JANVIER. Le messie est intronisé aux Etats-Unis. On a tout dit et tout écrit sur Barack Obama. Même Michelle O. y est allée de son anecdote personnelle et a révélé qu’il avait mauvaise haleine au réveil. Le pire, c’est que ça n’enlève rien à son sex-appeal. On a toutes en tête les images de Barack sortant de l’eau à Hawaï dans un très séduisant remake d’« Alerte à Malibu ». Tout obnubilée par son charme que je suis, j’ai oublié de vérifier, mais je suis sûre qu’il marche sur l’eau. Dominique de Villepin, adepte des baignades matinales improvisées, sous l’œil des caméras, a du souci à se faire…

Je vous assure, il peut tout faire, le nouveau président des Etats-Unis. Colmater le trou de la couche d’ozone avec son Hollywood chewing-gum, yes it can. Il peut guérir les paralytiques, arrêter les guerres et rendre la vue aux aveugles. Erreur, pour ce dernier point, il faut s’adresser aux jeunes UMP.

Encore une fois, les Américains nous ont battus. Pour l’intronisation, ils n’avaient rien de moins que Beyoncé, Bruce Springsteen, Aretha Franklin et Steevie Wonder sur scène. Ne rougissons pas néanmoins, pour l’élection de Nicolas Sarkozy nous aussi on avait l’aveugle le plus célèbre de la planète, Gilbert Montagné. Et je suis sûre que Steevie Wonder, il ne fait pas le poids à côté de lui, il ne conduit même pas un magnifique 4×4.

FEVRIER. Parfois des évènements vous ramènent à la dure réalité de la vie. En ce début de mois, je célèbre mes 25 ans. Je vous vois déjà lever les yeux au ciel et protester en disant que c’est encore jeune. Eh bien moi, je suis traumatisée d’atteindre le quart de siècle. Quand j’étais petite, à 25 ans, je pensais avoir un travail, il se trouve que je viens de commencer un stage en journalisme pour une émission de reportage. Je pensais être mariée, oui on est naïfs et optimistes quand on est jeune, je peux dorénavant prétendre au statut envié de Catherinette. Je pensais avoir mon propre appartement, il s’avère que je suis une Tanguette en puissance et vais bientôt pouvoir faire de la concurrence à mon très cher ami Idir, 28 ans et toujours chez papa-maman.

Et dire qu’à 25 ans, le président à vie Abdelaziz Bouteflika a été ministre de la Jeunesse et du Tourisme d’Algérie. Si on était perfide, on pourrait dire qu’il a failli à sa mission. A ce rythme-là, j’ai encore du pain sur la planche pour avoir une Rolex à 50 ans.

MARS. Je découvre la dure loi des stages au sein d’une grande chaîne de télévision. Entre la concurrence sournoise avec l’autre stagiaire et les amabilités distillées par l’une des membres de l’équipe, je dois échafauder des plans de survie dans cette jungle hostile. Je fais chou blanc, puisque les déjeuners en solo dans l’immense cantine d’entreprise se multiplient jusqu’à devenir la norme. Je vois bien que la cantinière a pitié de moi. Elle a toujours un mot gentil pour me faciliter ce moment où je suis sans amis.

Durant ce stage, j’ai appris à développer ma vie intérieure. Mon quotidien a tout de même été illuminé par la contemplation régulière d’un animateur phare de la chaîne. Une relation à sens unique nouée à l’ombre de la machine à café. Je n’ai pas toujours été invisible puisqu’un jour, un animateur entre dans le bureau et fait la bise à tout le monde, moi y compris. J’ai failli lui signaler que c’était trop d’égard, étant le bas de la chaîne alimentaire, ce n’était pas nécessaire d’être sympa avec moi. Je n’ai rien dit parce qu’en réalité, il me fait de la peine. Lui aussi il mange tout seul à la cantine.

AVRIL. Cette année, on aime bien les histoires merveilleuses. On peut sortir d’un bidonville de Bombay comme les acteurs de « Slumdog millionnaire » et taper la bise à Brad et Angelina aux Oscars. Dans le même registre, tout le monde s’extasie sur le fabuleux destin de Susan Boyle. L’Anglaise de 44 ans cumule les atouts. Célibataire, elle est au chômage, a des sourcils broussailleux, une légère ombre au-dessus de la lèvre supérieure, quelques rondeurs et un goût vestimentaire hasardeux. Alors qu’on ne mise pas un kopeck sur la Susan, la vidéo de sa prestation cartonne.

Après cette médiatisation légèrement soudaine, Susan Boyle a été victime du syndrome Britney Spears. Si la nouvelle star a su éviter le string rouge apparent et ne s’est pas rasé le crâne devant les paparazzis, elle n’a pas su esquiver la case hôpital psychiatrique. Ça me console de manger toute seule à la cantine.

