Mardi 30 octobre, aux environs de 13h40. Un tractopelle de la société de travaux publics Bourgeois heurte un tuyau principal de gaz. Selon Foued, qui se trouve à l’intérieur de la brasserie L’Etoile du Centre peu de temps avant l’explosion, l’odeur devient très rapidement irrespirable, les passants couvrent leur bouche et leur nez comme ils le peuvent. Foued raconte qu’un ouvrier rentre dans la brasserie et demande aux clients d’éteindre leurs cigarettes. Amel, une femme qui se trouve, elle, à une dizaine de mètres de la brasserie, dehors, dit voir une scène semblable, mais à l’extérieur de L’Etoile du Centre. Foued et Amel parlent peut-être de la même personne. Qu’est-ce qui provoque l’explosion ? L’enquête devra répondre à cette question mais certains éléments suscitent l’interrogation. Amel signale ainsi qu’au moins un ouvrier continue à travailler sur le chantier tandis que des clients de la brasserie, comme Foued, sortent au plus vite. Ceux-ci seront saufs.

13h51. Le service des pompiers reçoit les premiers appels. Mais il est déjà trop tard. L’explosion a lieu quelques minutes plus tard.

13h51 à 13h55. Toufik Sourhou, un ouvrier travaillant dans un bâtiment situé à proximité, est témoin du drame. Dans la vidéo qu’il a filmée et que j’ai pu regarder, on voit les pompiers qui arrivent. C’est le début de la lutte contre l’incendie. Au total 150 sapeurs-pompiers et 42 engins, dont six lances à incendie, participent à la lutte contre l’incendie et au secours des victimes dans le cadre du plan rouge.

Aux environs de 14 heures la décision est prise par le médecin en chef qui centralise les secours d’installer un poste avancé dans le Monoprix tout proche. C’est là que tous les blessés sont soignés et réconfortés. Des proches interrogés décrivent des gens en état de choc. La police commence à interroger les blessés en attente d’évacuation.

Aux environs de 15 heures, j’arrive sur les lieux en étant obligé de faire de grands détours. Des cordons de police sont déjà installés et empêchent les badauds d’avancer sur l’avenue Jules Guesde et l’avenue Polissard. En passant par la rue Arthur Rambuteau, je parviens à dépasser le premier cordon de sécurité qui se trouve au croisement de la RN3. Puis, en rentrant dans la cité De-Lattre-de-Tassigny par une rue située juste avant le second cordon, je parviens à le dépasser. Au bout de la cité, des immeubles sont en construction. Une palissade bloque l’accès. Mais un trou dans celle-ci permet de rentrer dans un immeuble. Je monte un étage : je vois un brasier énorme. Une flamme, comme un chalumeau lèche la façade gauche d’un immeuble en forme d’angle. C’est aussi dans cet immeuble non évacué que je rencontre Toufik Sourhou. Il y est depuis le matin. Il me raconte ce qu’il a vu. C’est de cet observatoire que je prendrai toutes les photos que j’ai envoyées sur le blog par la suite.

On ressent à ce moment une certaine inquiétude. Le feu est loin d’être sous contrôle. Pour preuve, Jean-Claude Gallet, colonel des pompiers et chef de l’opération, affirme : « Il y avait un risque important aujourd’hui, on a frôlé une plus forte explosion encore pendant une heure. On a dû aussi se glisser derrière la torchère (flamme soufflante de plusieurs mètres provenant de la conduite de gaz) pour tenter d’évacuer d’éventuels blessés. Cela a vraiment été une opération difficile. »

Entre 15h30 et 16 heures, le gaz est coupé; des gaz résiduels continuent à brûler. J’aperçois Michel-Alliot Marie, la ministre de l’Intérieur. Je descends de l’immeuble pour prendre des informations complémentaires sur le bilan et interroger la ministre. Elle indique qu’elle a appris la nouvelle alors qu’elle était en route vers à l’Assemblée nationale. J’entends un Hélicoptère. C’est le premier ministre, François Fillon, qui arrive. Il serre des mains aux pompiers et personnels de secours. Arrivé plus tard à Bondy, il en repartira plus tôt. Au total sa visite durera 30 minutes.

Aux environs de 16h30 le feu est circonscrit, d’après le porte-parole de la Brigade des sapeurs pompiers de Paris (BSSP). Les blessés graves ont été conduits dans les hôpitaux parisiens de Cochin et de Saint-Antoine et à l’hôpital militaire de Percy à Clamart (Hauts-de-Seine), spécialisé dans le traitement des grands brûlés, ajoute-t-il. Des victimes sont encore évacuées que déjà des journalistes présents s’interrogent sur les questions à poser plus tard en conférence de presse. Comment un tractopelle a pu atteindre et perforé le tuyau de gaz alors que des procédures sont mises en place pour empêcher ces accidents ? Cet incident est d’autant plus rageant que durant les vacances d’été, un autre accident avait pareillement touché une canalisation de gaz dans la rue Marguerite à Bondy. Sans faire de victimes.

La société de travaux publics Bourgeois, sollicitée, n’a pas voulu ou n’a pas eu le temps de répondre à ces questions et notamment à celles concernant les procédures dans le cas de fuites de gaz. Selon Gilbert Roger, le maire, cette société travaillait pour « le Conseil général de Seine-Saint-Denis mais en coordination avec les services de la mairie ». Quelle est dans ce cas l’administration responsable ? En attendant, selon le bilan officiel fourni par la mairie dans une note interne, il y a « 1 personne décédée, 47 personnes blessées dont 10 dans un état grave, 4 dont le pronostic vital est très réservé, dont 1 pour laquelle le pronostic est engagé ». Mais surtout, la même note affirme : « Le bilan reste provisoire (….) trois personnes se sont manifestées (…) faisant état de l’absence de trois de leurs proches qui devaient se rendre dans le secteur du bar restaurant ». L’enquête a commencé, le deuil aussi.

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