Ce mardi 4 septembre, à Epinay-sur-Seine (93), jour de rentrée scolaire pour les petits, c’est en regardant la télévision, ou en descendant de chez eux, que les habitants des quartiers La Source-Les Perles ont découvert ce à quoi ils s’attendaient le moins : Ali, l’épicier qui ouvre toujours un peu plus tôt en période d’école pour donner des bonbons aux enfants, a été sauvagement poignardé par un habitant du lieu. Ce dernier a avoué son crime. Il aurait tué pour se venger d’une « humiliation ». Ali lui aurait reproché son « alcoolisme ». Le soir même en bas des tours, là où se trouve l’épicerie, le rideau est baissé. Dessus, le prénom d’Ali est écrit en gros, à coté d’un grand coeur dessiné, puis, plus loin ces mots : « Ali on pense à toi ». Des centaines de personnes viennent rendre un dernier hommage à Ali Zebboudj et déposer des bouquets de fleurs sur le seuil de son commerce. Même le maire est venu prononcer un discours.

Chacun parle d’Ali et de ce qu’il faisait pour tous. Il n’était pas là pour s’enrichir, sinon jamais il ne serait venu s’installer dans une cité. Autrefois, l’épicerie était située ailleurs dans le quartier, elle a brûlée, mais Ali a insisté pour rester et en a rouvert une autre à quelques mètres. Lui ne vivait pas dans la cité mais tranquillement dans son pavillon, confie un proche. Il avait de quoi vivre sans son commerce, mais il aimait son métier et le quartier. Les enfants l’adoraient car il leur donnait des bonbons. Il en a vu grandir des générations, et il faisait attention à ne pas vendre d’alcool aux jeunes. Quand il y avait un problème, c’était l’épicier qu’il fallait aller voir, toujours serviable, toujours de bonne humeur, toujours souriant, il faisait crédit à tout le monde. Voilà ce que disent les gens de La Source-Les Perles après la mort d’Ali. Le quartier se demande comment et pourquoi ce drame est arrivé. Une dame déplore que les médias ait parlé d’un SDF alors que l’agresseur habite un bâtiment proche de l’épicerie, et que « la télévision ait filmé le corps d’Ali au sol sans respect », avant d’ajouter : « Pourquoi lui ? Je me demande si il y a vraiment quelqu’un là haut ? »

Chou Sin

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