MUNICIPALES 2014. Le candidat du Front de Gauche se dit loin des clivages et des discours de posture, se pose en rassembleur et détaille pas à pas ses priorités pour Montreuil. Cela suffira-t-il à le placer à la tête d’une équipe au second tour ?

Né à Agen « entre les pruneaux et les rugbymen », comme il le dit, Patrice Bessac est arrivé en région parisienne à 19 ans, à Noisy-le-Sec, puis s’installe à Montreuil en 2010. Il précise même la rue : « Quand je suis arrivé à Montreuil, j’ai vécu rue de la Renardière, quartier de la Boissière, à la limite de Rosny-sous-Bois et de Noisy-le-Sec. Maintenant je vis dans le quartier Paul Signac, rue de l’Hermitage ». Même précision, quand à la fin de l’entretien, il doit décrire son endroit préféré. Il réfléchit vingt secondes et se mouille : « Le théâtre de la Girandole est un endroit merveilleux pour voir une pièce et manger la pasta autour d’un petit verre de rouge. J’aurais envie d’en citer d’autres : les parcs de Montreuil… »

Quel héritage politique ? « Comme le dit le film, je n’ai pas eu la chance d’avoir des parents communistes ». Il fait référence à son grand-père conseiller municipal divers droite d’un village de la région toulousaine, qui fait partie de « ces élus qui ont quasiment construit la salle municipale de leurs mains parce qu’il n’y avait pas assez de sous dans la commune, d’une période aussi où les problèmes se réglaient autour d’un verre de rouge sur une table de cuisine familiale, des gens qui aimaient beaucoup l’école publique qui trouvaient que le droit de chacun de s’instruire était un droit fondamental, donc des républicains. »

Il se targe aussi d’avoir connu Catherine Puig, ancienne élue montreuilloise, et d’avoir travaillé avec Marie-Georges Buffet, qui a été, comme il le dit, « l‘une des belles rencontres de ma vie. C’est une femme d’Etat. Et de fil en aiguille, je me retrouve élu au Conseil Régional d’Ile-de-France », où il siège pour un second mandat. À la question de savoir quelle est son activité professionnelle, il répond simplement : « Je suis conseiller régional d’Ile-de-France, j’ai quelques responsabilités au sein de mon parti et c’est là mon travail. » Cumulard, Monsieur Bessac ? « Non, répond la cheffe de la section du Parti communiste, Marie-Françoise Sanchez. Il s’est engagé à arrêter son mandat de conseiller régional, s’il est élu maire. » Mais la question reste posée s’il était adjoint ou conseiller municipal.

Il liste ses priorités, les actions censées le différencier des autres candidats. « Il y a un premier aspect, qui une question fondamentale de méthode. J’ai fait le choix, il y a un an et demi, de mener une campagne sereine, positive, sans agressivité contre les uns ou les autres. Je crois que la situation montreuilloise témoigne aussi d’un trop plein d’agressivité et de violences politiques. Je crois que c’est une situation anormale, et qui mène aujourd’hui à ce que, par exemple, des responsables associatifs, qui ont été aidés par la municipalité, aient peur, alors qu’ils font du bon travail, d’être saqués par la suivante. » Sur ce point, il propose « comme l’a fait Nicolas Sarkozy à l’échelle nationale, que la présidence de la commission des finances soit donné à quelqu’un de l’opposition. Ce qui marque la volonté d’être dans une transparence plus grande de nos institutions locales et donc d’un système plus ouvert. »

Et toujours sur la question de la méthode, Patrice Bessac se pose en rassembleur et veut la jouer collectif : « Moi je crois que l’un des grands défis pour la prochaine équipe est d’abord d’être une équipe, une équipe soudée, dans laquelle les adjoints principaux ont une autonomie et une responsabilité. » Selon lui, « pour réussir, les élus doivent accepter d’en perdre un peu (de pouvoir). Pour avoir le seul pouvoir qui compte qui est celui de faire et de trouver des solutions. Ça nous oblige à un rapport différent, à la fois entre nous mais aussi avec les acteurs sociaux. »

La seconde priorité : l’urbanisme, et par ricochet le défi de lutter contre la gentrification. Sa politique s’appuie sur le recours au logement social, un système de logements coopératifs et l’inscription de conditions spécifiques dans l’attribution des permis de construire. Il ne s’attarde pas sur le premier volet, mais prend le temps de définir ce qu’il appelle le Coop Logement : « On rénove, on construit, on met en accession à la propriété, on impose une condition et une seule à ceux qui achètent : s’ils doivent revendre, ils vendent à la coopérative au prix d’achat avec une plus-value raisonnable et non du marché. C’est une manière, en temps de pénurie pour les  finances publiques, de tout de suite remettre du pognon dans la caisse de la Ville et en même temps de créer un type de logement ni 100% public ni 100% privé qui échappe aux logiques du marché. » La Charte Promoteur est le pendant pragmatique de sa politique d’urbanisme : « A Saint-Ouen, ça marche : l’écart est significatif entre les deux villes. Cette charte imposerait aux promoteurs des prix moyens par quartier, des conditions écologiques et sociales. »

Quelle position au sujet du Grand Paris ? Un autre dossier jugé prioritaire auquel il compte préparer Montreuil et ses habitants, avec « un maire adjoint, qui avant même la mise en place du Grand Paris, consacrera 100% de son mandat à la préparation de cet enjeu ». Le Grand Paris, « c’est un fait législatif, c’est la loi de la République. Sur la forme, c’est la version la plus descendante, la plus autoritaire, la plus dure qui a été votée. J’aurais préféré plus de souplesse, plus d’esprit coopératif, moins de centralisation. Ce qui rend d’autant plus absurde les propositions de certains candidats qui disent de sortir de l’interco. Ce sont des paroles de campagnes électorales, des odeurs de bouche comme on dit dans certains pays, c’est-à-dire des choses qui n’ont pas de sens avec la réalité. »

Patrice Bessac se dit pour les débats d’idées. C’est pourquoi il a accepté celui proposé par l’équipe de Manon Laporte (candidate UMP-UDI-Modem) le 30 janvier dernier. « Chaque fois qu’on me proposera de débattre sur un sujet, je le ferai. Je répondrai à toute invitation de débat contradictoire de bonne qualité, qui ne soit pas un cirque sur soit des sujets précis, soit plus général, assure-t-il ». Pourtant, si des discussions sont en cours, elles ne sont pas de son initiative.

Évidemment, une campagne positive et non-agressive n’exclut pas quelques mots sur les autres candidats. Il résume la situation à Montreuil avec ces mots : « Il y a Jean-Pierre Brard, qui a été pendant 25 ans le candidat soutenu par les communistes. Il a décidé de faire une liste tout seul, de faire bande à part, de s’éloigner de ceux qui l’ont soutenu pendant 25 ans. Il y a eu des divisions dans le Parti socialiste qui conduisent à ce qu’il y ait trois candidats au total qui se réclament du PS : Ibrahim Dufriche, Mouna Viprey et Razzy Hammadi. » La division et les « égos hypertrophiés » d’un côté, sa liste, qui est « déjà une liste de rassemblement », de l’autre ?

Bouchra Zeroual

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