Grande oubliée de ce XIXe siècle, la question des quartiers populaires dans les politiques publiques européennes réside subsidiaire. Si la construction européenne ne vient pas aux quartiers, c’est aux quartiers à aller vers Bruxelles et Strasbourg. Tribune.

Les enjeux européens nous convoquent à une implication protagoniste et politique en tant que citoyennes et citoyens ou habitants étrangers en Europe !

Depuis les débuts de la construction de l’Europe et notamment depuis 30 ans, en France et ailleurs, le phénomène politique des quartiers populaires n’est pas assez évoqué, souligné, traité, développé. Comment l’Europe peut-elle être aussi une solution positive en France et en Europe ? Il y a donc plusieurs dichotomies et contradictions, en voici quelques unes. En effet, plus de 60% des lois votées par la Commission Européenne ont un impact en France et dans les autres pays membres. Il y a donc plusieurs effets, ceux issus de la zone euro et ceux issus de la Commission Européenne. Dire que rien n’est fait serait mentir mais la question des quartiers populaires se pose avec tellement d’acuité en France qu’il est impossible de ne pas l’évoquer avec plus de force sur le plan européen.

Focus sur les lieux institutionnels et les moments importants d’évocation des problématiques des quartiers populaires au niveau national : tout d’abord les élections municipales donc les agglomérations, ensuite les cantonales puis les régionales, les législatives, les sénatoriales et enfin les présidentielles. Il y a déjà de larges insuffisances sur le sujet des quartiers populaires lors de ces élections. Et sur les questions européennes, la question des quartiers populaires est soit annexe soit traitée de manière famélique alors que nous pensons qu’elle doit être au centre des préoccupations avec d’autres thématiques.

Au regard de la construction européenne, deux dates importantes sont à relever : 1951 avec la création de la C.E.C.A. et 1957 avec la création de la C.E.E. Il convient donc de rappeler quelques phrases fondatrices d’un des pères de l’Europe, Robert Schumann, d’une extraordinaire actualité :

 » L’Europe avant d’être une alliance militaire ou économique, doit être une communauté culturelle dans le sens le plus élevé de ce terme. »

 » L’Europe se cherche, elle sait qu’elle a en ses mains son propre avenir. Jamais elle n’a été si près du but. Qu’elle ne laisse pas passer l’heure de son destin, l’unique chance de son salut. »

Malgré la résonance historique de ce discours visionnaire, qui a envie de fêter l’Europe aujourd’hui ? Oui, fêtons la paix, notre continent ayant connu de nombreuses guerres et non des moindres. Toutefois, arrêtons-nous sur des guerres qui ne sont pas d’ordre militaire mais plutôt des guerres économiques, guerre des monnaies, de change, guerre des modèles socio-économiques.

Oui, l’Europe reste à faire mais beaucoup de choses sont à défaire. En premier lieu, construire une Europe politique et sociale qui prendrait en compte l’intérêt des peuples européens, ceci est indispensable pour que l’Europe soit une véritable union. En second lieu, les inégalités s’accumulent alors que l’Union Européenne fait partie des 3 premières puissances mondiales dans bien des domaines, notamment sur le plan économique, industriel…

Quelle contradiction, comment une telle puissance peut-elle avoir si peu de considération quant à la fragilisation de vies de millions d’européens ? En effet, la zone euro compte aujourd’hui plus de 26 millions de chômeurs soit 12% de la population active de l’Europe, répartis de façon hétéroclite selon les pays, soient 5% de chômeurs en Allemagne, 26% en Grèce, 27% en Espagne. Les jeunes de moins de 25 ans ne sont pas épargnés avec 23% dans la zone euro dont 58% en Grèce, 56% en Espagne alors que 7% en Allemagne sont concernés même si beaucoup sont des travailleurs précaires (tous âges confondus).

À quand l’harmonisation fiscale et sociale dans une Europe en récession ? À quand les forces économiques mises au service de la relance pour l’emploi, de la relance industrielle, au service des peuples européens ? Autre grande inquiétude, nous voyons de nouveau se développer un phénomène très inquiétant, pour la suite de la construction européenne, à savoir, des discours populistes, réactionnaires, racistes, discriminatoires mais aussi on peut le dire, des discours aux relents fascistes.

Beaucoup sont discriminés, montrés du doigt parce que de confession musulmane, étrangers vus ou perçus comme tel dans le pays dans lequel ils vivent parce que d’une couleur ou catégorie sociale différente.

Il faut absolument s’investir sur le plan politique, économique, social, écologique, géopolitique. Nous sommes condamnés à réussir ensemble pour que cette supranationalité soit une construction politique inédite, respectueuse des peuples et des personnes, qu’ils soient européens ou non.

Donc, citoyennes et citoyens des quartiers populaires, osons davantage ! Le pouvoir, cela se prend, cela ne se demande pas. Le temps de l’affirmation  doit être permanent et nous ne devons nous interdire aucun des champs sus-mentionnés plus haut. L’Union Européenne a un tel impact sur nos vies quotidiennes. Son présent et son avenir ne peuvent ni ne doivent se définir sans nos avis, expertises, visions, projets, propositions, prises de paroles, écoute et participation. Il doit y avoir des élus des quartiers populaires, présents dans tous ces champs et ne se laissant pas enfermer dans certaines thématiques auxquelles on veut toujours les assigner.

Pour que la prochaine fois, la fête soit réelle et belle au regard des opportunités, la politique de l’Europe doit prendre de nouvelles orientations dans l’intérêt général des européens.

Citoyennes et citoyens, faites l’Europe !

Jean-Claude Tchicaya

Ex-Maire adjoint Bagnolet

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