Après quatre journées de mobilisation les 29 septembre, 11 octobre, 17 novembre et 29 novembre, le collectif Touche pas à ma ZEP, menace d’une grève illimitée si ses revendications ne sont pas entendues par le ministère de l’Education nationale.

Pour la première fois, notre grève du 29 novembre a été soutenue par une intersyndicale.  Les académies de Versailles, Créteil et d’Aix-Marseille, mais aussi Toulouse, l’Oise, Dreux, Lille,Rouen es sont mobilisés tandis que des manifestations avaient lieu dans 4 villes différentes (Paris, Marseille, Creil et Dreux). Enfin, aux côtés des enseignants des lycées se sont parfois aussi mobilisés des personnels agents techniques ainsi que des enseignants de collèges et d’écoles élémentaires. A ce jour, 90 lycées dans 14 académies ont signé l’appel « Touche pas ma ZEP ! » lancé à la rentrée de septembre 2016 par trois lycées des Hauts-de-Seine.

Notre revendication est simple : nous exigeons la publication d’une carte élargie des lycées en éducation prioritaire construite sur des critères transparents, définissant les contours d’un label commun garantissant à la fois des moyens à destination des élèves (effectifs limités par classe, nombre plus important de personnels encadrant, financement d’heures de soutien scolaire ou de projets éducatifs…) et des compensations spécifiques pour l’ensemble des personnels (indemnités, droit à la mutation…) à même de stabiliser les équipes. Nous sommes en effet convaincus de la nécessité de conserver une politique d’éducation prioritaire ambitieuse et volontariste. Notre mobilisation est d’abord motivée par le souci de défendre un égal accès à l’éducation pour tous les élèves.

« Des moyens nécessaires notamment humains pour la réussite de nos élèves »

Notre mobilisation paie ! Elle a contraint le gouvernement à faire des annonces qui semblent de plus en plus improvisées : après une première journée de grève, le 29 septembre, le ministère a ainsi annoncé la prorogation pour deux ans des indemnités ZEP des enseignants. Après la seconde journée de grève, le 11 octobre, il a fait paraître un décret annonçant le maintien pendant deux ans des bonifications spécifiques pour les mutations des enseignants. Des annonces insuffisantes, voire méprisantes et ce, pour deux raisons. D’une part, elles relèvent d’une « clause de sauvegarde ». Cette expression, le ministère l’a forgée lors de la refondation de l’éducation prioritaire dans les écoles et collèges pour amortir « en douceur » le manque à gagner des enseignants dont les collèges et écoles ne figuraient plus dans la nouvelle liste des REP et REP+. Son utilisation pour les lycées revient donc à signifier leur sortie programmée de l’éducation prioritaire, ce que nous ne saurions accepter. D’autre part, ces annonces laissent de côté la principale demande du collectif « Touche pas ma ZEP ! », à savoir la garantie des moyens nécessaires notamment humains pour la réussite de nos élèves.

Lundi 28 novembre, à la veille de la journée de grève nationale du mardi 29 novembre, la ministre, Najat Vallaud-Belkacem en visite à Marseille, a tenté de désamorcer le mouvement en lançant de nouvelles promesses. En plus d’assurer le « maintien de tous les moyens supplémentaires dont bénéficient les lycées de l’éducation prioritaire », elle a en effet déclaré avoir décidé « d’allouer une dotation exceptionnelle de 450 emplois nouveaux à la rentrée 2017 pour les lycées et les lycées professionnels les plus défavorisés ».

Aucune garantie sur l’après 2017

Là encore, cet engagement demeure très éloigné des revendications du collectif. D’abord, cette annonce ne concerne que la rentrée 2017. Que se passera-t-il après ? Nous n’en savons rien et aucune garantie sur les moyens ne nous est donnée. Ensuite, dans un contexte démographique en hausse, une partie de ces postes ne servirait qu’à absorber le surplus d’élèves qui arrivent en lycée. Enfin, cette annonce frise le non-sens : la mention des « lycées les plus défavorisés » ne renvoie à aucune catégorie juridique de l’éducation nationale. Il n’y a plus de lycées classés « éducation prioritaire » depuis 2015 (conséquence de la réforme de 2014) et par conséquent pas non plus de moyens particuliers affectés au titre d’un statut particulier. La ministre promet le maintien de moyens alors même qu’aucun décret, aucun arrêté n’existe actuellement, pas même en école ou en collège REP ou REP+, pour déterminer des moyens contraints et pérennes pour les établissements dits prioritaires. La ministre ne peut se référer ici à aucun texte réglementaire (ce qu’elle fait en revanche pour les indemnités et les bonifications), et ne peut donc apporter aucune garantie quant à ses promesses !

Comble de l’absurdité, le même jour, le représentant du cabinet du ministère, Eric Tournier, a déclaré devant l’intersyndicale d’Aix-Marseille qu’il se refusait à donner une liste des lycées qui bénéficieraient de cette mesure exceptionnelle. Sous son apparente clarté, l’annonce gouvernementale est donc en réalité inepte : quel sens y a-t-il à annoncer des moyens supplémentaires si l’identité des bénéficiaires est tenue secrète ? Et quel sens y a-t-il à dissimuler le contenu de cette liste ? Comment juger si l’attribution de ces moyens correspond effectivement à nos besoins ? Une seule certitude, peu à même de faire taire nos inquiétudes et nos revendications : les lycées qui n’ont aucun label, mais qui devraient légitimement relever de l’éducation prioritaire (en fonction de la population qu’ils accueillent et des problématiques spécifiques qu’ils rencontrent), en seraient d’emblée exclus.

« Deux ans que nous demandons une carte de l’éducation prioritaire pour les lycées »

Enfin, la déclaration de la ministre selon laquelle « les moyens devraient être prolongés le temps que soit construite dans la concertation une nouvelle cartographie » est totalement inacceptable. Nous demandons depuis trois mois la publication avant 2017 d’une carte élargie de l’éducation prioritaire pour les lycées. Contrairement aux allégations de la ministre, la publication de cette carte est crédible à plus d’un titre. Elle est techniquement possible car la carte des collèges REP et REP+ a été construite en deux mois en 2014. Elle est légitime puisque l’annonce de la publication d’une carte pour les lycées date des assises de l’éducation prioritaire de 2014, sous le ministère de Vincent Peillon, auxquelles les lycées n’ont d’ailleurs pas vraiment été convié. Cela fait donc plus de deux ans que nous l’attendons !

Menace de grève illimitée à la rentrée

Le collectif « Touche pas ma ZEP ! » se prépare donc à poursuivre et à amplifier sa mobilisation pour obtenir des annonces sérieuses et concrètes de la part du ministère. Il a lancé un ultimatum pour la rentrée de janvier, assorti d’une décision de grève reconductible s’il n’obtenait pas satisfaction avant cette date. Un décompte a d’ores et déjà été lancé : il ne reste plus que 33 jours au gouvernement pour rendre sa copie ! Sans réponse d’ici là, les enseignants mobilisés se lanceront dans une grève à durée indéterminée à partir du mardi 3 janvier 2017, jour de la rentrée des congés de Noël.

Le Collectif « Touche pas à ma ZEP »

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