La VIe république existe et elle a un président. En effet, voilà maintenant un an que Dilgo Marvick s’est imposé à tous comme le premier président de la république internaute et bondynoise. Comme souvent, le Bondy Blog a été le premier à s’en apercevoir et c’est pourquoi le président Dilgo a tenu à rencontrer personnellement un de nos blogueurs, comme il avait promis qu’il le ferait au bout de sa première année de mandat. Il s’est donc rendu en Chine où il a rencontré notre grand reporter Chou Sin dans un KFC de Shanghai.

Bonjour Dilgo, vous êtes donc président de la république, du moins selon vous, mais comment êtes-vous arrivé au pouvoir ? Je ne me souviens pas avoir vu votre nom sur les bulletins de vote ?

C’est vrai. Je suis devenu président peu à peu. J’ai agrandi mon audience, j’ai séduit, convaincu, et puis, la VIe république, trop de gens en avait besoin, alors on a décidé d’y aller, de ne pas attendre. Aujourd’hui on est des milliers autour de la planète, on a tous Bondy en commun, on communique par Internet. Ce n’est pas un vote bidon qui nous donne du pouvoir, c’est la conscience d’avoir cette chose en commun, la terre bondynoise.

Quel est votre passé politique ?

Les bagarres dans la rue. Je n’ai jamais voulu être président quand j’étais petit, sauf le jour où ma mère m’a acheté un bureau tellement grand que j’avais l’impression d’être un personnage important les rares fois où je m’y asseyais pour faire mes devoirs. Mais je le faisais rarement parce que maman travaillait dans un bar de nuit et mon père, j’en ai plusieurs, aucun d’eux ne vivait avec nous. J’étais toujours dehors. À Bondy c’est souvent comme ça, même si on habitait rue de Versailles, quand les jeunes sont livrés à eux-mêmes parce que les parents sont occupés. Mon passé politique, c’est les bagarres dans la rue.

Une personne qu’on prénomme Nicolas se dit président, est-ce un imposteur ou est-ce vous l’imposteur ?

Écoutez, Chou, je sais que vous êtes bien avez ce type, ça ne me dérange pas, il me semble que vous confondez. D’abord, ce type, ce Nicolas, c’est un fonctionnaire, c’est le fonctionnaire le mieux payé et le plus cher de tous. C’est lui qui donne des ordres à tous les autres et qui a le culot de dire qu’ils sont trop nombreux. On dirait qu’il a été envoyé par tous les ennemis de la fonction publique pour faire un carnage dans les rangs de l’État. Mais a-t-il parlé de faire un carnage dans les rangs de l’armée ? Président, ce n’est pas ça, le président des Français, c’est le président des Français, de ceux qui se voient refuser des appartements par des propriétaires angoissés parce qu’ils ne sont pas des fonctionnaires, justement, et qu’ils n’ont pas les garantis suffisantes. Un président c’est un type à part, un style de vie, une posture, pas une imposture.

Vous faites rarement la une des journaux. J’ai envie de dire même que vous n’avez jamais fait la une, ni d’apparition médiatique, est-ce normal ?

Je sais Chou. Je vous l’ai souvent reproché et j’ai exercé de nombreuses pressions pour vous faire quitter le Bondy Blog et effacer vos textes et vos vidéos. J’avoue que c’était sous le coup de la colère et du dépit. J’aurais bien voulu saturer l’espace médiatique mais je n’ai pas intéressé la France qui se « couche tard » parce qu’elle regarde la télé de Nicolas. Et puis c’est vrai que le Bondy Blog n’était pas encore aussi puissant que TF1 à l’époque. Vous savez ce que je pense des médias en général, ils sont juste là pour montrer aux gens de qui on parle et de qui on ne parle pas, et on ne parlait pas de moi. Les médias sont comme ces panneaux qu’on aperçoit dans les centres boursiers, ils indiquent la valeur des gens. Il faudra du temps avant que les gens réalisent qu’ils ont un président et que c’est tout à fait possible de faire la une des journaux quand on est n’importe qui. En réalité, Internet (et le Bondy Blog) va changer les mentalités.

D’ailleurs, quel est votre parti politique ? En avez-vous un d’ailleurs ? Et si oui est-ce plutôt un parti de droite ? de gauche ? ou du centre ?