MAI. Mois de mai égale jours fériés et Eurovision. C’est kitsch au possible, entre la musique techno slovène et le rap finlandais, les mélomanes sont vernis. Cette année, cerise sur le gâteau, la France a sorti sa carte maîtresse et ressuscite une chanteuse oubliée, Patricia Kaas. Inutile de préciser que la chanteuse a perdu. Pourtant, on nous avait assuré qu’elle était très populaire en Russie, ce qui nous assurait le vote des Russes. Elle n’aurait pas dû filer le cafard à tout le monde avec sa chanson à la naphtaline interprétée façon Piaf au rabais. Quitte à faire dans le sinistre, elle aurait dû innover et faire du death metal. Au moins, on aurait vraiment rigolé.

JUIN. Un soir de juin, je vogue d’une soirée mondaine à une virée dans un bar avec mes amies. La vie est belle, nous sommes ravies de passer ce moment ensemble. Je fais ma Bridget Jones et expose encore ma théorie selon laquelle toutes les tares de la gente masculine campent dans cette saleté de chromosome Y. Au gré de nos pérégrinations nocturnes, nous discutons avec des danseurs de break en faction sur la Place-Saint-Michel. Ils nous apprennent que Michael Jackson a été victime d’un arrêt cardiaque fatal. Michael, c’est comme Madonna, Nelson Mandela ou Mick Jagger, il fait partie des meubles.

On est tous allés dans une soirée où un convive fait une tentative plus ou moins pathétique de Moon Walk et on a tous rêvé d’illuminer les dalles du trottoir rien qu’en marchant dessus. Avec le recul, on se rend compte que le clip « Thriller » ne fait même pas peur. Qu’importe, on ne se lasse pas d’écouter Michael jurer ses grands dieux qu’il n’est pas le père du fils de Billie Jean. Une question me taraude. Mais qui va bien pouvoir prendre la relève et si bien porter les socquettes blanches et la veste à paillettes ?

JUILLET. Je m’exile à Lille et découvre les fameux Ch’tis mis à l’honneur dans le film de Dany Boon. Je découvre surtout que le temps capricieux qui est assimilé à la région n’est pas légendaire. Les camarades qui m’accompagnent et moi-même, avons mal géré l’étape valise. Avant notre départ, à Paris, il faisait très chaud. Naïvement, nous avons empaqueté nos affaires en se basant sur l’idée qu’en juillet le temps est chaud car nous sommes en été. Presque une lapalissade.

Nous avons emmené des robes, des jupes, des tee-shirts et des chaussures ouvertes. Des choix vestimentaires utiles à Miami Beach, mais pas très judicieux à Lille. Alors que je grelotte sous la pluie, je m’interroge grandement sur l’existence de ce pseudo réchauffement climatique. Le dernier jour, comme un clin d’œil à ce séjour frigorifique, nous sommes jusqu’à aller fêter notre départ dans un bar baptisé « La plage ». Le décor est conforme à l’intitulé du lieu, puisque du sable recouvre le sol. Une maigre consolation…

AOÛT. Le fameux chassé-croisé des juilletistes et aoûtiens a les honneurs des JT. Mais pour certains, les seuls déplacements géographiques se feront en métro. Comme tous les étudiants-stagiaires de France et de Navarre, qui n’ont pas la chance de s’appeler Jean S. ou Paris H., le passage obligé c’est le job d’été. Pour moi, direction la Tour Montparnasse où j’ai le plaisir de délivrer les billets pour la visite panoramique à des hordes de touristes, français ou étrangers.

J’ai la chance de devoir leur expliquer en différentes langues que les réductions ne sont pas cumulables. Non, on ne peut pas être étudiant, bénéficier du tarif handicapé et d’un coupon de réduction. Il faut également veiller à compter correctement tous les membres d’une famille. Elles essaient toutes de resquiller et de faire passer les enfants en douce, je dois me dévisser la tête pour faire mon recensement minute. Bien sûr, les gamins ne me facilitent pas la tâche et courent partout. Certains clients manifestent leur colère après ce racket organisé. D’autres sont d’humeur taquine. Et ne se rendent pas compte que la blague qu’ils trouvent originale m’a été faite douze fois depuis le début de la journée.

Joignant le geste à la parole certains quadragénaires ou plus, se baissent à hauteur de la caisse et réclament des places au tarif enfant ou étudiant d’une voix enfantine. Cette performance, digne de l’Actor studio, est couronnée par un éclat de rire du plaisantin. L’épouse l’imite mais se désolidarise souvent de son clown de mari.

J’ai eu droit également à quelques avances très subtiles. D’une voix sensuelle, certains jeunes hommes peu farouches ont osé un : « Bonjour Mademoiselle, pouvez-vous me vendre une place pour le 7e ciel ? » Professionnalisme oblige, le sourire est de rigueur.

