Ghislaine Dupont et Claude Verlon, deux journalistes chevronnés de RFI ont été tués samedi 2 novembre alors qu’ils préparaient une émission spéciale dans le nord du Mali. Retour sur une rencontre avec une grande journaliste.

La première fois que j’ai rencontré Ghislaine Dupont, c’était début avril, lors de mon premier jour de stage à la rédaction Afrique de RFI. Alors que j’avais les mains moites de stress et que la conférence de rédaction avait déjà débuté, elle a débarqué en trombe dans le bureau. Problème de RER expliqua-t-elle sac à main à bout de bras, petites lunettes sur le nez et une gouaille inoubliable. Alors qu’on parlait d’un sujet qui allait être traité dans la journée et qu’elle n’était pas encore assise la voilà déjà prenant part au débat. Ghislaine Dupont c’était ça. Une énergie débordante et une connaissance infinie de l’Afrique.

Deux mois dans le même open-space de Ghislaine Dupont, ça marque. Une présence intimidante, un humour tranchant et un rire inoubliable. Alors stagiaire, la connaissant à peine j’admirais déjà cette petite femme au tempérament bien trempé mais à l’humanité débordante. J’ai ainsi beaucoup appris à ses côtés. Même si toujours très absorbée par son travail, elle n’hésitait jamais à donner son avis et ses conseils sur un sujet, une interview… Plusieurs fois nous avons eu l’occasion de discuter de la RDC, pays dans lequel je me suis rendue récemment. Elle était une grande spécialiste de ce pays qu’elle a couvert pendant longtemps, si bien d’ailleurs qu’elle en était devenue persoa non grata. Souvent assise au bureau près d’elle, je l’ai maintes fois entendue négocier des interviews, parler avec les gens, d’une telle manière qu’il aurait été difficile de ne pas lui donner le bon Dieu sans confession.

« Gigi » comme ses confrères de RFI la surnommaient, était une grande bosseuse. Elle pouvait s’acharner des heures, des jours entiers pour obtenir l’information, le son qu’elle désirait. Je suis souvent partie tard et Ghislaine Dupont était toujours à son bureau noircissant des feuilles de papier devant son écran, sa petite lampe de bureau allumée.
De nouveau à RFI au mois de juillet dernier, c’est surtout depuis le Mali que j’ai pu observer son travail. Elle couvrait alors avec Claude Verlon l’élection présidentielle. Une journaliste de terrain hors-norme capable de ramener plusieurs reportages en terrain difficile dans la même journée. De retour de mission, éreintée, elle est encore restée quelques jours au bureau. Il y avait encore des choses à faire, des informations à donner à l’auditeur recueillies sur le terrain brûlant du Nord-Mali.

Être au plus près des gens, c’est comme ça qu’elle concevait le travail. Un métier qu’elle adorait. Et c’est en faisant sa profession qu’elle a été tuée. Dans ce pays le Mali, qu’elle aimait tant. Les raisons de son assassinat et de celui de Claude Verlon sont encore obscures néanmoins c’est sans doute à cause de son travail qu’on les a froidement abattus. La dernière fois que je lui ai parlée c’était en septembre. Elle m’a alors donné quelques conseils pour l’avenir. Je les suivrai au mieux…

Charlotte Cosset

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