Je suis né exactement à Noisy-le-Sec, en banlieue rouge, j’ai commencé communiste et George Marchais a été mon premier modèle. Il ressemblait à ceux que je fréquentais. Ca aurait pu être de Gaulle, mais je ne suis pas né à Neuilly. D’ailleurs, maintenant, j’habite en Touraine, le pays de Balzac et Rabelais dans la région Centre. Je trouve que la droite raison, Dieu aide ceux qui s’aident eux-mêmes et en même temps, j’ai fait ma scolarité au collège Jean Zay et il n’y a pas eu de lycée pour moi, le boulot à 16 ans, et la gauche a raison de dire que si j’étais né à Neuilly, j’aurais eu plus de chance d’aller au Lycée et même au Lycée Louis-le-Grand, là où il y avait Chirac.

Habituellement le président loge pendant son mandat à l’Élysée, que faites-vous donc au Grand-Pressigny ?

Non, l’Élysée c’est pour le Premier Fonctionnaire de la Ve république, qui n’est pas encore tout à fait sortie des brumes de la Monarchie. La différence entre une monarchie et une république – c’est le philosophe Kant qui l’a dit – c’est que dans une république on obéit avec sa raison tandis que la monarchie, on obéit parce qu’on est impressionné par la fanfare, le décor et tout le bastringue, le tapis rouge et les photos avec la Reine d’Angleterre ou le Négus de Libye. À cet embryon de république, celle de Nicolas Ier, descendant du Général et de Louis XIV, il faut le prestige et les larbins, ils sont 6 000 à l’Élysée, il faut le savoir. Je ne suis pas sûr que Nicolas ait prévu de réduire les effectifs. C’est un signe, ce fonctionnaire ne s’adresse pas à la raison, son mode de communication politique, c’est le prestige. C’est encore du « Ya bon banania, oui not’ bon maître ». C’est vrai que je suis très photogénique et que je passe bien dans Elle, mais j’ai une maison comme tout le monde, Chou. C’est de la république que je suis président, pas des sujets de la Reine et des colonies.

Quel bilan faites-vous au bout d’un an d’exercice ? Qu’est-ce qui a été bien fait, mal fait, et que reste t-il à faire ?

Bon, on avance doucement et sans tapage, le réseau de la VIe république se forme à Bondy, Neuilly, Marseille, Lyon, Dakar et maintenant Shanghai, grâce à vous. Et bien d’autres encore puisque Moscou et Rio sont dans le collimateur avec Palerme et Sidney. Bondy sera bientôt le symbole de notre république ouverte à tous dans le monde et il faut s’y préparer. On a le temps. Mais il reste beaucoup à faire. Bondy fait encore peur, je le vois bien au village où les gens pensent que l’internationale bondynoise, c’est une horde de sarrasins en cagoule sur la Place de l’Église. On en discute pendant des heures au bar, chez Andrée, on fait évoluer les mentalités, peu à peu à l’heure de l’apéro.

Comment trouvez-vous la vie de président ?

Au début les voyages coûtaient chers, les budgets du blog était serrés et j’ai toujours en travers un aller-retour à Addis Abeba que le Bondy Blog n’a jamais voulu me rembourser. Maintenant, c’est un peu différent, la tune commence à tomber, il vous a suffi de lever le petit doigt pour me faire venir à Shanghai. J’aimerai rester jusqu’aux jeux Olympique mais j’ai mes obligations en France également. Je travaille en Contrat Avenir pour une agence immobilière basée dans le Sud Touraine, c’est 780 € par mois, j’aime bien ce boulot, je ne vois jamais le patron et je passe mon temps à prospecter sur Internet. D’accord, je pourrais abuser de la situation, profiter que ma notoriété grandit mais je m’efforce de ne pas jouer là-dessus, je suis républicain avant tout, ne l’oubliez pas. Un contrat, même d’avenir, est un contrat.

Comment votre famille, votre entourage vit-elle votre présidence ? Ils vous soutiennent ? Vous conseillent ? Essayent de vous raisonner ?

Au début c’était dur, on n’avait pas de nourrice pour la petite, Apollonie, qui est la fille d’Éléonore et qui avait à peine 1 an quand je suis devenu président. Et puis petit à petit les choses se sont améliorées, aujourd’hui on a même une bonne, Gisèle, qui est vieille, sourde, mais une santé de fer. Au début elle nous accueillait dans sa maison, ça lui faisait de la compagnie, et petit à petit c’est devenu notre bonne puisqu’elle s’occupe de tout, la vaisselle, le linge, les poules… J’aime l’écouter parler toute seule, elle dit parfois des choses très profondes pour qui a des oreilles.

Propos recueillis par Chou Sin

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