Puisque je n’ai pas eu la chance d’être un de ces journalistes invités dans l’avion du général Alcazar quand il est allé au Brésil (vendre les avions subventionnés Rafale du grand ennemi de l’Etat providence, le général Dassault du Figaro), et comme je n’ai pas eu le plaisir de lui parler de Bondy, je me contenterai de ma petite chronique bénédictine, de l’abbaye de Fontgombault où je prie pour l’âme des damnés en méditant sur les affaires de la France.

Clearstream. Le nom est marrant. Ça veut dire courant propre, ou courant de clarté si on est poète. Si je ne vivais pas au milieu des moines, je donnerais ce nom à mon chat. Aujourd’hui, faut le dire, ce nom sonne plutôt comme une question: à qui profite le crime ? Alcazar tue Villepin et devient général, Romulus tue Remus et fonde Rome. En fait, c’est une vieille histoire.

C’est pour ça qu’il vaut mieux ne pas trop chercher de coupable, parce que le problème, ce n’est pas le coupable. Il y aura bientôt un procès, c’est pour ça que je dis ça. Le général Alcazar descend son frère de Gaulle, s’empare des Bondy blogueurs, mets la main sur la police, rebaptise les renseignements généraux, se fabrique des foules sur mesure, vend les armes et les prisons de ses amis, tout se passe comme si (oui, comme si). Je ne dis pas que j’ai raison, mais je dis que je serais le juge, je me méfierais.

Que le général Alcazar soit coupable ou que ce soit l’autre, son frère de Gaulle, le juge devrait s’en fiche. Que les frères se battent à mort à la rigueur, aussi. C’est ce pour quoi ils se battent qui m’inquiète, la fille, Marianne, vous en avez sûrement déjà entendu parler ? Alors là, le juge, c’est quand même pour ça qu’il est appointé et qu’on l’appelle votre honneur, c’est pour qu’il protège la fille.

Quand les garçons se sont bastonnés dans les coulisses de l’Etat, quand la querelle est vidée parce qu’on a fini par oublier son objet, quand les belligérants sont partis chacun chez soi, la République demeure en loques, en lambeaux, des petits morceaux de débats sanglants à droite à gauche.

La République, personne n’en veut. D’ailleurs, c’est une bonniche, elle n’a pas de château. Une fille du peuple souillon. A côté de Bernadette et Carla, on ne la prend même pas comme serveuse. Vous vous souvenez, on la voit sur les timbres. Normal, elle vient du peuple.

Il faut la servir par amour désintéressé de l’humanité, c’est pour ça que j’ai pu devenir président de la République si facilement en 2007. Car ils voulaient tous être président. Mais président de la République, bernique. La place était libre. Donc elle était pour moi. Il n’y avait qu’à se baisser. Et je me suis dit que l’abbaye de Foncombault, chez les moines, c’est encore ce qui ressemble le plus à l’idée que je me fais d’elle et du service des autres.

Et puis j’ai pu réfléchir à une solution pour nos deux juges qui seront chargés de l’affaire Clearstream. Dieu, gloire à son nom, les préservent de chercher à tirer un coupable de ce nid de vipères. Je lui ai demandé de m’éclairer, et il m’a ébloui de sa lumière, comme d’habitude. J’ai trouvé l’histoire du roi Salomon en ouvrant la Bible.

C’est l’histoire de deux prostituées qui avaient un enfant chacune. L’enfant de l’une d’elles était mort et chacune revendiquait l’enfant vivant. Elles allèrent demander justice au roi réputé pour sa lucidité. Comme il ne pouvait voir clair dans cette affaire (ça ne vous rappelle rien), il demanda qu’on tranche l’enfant en deux et qu’on donne une moitié à chaque mère. La fausse mère accepta. La vraie, préféra donner l’enfant à l’autre femme pour préserver sa vie. C’est comme ça que le roi a su.

Ecoutez la force de conviction du général Alcazar quand il annonce que ce procès va liquider la vermine de la République et purger ses ministères. On dirait qu’il cherche à vider le cochon pour en faire du boudin. Ecoutez-le quand il dit que Brice Hortefeux au ministère de l’intérieur, c’est comme s’il y était lui-même. Je ne sais pas vous, mais moi, j’en ai des frissons. Cela dit, dans l’intérêt de la fille.

Dilgo

Dilgo

Articles liés