Je ne voulais pas vous raconter cette histoire de salle de bain, parce qu’il y a des détails privés qui ne regardent personne. Mais c’est plus fort que moi et surtout je crois y déceler une petite métaphore.

C’est arrivé le samedi matin au lavabo, à l’heure des ablutions. Figurez-vous que la veille, j’avais entrepris de faire de la salle d’eau un lieu où l’on pourrait ressortir plus propre qu’on est entré. Avec Kamel, on est allé faire quelques achats: produits de nettoyage, une lunette pour les toilettes, un miroir de bain assorti avec un cadre en plastique vert pâle et surtout, un tapis de bain pour poser le pied à la sortie de la douche qui se trouve devant le lavabo. A cet endroit, le carrelage blanc était marron foncé fruit du mélange entre l’eau qui fatalement tombe du lavabo et un peu de tout ce qu’une semelle de chaussure peut trimbaler. Multipliez tout ça par le nombre de chaussures passées par là depuis des mois et vous obtenez l’épaisseur de la couche de crasse fossilisée.

J’ai donc passé une partie de la soirée à genou, à frotter le sol. Une fois sec, j’y ai déposé le tapis de bain. Petit bonheur de la vie.

Samedi matin, tout content, je suis entré en chaussette sur le sol de la salle de bain. Il faut dire qu’ici je dors en chaussette (d’une laine épaisse) car il fait très froid ces jours au local. Je sais c’est ridicule (de dormir en chaussette, pas d’avoir froid).

Je pose donc mon premier pied sur le tapis…trempé. Je ne le cache pas, j’étais quelque peu, disons, désappointé (un riche vocabulaire, auquel je m’intéresse ces temps ici, comprend toutes sortes de synonymes plus appropriés en la circonstance).

Je m’aperçois alors que c’est le goulot du robinet de la douche qui coule. Les gouttes qui tombent dans le bac éclaboussent de très fines particules à l’extérieur qui imbibent le tapis. Insensiblement, ces mini-gouttes s’accumulent, si bien qu’en une nuit, le tapis ne peut plus les contenir. Ca déborde. Il y a toujours la goutte de trop.

Je pense d’abord à la manière forte. Mais si je force l’écrou du tuyau (déjà sorti de son axe et bloqué par le calcaire), le débit s’accélère. Les gouttes passent du rythme d’une toutes les 15 secondes à une toutes les trois secondes. La situation est très sensible. Je n’ai pas dit mon dernier mot. J’envisage alors une contre-offensive musclée, non pas au Karcher mais par containment, au rideau de douche, tringle fixée à la perceuse, mèche très longue. Mais est-ce bien raisonnable?

Et puis, il y a tellement plus simple, plus efficace. Et je livre ici un petit truc à ceux qui ne le connaîtraient pas: attachez un fil à l’écrou qui fuit et laissez le pendre jusqu’au bac. Alors, ça se passe en douceur, la goutte glissera tout le long sans éclabousser. Et voilà la métaphore filée. Comme chante Souchon, c’est déjà ça.

 

Par Michel Beuret

Michel Beuret

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