Un ? Deux ? Non, des dizaines et des dizaines. Le rat est sexuellement mature à 5/6 semaines pour les femelles et à 7/8 pour les mâles. La gestation chez cet animal est de 21 à 23 jours et une portée peut compter jusqu’à 14 petits ! Ces rongeurs ont implanté leur QG dans la cité Paul-Vaillant-Couturier de Bobigny. Sous les poubelles du tri sélectif, ils couinent à toute heure de la journée. Ils sortent des bouches d’égout, se faufilent dans les beines à ordures par des ouvertures qu’ils ont eux-mêmes faites avec leurs dents acérées. Les zones vertes sont pleines de trous creusés par les rats gris. Le parc donne l’impression d’avoir été bombardé par une pluie de mini-obus.

Les résidents passant dans le secteur craignent qu’un rat de la taille d’un écureuil ne leur passe sur le pied. J’ai vécu la chose, c’est horrible ! J’ai crié et tout mon corps s’est crispé. Pourquoi passer par là, direz-vous ? C’est le chemin qui parcourt la cité, il mène au parking, à l’immeuble du fond, et bien entendu aux poubelles, bon nombre d’habitants condamnant leurs poubelles intérieures par peur que des cafards fassent irruption chez eux.

Plus le temps passe, plus les rats sont nombreux. En hiver, les jeunes en faisaient un jeu. Ils guettaient leurs sorties des poubelles et les lapidaient de pierres. Quand un rat cédait aux coups, il était écarté des poubelles avec un bout de bois et recouvert d’une montagne de neige. Une fois la neige fondue, le rongeur apparaissait, gelé. Ça faisait rire les ados. Un ancien chasseur, la soixantaine, a vu un rat en même temps que moi. Sur le moment, il s’est écrié : « Moi ! En tant qu’ancien chasseur attitré, je mettrais le feu à tous ces trous et tous les tunnels creusés par ces satanées bestioles tomberaient en ruines ! Il faut les exterminer! Au lance-flammes ! »

Une maman, dont la petite fille de 2 ans est atteinte d’un cancer, demande à changer de logement : « C’est dangereux, les rats, voire mortel ! Il suffit que ma fille soit mordue par un rat et elle en mourra ! A cause de la chimiothérapie, ses défenses immunitaires sont affaiblies. Aller et venir devient dangereux, surtout que ces poubelles se situent en face de ma sortie d’immeuble. »

Plus personne ne prête attention aux affiches faisant campagne pour la dératisation. Plus personne n’y croit. Les locataires du quartier se plaignent. Ils déposent des plaintes au commissariat, à la mairie (qui n’a pas souhaité pas se prononcer sur le sujet), prennent des photos et les envoient aux services d’hygiène. Ils font tout ce qu’ils peuvent et pensent avoir trouvé une coupable à la présence des rongeurs : la nouvelle gardienne. « Avec l’ancienne gardienne, nous n’avons jamais eu ce problème. » L’ancienne dératisait fréquemment, ce qui évitait la prolifération de ces petites bêtes qui font peur et dégoutent tant. Aujourd’hui, le retour de cette éradicatrice des rats est réclamé par les trois-quarts des locataires. Des courriers lui sont envoyés, elle est même appelée sur sa ligne personnelle…

Quand je lui demande pourquoi elle abandonné son poste, elle répond qu’elle souhaite le réoccuper. Surtout qu’elle réside dans le quartier envahi par les rongeurs. Elle s’occupe pour l’heure du gardiennage d’une cité de Drancy, où elle avait été transférée contre son gré. Mais elle compte reprendre très prochainement du service Paul-Vaillant-Couturier !

Inès El laboudy

Inès El laboudy

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