Lundi 4 septembre je me suis rendu au gymnase pour rencontrer des enfants et des parents le jour de la rentrée. A ma grande surprise la rentrée s’est plutôt bien passée, les enfants étaient tous bien habillés et coiffés. Seul bémol, un peu trop de journalistes présents, mais information oblige! Au fil des rencontres, je suis tombé sur Jean-Baptiste Eyraud président de l’association Droit au Logement. Il a suivi de près l’affaire des familles de Cachan, évacuées de force par la police après leur squat d’un immeuble. Pour mieux comprendre cette affaire, il explique au Bondy blog les raisons du blocage actuel et les moyens d’en sortir.


Quelle était la situation des familles de Cachan avant leur évacuation forcée ?


Jean-Baptiste Eyraud

. Ces familles squattaient un immeuble qui appartenait à un loueur de logements à des étudiants du CROUS, une structure semi-publique. L’immeuble était promis à la démolition et comptait 400 chambres. Depuis quatre ans, ces familles vivaient là dans des conditions assez précaires.
Des discussions ont été engagées pendant plusieurs mois avec la préfecture. Elles ont été bloquées sur deux points. D’une part, la régularisation des sans-papiers ou la mise en place d’un processus de régularisation pour une partie d’entre eux sans fermer la porte aux autres. D’autre part, le relogement de tout le monde. Cette situation est classique avec des gens pauvres qui travaillent mais gagnent peu, ont besoin d’un logement social et, parmi eux, des sans-papiers.


La Préfecture a refusé et a enterré la discussion par une position assez dure qui a abouti à l’expulsion qui, pour nous, est venu confirmer les propos du ministre de l’intérieur, tenus 48 h avant.

Dans quelles conditions les familles ont-elles été évacuées ?


J-B E.

Une cinquantaine de personnes ont été interpellées et placées dans des centres de rétention. La répression a été assez dure. La police a donné l’assaut, a chargé. Il y a eu des violences, des blessés. Des plaintes vont être déposées par les personnes qui ont été malmenées. Ce n’est pas normal. La police n’a pas le droit d’user de la violence si elle n’est pas nécessaire et là, en l’occurrence, elle n’était pas nécessaire. Il y a eu excès de violence.
Après les brutalités policières, il a eu une petite pause. Les autorités se sont rendues compte qu’elles avaient été un peu trop loin. A partir de là, le maire de Cachan a proposé d’accueillir les familles dans un gymnase.

Les familles ont refusé les propositions de placement en hôtels faites par la préfecture et la mairie. Pourquoi ?


J-B E.

Parce que les hôtels sont éloignés les uns des autres. Les familles sont à la merci d’une rafle, d’un contrôle. D’ailleurs, celles qui ont acceptées d’être hébergées en hôtels, sont l’objet de harcèlements policiers. D’autre part, la vie de famille en hôtel est très difficile. On ne peut pas faire à manger. Il faut avoir de quoi acheter de la nourriture pas trop chère, autour. C’est très exigu, surpeuplement, ce n’est pas adapté à la vie de famille.
De plus, il y a un problème de précarité, de coût. Le jour où les chambres ne sont plus payées, les familles se retrouvent à nouveau dehors.

Face à l’impasse actuelle, qu’envisagez-vous de faire ?


J-B E

. Le comité de soutien auquel nous participons et qui regroupe de nombreuses autres associations, va organiser des manifestations. Pour le reste, nous n’avons pas encore défini de marche à suivre. Ce que nous souhaitons, outre la régularisation et le relogement, c’est la scolarisation des enfants.
Cette affaire de Cachan n’est qu’un révélateur d’une crise beaucoup plus large du logement, qui profite aux marchands de sommeil. Ces personnes sont obligées d’aller vivre dans des squats car elles n’ont pas les moyens de vivre dans des logements de plus en plus chers.
Il faut que le gouvernement prenne des mesures efficaces en commençant par appliquer la loi de réquisition et arrêter d’expulser les familles par centaines. Il faut tout simplement que le droit au logement s’impose comme un droit fondamental. C’est ce que fait l’Ecosse depuis 2003, en mettant en place progressivement les conditions d’un droit au logement.

Flash spécial! Flash spécial!

Selon un sondage IFOP publié ce jour dans Le Figaro, 52% des Français approuveraient l’expulsion des occupants du gymnase, contre 46% des sondés qui sont contre.

60% des sondés ne sont pas pour un traitement de faveur des expulsés par rapport à tous les autres demandeurs de logements sociaux.

Par Sada Fofana

Sada Fofana

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