SEPTEMBRE. Cette année, le monde du spectacle a payé un lourd tribut à la mort. Après Michael Jackson, Filip des 2be3 a passé l’arme à gauche. Un homme qui a chanté « Partir un jour sans retour » ne pouvait pas espérer plus longtemps faire un tel pied de nez au destin. La Faucheuse semble passée aux 3/8 et s’acharne. A cause de sa productivité stakhanoviste, le bilan des disparus est lourd : d’Alain Bashung à Farrah Fawcett. L’un de mes amis a beaucoup de difficultés à dépasser la douleur profonde suscitée par la mort de Sim.

Moi, ce qui me met dans tous mes états, c’est la disparition de Patrick Swayze. Comme l’a écrit un magazine people, il est parti danser avec les étoiles. Cette perspective pleine de promesses dans l’au-delà ne me console pas. Adieu le bellâtre aux cheveux longs qui avait émoustillé toute une génération de jeunes filles en fleur, et tout en bourgeons acnéiques, dans « Dirty Dancing », « Ghost » ou « Point Break ». J’ai fort heureusement dépassé ce stade de développement humain mais je voue tout de même un culte à « Dirty Dancing ». Une passion que je partage avec mon amie Emily. Nous connaissons par cœur les moindres répliques de ce film dont l’intrigue est si élaborée et si crédible.

Je me moque, je me moque, mais moi qui ai la grâce de Xavier Darcos lorsqu’il se dandine dans le dorénavant culte lip dub de l’UMP, je me suis surprise à croire qu’on est tous de potentiels très bons danseurs. Il ne me reste plus qu’à dénicher mon Johnny Castle.

OCTOBRE. Les dictateurs en 2009 ont toujours le vent en poupe. Le club très select des chefs d’Etat réélus à vie a été frappé de plein fouet par la défection de l’un de ses membres fondateur, Omar Bongo. Le filou est décédé lors de son mandat-éclair de 42 ans. Son œuvre va perdurer puisque le président Ben Ali a été reconduit à la tête de la Tunisie pour un cinquième mandat. Il rejoint Abdelaziz Bouteflika au rang des réélus de l’année. Des mandats obtenus à l’arrachée et à la surprise générale. Même si on peut remarquer que les scores, à peine 90%, ne sont plus ce qu’ils étaient. On était habitué à mieux. J’aurais bien aimé que Jean Sarkozy ne renonce pas in extremis à briguer la présidence de l’EPAD, ceci juste pour mesurer son potentiel dictatorial.

NOVEMBRE. Certaines personnalités, politiques ou autres sont comme la mauvaise herbe et résistent à toutes les attaques. Ségolène Royal est de cette trempe-là. Elle devrait bien s’entendre avec Raymond Domenech. Alors que la France dispute deux matchs cruciaux pour sa qualification au Mondial de foot face à l’Irlande, les critiques fusent. Une main providentielle guide le ballon au fond du filet du gardien de but irish, Raymond se félicite de cette qualification pas vraiment obtenue à la régulière. Peu importe les critiques, tel l’Etranger de Camus, il poursuit son œuvre sans relever la tête. Pour le récompenser de son travail honnête, la Fédé (comme on dit entre gens de foot) lui a versé la somme ridiculement basse de 862 000 euros. C’est un peu notre american dream à nous.

En France, on peut ne pas avoir de diplôme et prétendre présider un établissement public qui gère le plus grand quartier d’affaires d’Europe. On peut aussi ne pas ne pas avoir de tactique claire et être sélectionneur de l’équipe de France. A quand le Goncourt pour Marc Lévy ? Il faut juste demander à Eric Raoult ce qu’il en pense.

DECEMBRE. C’est Noël et le bonheur ostentatoire est de mise. Comme nous avons un gouvernement qui nous bichonne, la grande nouvelle est la revalorisation du SMIC de 0,05%. Soit une augmentation vertigineuse de 4 centimes d’euros. Attention au syndrome des nouveaux riches, une telle fortune peut faire tourner la tête.

Youhou, pour les fêtes on va pouvoir s’acheter des Rolex même si on n’a pas 50 ans, partir skier à Gstaad chez Polanski, ou mieux s’acheter des places de concert pour assister au grand retour de Dorothée. Quelle consolation pour les fans de Johnny Hallyday ! Ceux qui avaient acheté des billets pour sa tournée d’adieu – à force d’abuser des « adieux », voilà où ça mène –, vont pouvoir assister au triomphe de cette autre gloire nationale.

La chanteuse des enfants revient après des années de silence. On a regretté ses textes dont la profondeur a fait pâlir d’envie, de leur vivant ou presque, les Barbara, Brassens, Brel ou Gainsbourg. Je croise les doigts pour que les Musclés se reforment, sachant que René, l’accordéoniste à lunettes, est mort en août. On pourra toujours demander à Valéry Giscard d’Estaing de le remplacer s’il n’est pas trop occupé à entretenir une liaison avec une princesse.

Faïza Zerouala

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