliers d’êtres vivants, des pertes économiques, une atteinte au paysage et un traumatisme humain. Pour faire simple, ça peut prendre la forme d’une marée noire. Les responsables d’une telle atteinte à l’environnement risqueraient d’occuper un siège sur le banc des accusés au tribunal pénal international (TPI) de La Haye, d’après la déclaration estudiantine. La même juridiction que celle qui jugeait l’ancien président yougoslave Slobodan Milosevic en 2005.

Faire comparaître devant le TPI des citoyens plus respectables que ce dernier et certainement repentants, n’est-ce pas exagéré ? Maria Bonita argumente le choix de son groupe de travail. « Nous avons décidé de nous appuyer sur les structures et législations existantes, au lieu d’en créer de nouvelles. Ensuite, on a clairement choisi de considérer tout crime contre l’environnement comme un crime contre l’humanité. » Elle résume, devant mon air un peu ahuri : « L’humanité faisant partie de l’environnement, toute atteinte au second a des conséquences sur la première. C’est pourquoi nous avons considéré qu’un crime contre l’environnement équivaut à un crime contre l’humanité. »

De manière plus concrète, comprenons que si mon voisin décide de brûler ses ordures dans le fond de son jardin et cause la mort par asphyxie de mes orchidées (dernières spécimens de la variété), il s’expose à de graves sanctions pénales. C’est presque ça.

Autre mesure originale mais ancrée dans la réalité économique : la création d’une bourse dédiée aux entreprises respectueuses de l’environnement. Son nom ? Marché VERT pour valorisation de l’environnement et de responsabilisation des titres. L’actionnaire d’une SAVE (société par action de valorisation de l’environnement) s’enrichira d’autant plus que l’entreprise en question développera une activité respectueuse de l’environnement. En gros, plus la SAVE construit des voitures hybrides, plus le portefeuille de l’actionnaire grossit et moins il a de difficultés à faire le plein d’essence … ou à acheter bio, pour rester dans l’esprit de la loi.

Un groupe de travail sur l’environnement mené par des étudiants en droit et en sciences politiques, c’est un peu bizarre, non ? Pas du tout, quand on sait que les scientifiques français du groupe d’experts intergouvernemental sur l’évolution du climat, le GIEC, ont leur laboratoire dans la même université. Le même GIEC dont les décideurs de tous les pays écoutent religieusement les conclusions sur les possibles évolutions des phénomènes climatiques, le même GIEC qui a reçu le Prix Nobel de la Paix avec Al Gore l’an dernier.

Alors quand les étudiants d’une université qui abrite un tel vivier de sommités parlent d’environnement, on est en droit de s’attendre à un résultat probant. Non pas des Nicolas Hulot en puissance, mais peut-être un David Suzuki ou une Elizabeth May se cache dans ce groupe ? Affaire à suivre !

Bouchra Zeroual

Bouchra Zeroual

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