Que faut-il pour que le feu prenne ? Sans doute une étincelle de trop. Le 27 octobre 2005, Zyed Benna,17 ans, et Bouna Traoré, 15 ans, ont trouvé la mort en tentant d’échapper à un contrôle policier.

Deux vies fauchées à la sortie d’un simple match de foot

Ces adolescents n’étaient pas des délinquants, ils n’avaient rien à se reprocher, ils ont simplement eu peur de la police. « Théo et Adama nous rappellent pourquoi Zyed et Bouna courraient », rappelait une banderole lors d’un rassemblement en soutien à Théo Luhaka, en 2017.

À chaque génération son martyr : les morts du 17 octobre 1961, Malik Oussekine , Zyed Benna et Bouna Traoré, Théo Luhaka, Adama Traoré… La liste est trop longue pour être exhaustive.

Ces martyrs sont les figures d’une violence ordinaire exercée par les représentants de l’État sur la voie publique. Ici, dans nos quartiers, qui ne connaît pas au moins quelqu’un qui a été victime d’un contrôle au faciès, d’une insulte ou pire de la part des forces de l’ordre ?

« J’entends déjà le chœur des innocents parler : « Non, ce n’est pas vrai, vous êtes trop amers » », écrivait James Baldwin dans La prochaine fois, le feu (paru en 1962). Nous aussi.

En 2022, 12 personnes ont été tuées à bord d’une voiture par des tirs de policiers

Qu’est-ce qui n’est pas vrai ? Les violences policières ? Ces mots restent imprononçables pour les plus hauts responsables politiques de ce pays. Pourtant, depuis le début de l’année 2022, 12 personnes ont été tuées à bord d’une voiture par des tirs de policiers.

Des homicides policiers froidement justifiés par des refus d’obtempérer, voire « un ensauvagement de la société ». Ne sommes nous que des sauvages à leur yeux ?

Lors de la poursuite de Zyed Benna et Bouna Traoré, un policier a dit dans sa radio : « S’ils rentrent sur le site EDF, je ne donne pas cher de leur peau ». Ce 27 octobre 2005, ils n’ont pourtant pas jugé bon d’appeler les secours.

17 ans après, le constat est amer. Certaines chaînes d’info déversent en continu des discours de haine raciste. Des mots qui se logent au plus profond des corps et entretiennent les braises de la révolte.

17 ans après, la même question demeure : que ferez-vous pour que « la prochaine fois, le feu » ne prenne pas ?

Héléna BERKAOUI

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