Après la tristesse, la déception puis la colère, c’est la peur et la confusion qui prennent place. Au lendemain des résultats du premier tour et même si la pilule est encore difficile à avaler, il faut réfléchir à quoi faire. Je me suis demandée si, au final, mon vote pouvait vraiment faire pencher la balance, pire encore si mon rôle de citoyenne avait, encore, une réelle valeur en France. Voter Emmanuel Macron pour faire barrage à l’extrême droite ou ne pas voter et laisser une potentielle voix gratuite au fascisme.

Inconcevable de laisser, par le vote blanc ou l’abstention,  une possibilité à l’extrême droite d’être au pouvoir.

Je ne voulais pas que ce dilemme se pose une nouvelle fois, 5 ans après. Il est cependant inconcevable de laisser, par le vote blanc ou l’abstention,  une possibilité à l’extrême droite d’être au pouvoir.

Peur d’être considérée comme française de seconde zone. Peur de l’État de non-droit dans lequel les résidents étrangers, les exilés, les musulmans et musulmanes visibles seront. Peur pour nos libertés d’expression, de culte, d’opinion, de conscience, ou de manifestation. Il va donc falloir aller voter pour le bourreau social de ce quinquennat et ce pour éviter à une Le Pen de diriger mon pays.

Malgré tout ce que veulent nous faire croire Gérald Darmanin et Emmanuel Macron depuis l’entre-deux tours, je n’oublierai pas que le Ministre de l’Intérieur avait qualifié Marine Le Pen de ‘trop molle’.

Cette élection se résume à un vote simple : voter pour le moins pire des pires, voter pour éviter la catastrophe. J’ai peur que le résultat de mon vote soit dévastateur. Mais je suis terrifiée que le Rassemblement National prenne le contrôle d’une laïcité déjà mise à mal. Une présidence qui mènerait vers tant de nouvelles discriminations avec une islamophobie accentuée lors de ce quinquennat. Malgré tout ce que veulent nous faire croire Gérald Darmanin et Emmanuel Macron depuis l’entre-deux tours. Et je n’oublierai pas que le Ministre de l’Intérieur avait qualifié Marine Le Pen de “trop molle” quand il s’agissait de laïcité.

Mon devoir citoyen a laissé place à l’urgence sourde contre la montée de l’extrême-droite provoquée par celui-là même qui était au pouvoir.

À 20 ans, ma première élection est aussi ma première expérience du « devoir de citoyenneté ». Je n’imaginais pas que ce vote soit aussi douloureux tant sur un plan humain que psychologique. Mon devoir citoyen a laissé place à l’urgence sourde contre la montée de l’extrême-droite provoquée par celui-là même qui était au pouvoir.

La préférence nationale prônée par Marine Le Pen, pour l’accès aux droits les plus élémentaires comme le logement, la protection sociale, ou l’emploi, m’empêche de laisser faire.

Le barrage à l’extrême droite repose principalement sur l’envie de protéger les miens, ceux qui me ressemblent, d’un sort qui pourrait leur être fatal. La préférence nationale prônée par Marine Le Pen, pour l’accès aux droits les plus élémentaires comme le logement, la protection sociale, ou l’emploi, m’empêche de laisser faire.

Ce qui est sûr c’est que les cinq prochaines années vont être douloureuses. Parce que je suis une jeune femme, maghrébine, musulmane, habitante d’un quartier populaire et issue d’une famille modeste.

Mon vote sera celui qui me permettra de moins souffrir et cette idée est déjà compliquée à imaginer.

Tout se profile à devenir de plus en plus compliqué au cours de ce prochain quinquennat, qui nous promet entre autres un RSA sous condition de travail, une retraite à 65 ans, alors qu’à 62 ans, 25% des Français les plus pauvres sont déjà morts.

On va continuer à protester, se mobiliser, regrouper tout ce qui est à notre portée pour se faire entendre. Ne pas faiblir c’est un peu l’idée. Mon vote sera celui qui me permettra de moins souffrir et cette idée est déjà compliquée à imaginer.

Kamelia Ouaissa

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