La foule est venue nombreuse écouter le discours du fondateur du mouvement « En Marche ! ». Un discours axé sur l’économie et le travail. Reportage.

Si la politique était de la musique, et les meetings des concerts, on dirait qu’Emmanuel Macron a pratiquement joué à guichet fermé. Ce samedi, au parc des expositions de Paris, une foule importante a fait le déplacement pour écouter le fondateur du mouvement « En Marche ! ». 15.000 personnes selon les organisateurs de l’événement. Un peu moins sans doute. Les chaises vides étaient rares mais il y en avait quand même. Dans le carré réservé à la presse, quelques journalistes qui ont couvert, la semaine dernière, le rassemblement de la Belle Alliance populaire, réunissant le PS, ses alliés et 3000 sympathisants tout au plus, assurent qu’en comparaison, il n’y avait pas photo.

Qui sont toutes ces personnes venues écouter Emmanuel Macron, ancien ministre de l’Economie et candidat à la présidentielle, discourir pendant une heure et demi ? Les jeunes forment une grande partie du public. Sarah, Parisienne de 24 ans, explique son engouement. « L’emploi pour notre catégorie d’âge c’est important. Le programme économique de Macron n’est pas aussi effrayant que ce que propose Fillon. Il a su s’inspirer des bonnes idées de la droite et de la gauche ». Simone, la quarantaine, venue de Toulouse pour l’événement, avance, elle, une autre explication. « Emmanuel Macron plaît beaucoup aux moins de 40 ans. Cette génération qui ne veut pas choisir entre l’extrême droite des Le Pen, la droite traditionnaliste de Fillon, et tous ceux qui les ont déçus à gauche« .

« Macron est jeune, dynamique et propose quelque chose de différent », affirme Henri, Parisien de 70 ans. « Quelque chose de différent », c’est ce qui plait aussi à Martine, de Toulouse, ancienne enseignante. « Macron propose deux enseignants par classe dans les établissements difficiles. C’est une super idée ».

« Je veux privilégier le contrat à la loi »

Parmi la foule, nombreux sont ceux qui agitent des pancartes censées être la profession de foi du mouvement « En Marche ! ». « Marchons, Marchons », « Bougeons les lignes », « Tous en marche » s’agitent frénétiquement quand Emmanuel Macron entre en scène. Comparé l’événement à un concert prend tout son sens, quand on voit la difficulté qu’a le candidat, et son équipe, à se frayer un passage dans la foule pour rejoindre le pupitre.

Quand les « Macron président ! » et autres applaudissements baissent d’intensité le fondateur d’ « En Marche ! » prend la parole en lançant à la salle : « Est-ce que vous avez peur ?« . »Non!!! », répond la foule. « Est-ce que vous êtes prêts à changer la France? », enchaine-t-il. « Oui !!!« , répondent à nouveau ses sympathisants avec ferveur.

Changer la France, pour Emmanuel Macron, c’est avant tout changer son économie. Pratiquement les trois quarts de son discours sont des annonces concernant le domaine. Sa « bataille économique et sociale » comme il l’appelle. Il promet des allégements de charges pour toutes les entreprises, peu importe la taille. Pourtant, les allégements de charges, cela fait plus de 20 ans que la France les met en oeuvre. Selon l’ex ministre, quand l’Etat se mêle d’économie cela doit être pour édicter des règles, les plus simples possibles, comme fixer le salaire minimum ou statuer sur les 35 heures. Pour le reste, « je veux privilégier le contrat à la loi ». Le slogan fait joli, mais cela aura des conséquences directes au sein des entreprises comme renvoyer les salariés au rapport de force avec leurs employeurs. Dans un contexte actuel, les travailleurs risquent d’en faire les frais.

« Nous devons faire plus pour ceux qui ont moins »

Autre grande mesure : la suppression des cotisations maladies et chômage des salariés qu’il avait déjà annoncée ces derniers jours. Le financement sera transféré à la CSG, la contribution sociale généralisée, un impôt prélevé sur les salaires, les retraites et les revenus du capital. Emmanuel Macron demande aux retraités aisés et à tous ceux qui tirent leurs revenus du capital de faire « ce petit effort pour leurs enfants, pour leurs petits-enfants, parce que nous avons besoin dans notre pays que le travail paye ». Il promet d’en exclure les petites retraites.

Nouveauté : « Tous les 5 ans, tous les salariés » pourront « avoir accès au chômage s’ils décident de démissionner ». Pour Emmanuel Macron, il s’agit là d’un « véritable droit à la mobilité professionnelle, qui reconnaît à tous les travailleurs du pays la possibilité d’être couverts contre les risques« . A l’inverse, il propose également plus de contrôles des demandeurs d’emplois. « Lorsqu’une offre d’emploi existe, qu’elle est décente et qu’elle correspond aux compétences de la personne, il faudra l’accepter. Avec notre système, le chômage n’est plus un droit, c »est une solidarité ».

Durant son meeting, le candidat du mouvement « En Marche ! » a fustigé le programmes d’un de ses concurrents, François Fillon, qui veut supprimer 500 000 postes dans la fonction publique. »Aimer l’Etat, aimer la fonction publique, ce n’est pas dire qu’il faut couper des têtes« . Emmanuel Macron s’est également exprimé en faveur d’une plus grande autonomie des établissements scolaires, sans en donner plus de précisions. Il s’est dit favorable à la création de 10 000 postes de policiers et au retur d’une police de proximité. Il a également eu un mot pour les quartiers populaires, concernant notamment »le devoir d’éducation qui ne peut pas être le même dans tous les quartiers de la République. Nous devons faire plus pour ceux qui ont moins ». Comment? Avec quel moyens? Où précisément? Pour l’instant, ces détails ne sont pas donnés.

Beaucoup des propositions annoncées par Emmanuel Macron ne sont pas nouvelles. Beaucoup aussi restent très générales, manquent de détails notamment sur les modalités de mise en oeuvre et sur les financements. En revanche, sans nulle doute, le discours d’Emmanuel Macron s’achève sur un candidat remonté à bloc et par une foule littéralement en délire.

Idir HOCINI

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