Pour la quatrième fois depuis le début de son mandat, François Hollande vient de se livrer lors d’une conférence de presse. Un grand oral désormais devenu un exercice de style.

La fin de son mandat sera longue

« J’ai connu la gauche en campagne, mais je ne l’ai pas encore vue au pouvoir ». Voilà mon ressenti à mi-mandat. Lors de la campagne en 2012, j’avais 17 ans, et dans mon quartier, je me souviens de l’espoir qu’avait suscité la nomination de François Hollande au pouvoir. Cet enthousiasme était même partagé par des gens peu politisés. La cohésion sociale, le changement, l’égalité, la justice… Voilà les mots qui revenaient fréquemment. Plus de deux ans après l’arrivée des socialistes au pouvoir, personne ne croit plus à ce fameux changement que l’on attendait tant. Il suffit de regarder le nombre de mairies qui sont passées à droite ou au centre dans le bastion rose et rouge que formait la Seine-Saint-Denis.

Lui candidat, je m’attendais à une lutte acharnée contre la finance et contre l’évasion fiscale. Lui président, lors de sa conférence de presse, a principalement parlé de la « compétitivité », des entreprises, des marchés financiers, de la dette publique… La population française, les plus modestes, semblent être relayés au second plan.

Lui candidat, je m’attendais à la promotion de la justice et de la cohésion au sein de la société. Lui président lance une politique de l’offre. La notion de justice sociale passe aux oubliettes, le Medef exulte. Paradoxalement, il semble même que sous la gauche, l’organisation patronale réussisse plus facilement à imposer ses vues : En janvier dernier, au sujet du pacte de responsabilité, Pierre Gattaz se félicitait d’avoir servi le pacte de responsabilité au pouvoir exécutif « sur un plateau ».

Lui candidat, avait mis en avant les quartiers populaires. Lui président a totalement délaissé les banlieues : la promesse concernant le droit de vote pour les étrangers ? Au cachot. La lutte contre le contrôle au faciès ? Disparue. Des mesures spéciales pour lutter contre le chômage dans des quartiers où le fléau touche près de 60% des habitants ? Où ça ?

Lui candidat, promettait de changer la France. Lui président, avait toutes les cartes en main pour le faire : le Sénat et l’Assemblée nationale était à gauche. Pourtant, François Hollande a décidé de poursuivre une politique proche de celle de son prédécesseur (baisse des cotisations des entreprises, réduction des dépenses publiques, emplois aidés, réforme territoriale, harmonisation fiscale avec l’Allemagne, accord national interprofessionnel…)

Lui candidat, avait misé sur l’inversion de la courbe du chômage et demandait à être jugé sur ce point. Lui président, cette ascension ne cesse de se poursuivre. Mieux encore, les personnes en situation d’inactivité professionnelle sont stigmatisées.

Cette longue conférence de presse a duré près de 2 heures et illustre parfaitement les limites de notre démocratie. Avec une côte d’impopularité record, ayant perdu toutes les élections depuis les municipales, le président de la République souhaite « garder le cap », en faisant fi des 60 promesses pour lesquelles les français l’avaient élu… Que la fin de son mandat sera longue… Pour nous comme pour lui.

Tom Lanneau

François Hollande veut être un homme du temps

En écoutant, entre autre, Roger Karoutchi réagir avant la conférence de presse du président de la République, j’imagine assez facilement à vrai dire, le off, le before de la conférence de presse. Un peu comme dans Quai d’Orsay, les conseillers en com crispés sur leurs stylos, un tas de feuilles numérotées à la hâte, des paragraphes entiers raturés. Et des cernes.

J’imagine Gaspard Gantzer, jeune prodige, proposer ses éléments de langage. « Bon, Monsieur le président, moi je pense qu’il faut des propos liminaires denses, efficaces, structurés. Il faut commencer par parler du Mali, quand même, on a marqué des points là-dessus ».

Et comme dans Quai d’Orsay, j’imagine le vieux de la vieille rappeler : « Euh, François, il faut pas non plus arriver la gueule enfarinée hein… Je te rappelle que Moody’s a l’intention de dégrader la note de la France… ».

La conférence de presse commence, dure et s’éternise un peu. Terrorisme, Ebola, solidarité, croissance, exception culturelle, orientation vers une défense européenne, dialogue social, réformes « utiles », emploi… Et tout ça, sur fond de traits d’humour tantôt tranchants, tantôt rassembleurs. François Hollande veut être un homme du temps, du temps politique et pas du temps médiatique. Qu’il passe ou non sous la barre des 10 % de popularité lui importe apparemment peu. En face de lui, au premier rang, Manuel Valls sourit, de temps en temps… Il a l’air serein. Je crois que j’imagine encore plus facilement pourquoi.

Anne-Cécile Demulsant

Pas d’annonces révolutionnaires mais un président à l’aise

Ça y est j’ai compris! Si François Hollande a décidé de tenir sa quatrième conférence de presse aujourd’hui, c’est tout simplement parce qu’il tient sans doute l’exercice dans lequel il est le plus a l’aise. Souriant, blagueur mais aussi offensif et droit dans ses bottes, le président de la République s’est attelé à défendre le bilan de son action et à redéfinir les grandes lignes de sa fonction. En effet, François Hollande a martelé ce soir à ses détracteurs qu’il tenait bon et que la démission n’était pas une alternative possible. Si les résultats ne sont pas là, il espère qu’ils viendront « avant 2017« . Nous aussi.

Je retiens deux autres choses de ces deux heures et demies de conférence de presse. Tout d’abord, la volonté du président de se placer en visionnaire. Il souhaite gouverner dans et pour l’avenir alors que les français attendent des changements concrets dans leur quotidien. En outre, François Hollande est revenu sur les nombreuses « affaires » sorties ces dernières semaines autour de sa majorité. En un mot, il m’a convaincu. En parlant de la liberté de la presse, le président a sans doute voulu tacler les majorités précédentes, dont les affaires ressortent plusieurs années après. Sa présidence aura été émaillée par diverses affaires mais elles auront eu le mérite de sortir. En résumé, pas d’annonces révolutionnaires mais un président à l’aise et qui a enfin redéfini sa vision de la gauche.

Jonathan Sollier

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