SAMEDI. Dans nos chers locaux, nous accueillions près de 80 femmes pour les « Etats Généraux de la femme ». Les tables rondes ont été très prolifiques. J’ai adoré l’exercice. Quelqu’un qui me demande de parler et qui en plus a l’air intéressé sans se forcer c’est le bonheur intégral. En toute simplicité, avoir le sentiment de faire avancer la cause des femmes, c’est grisant.

Trêve de plaisanterie, l’une des choses que je retiens de la journée, c’est ce merveilleux intermède que l’on appelle déjeuner. Un Bondy blogueur masculin au coup de fourchette gargantuesque dont je tairai le nom pour préserver sa vie privée (indice, c’est le meilleur d’entre nous, son prénom commence par un « I » et se termine par « dir ») a eu vent de ce repas au frais de la princesse. Il a vaguement caressé l’idée de participer à la journée affublé d’une burqa, la testostérone étant persona non grata.

Et comme je n’aime pas crâner, je ne lui ai pas dit à cet ami qu’il y avait un gâteau au chocolat divin. Une part de gâteau comme ça et moi je perds tous mes moyens. Je signe toutes les reconnaissances de dettes possibles, reconnaissance de maternité ou certificat d’hébergement. En temps de guerre, j’aurais dénoncé toute ma famille à l’ennemi. Au menu, même si on sait que l’huile et l’eau ne se mélangent pas, il y avait une salade de fruit alibi minceur perdre-trois-kilos avant l’été. Les plus kamikazes se sont servies des bols entiers.

J’ai pris peur lorsque j’ai vu plein de femmes jouer à l’auto-persuasion « Hum comme c’est bon les fruits, je suis trop heureuse de vivre et de me sustenter d‘une merveilleuse salade de fruits ». Un numéro digne de l’Actor Studio. Pour moi, une hérésie gastronomique quand le plus merveilleux des gâteaux au chocolat me tends les bras. Et tant pis si je ressemble à Elvis en fin de vie cet été.

DIMANCHE. Comme je regrette d’avoir été un cancre au collège et au lycée et d’avoir boycotté les matières scientifiques. Ceci non pour devenir astronaute ou apprendre à fabriquer de la nitroglycérine mais plutôt avoir une chance de créer un moyen de se téléporter. Dans Harry Potter ça fonctionne, alors je ne vois pas pourquoi on ne pourrait pas avoir un système équivalent. Après tout, on a bien plagié « 1984 ».

Giscard, il aurait pu s’abstenir, il aurait mieux fait de batifoler avec Lady Di ou dessiner les plans de Vulcania s’il était en panne d’idée pourrie. Dans sa nécrologie, il sera celui qui a instauré le changement d’heure et celui qui est super doué en « Au revoir ». Elle est belle la postérité. Cette idiotie, ça aggrave ma perception conceptuelle de la ponctualité. Et si je me téléportais, je n’aurais pas besoin de prendre le métro. Sérieusement, il doit y avoir un passage secret entre l’hôpital Sainte-Anne et le métro, c’est pas possible autrement.

Je tombe sur les jeunes pseudo-racailles qui mettent leur musique à fond et chantent dessus. Mais pas en rythme bien sûr. S’ils avaient mué, ça aurait produit un meilleur effet. Parce que la racaille à la voix de premier communiant, ça fait doucement sourire. « Les choristes chantent NTM. » Cette ambiance musicale de la quatrième dimension a été perturbée par l’arrivée d’une punk à chien sans chien avec une voix de poissonnière à la Nadine Morano. Elle débite le laïus habituel « je suis à la rue depuis une semaine »…

Son histoire est triste car elle aussi a une perception déformée du temps. Cela fait des mois qu’elle raconte être à la rue depuis une semaine. La jeune mendiante a failli faire un esclandre lorsque les choristes ont rigolé pendant sa prestation. Les djeunes ont fait profil bas. Mais bien sûr lorsqu’elle a changé de wagon, ils ont joué aux caïds et ont insulté sa famille et sa descendance sur 56 générations. Les racailles made in Taiwan m’ont fait réaliser que je devrais arrêter le métro. Si seulement, comme Rachida Dati, j’avais une voiture de fonction, ma vie serait tellement plus simple. Pour autant, si j’étais elle, je ne m‘habituerais pas au confort, son joujou peut rapidement lui être confisqué.

LUNDI. La vie c’est une petite comique. Pour une fois que j’avais passé une bonne journée, il a fallu qu’un petit génie maléfique s’insinue dans ma tête. On est déjà assez nombreux là-dedans. « C‘est complet, c‘est une soirée privée », ai-je envie de dire. Certains dans mon entourage pensent que j’ai un petit bonhomme qui fait du vélo dans ma tête et qui déraille parfois ! Mais là, c’est pire, j’ai une grosse migraine et j’ai l’impression que les sept nains sont les passagers clandestins de mon crâne et se croient dans leur mine. Ils tapent sans vergogne contre les parois de ma tête. Peine perdue, y a pas de diamants ici les sept nains, partez ou j’appelle Eric Besson !

Que nenni, la migraine a horreur de la solitude. Le mal d’estomac rapplique pour lui tenir compagnie. On ne s’en rend pas compte, mais c’est fou le nombre de publicités qui mettent en scène de la nourriture à la télé que ce soit aux infos, dans les films, les reportages. Une incitation au suicide quand on a le cœur au bord des lèvres et qu’on veut en finir. Bon, je n’en suis pas encore là, même si je souffre d’un mal purement masculin. Sans faire de généralités, les hommes lorsqu’ils ont des maux de tête, ils ont l’impression d’avoir une tumeur au cerveau. Et demandent les derniers sacrements et formulent quelques dernières volontés. Eh bien moi, c’est pareil, et je crois toujours que je vais mourir.

MARDI. On ne l’attendait plus. Nicolas S. essaie de se faire inviter chez Barack O. depuis des mois. Comme lorsqu’on a quinze ans et qu’on rêve d’aller à la boum de la coqueluche du collège. Ou comme les jeunes Noirs et Arabes, entre deux trafics (sors de ce corps Eric Zemmour) qui rêvent d’entrer en boîte. Nicolas, à force de persévérance, il l’a eu son invitation VIP. Carla a le bon goût de ne pas souffrir d’angine blanche diplomatique. Cécilia S. devait être atteinte du même syndrome que moi et être trop fragile. A l’époque, en plus, il n’y avait pas la superbe couverture maladie américaine, ça doit être pour ça qu’elle a traîné longtemps cette angine.

Je suis sûre que Nicolas a même pris des cours d’anglais auprès du Nelson Monfort de l’UMP qu’on ne présente plus, Jean-Pierre Raffarin himself. « The yes to win against the no. » Sorry pour cette phrase en anglais, dorénavant tout anglicisme est prohibé de la langue française. Alain Joyandet, secrétaire d’Etat à la coopération et la francophonie, ne tolère qu’une seule exception, le mot « jet » dans le babillage courant.

Et ce qui fait donc le buzz, pardon le ramdam, aujourd’hui, c’est le dîner entre les deux présidents et leurs épouses. Bien entendu, ils sont « amis » et font tout pour le prouver. Comme deux époux qui ont contracté un mariage blanc quitte à en faire des tonnes. Soit dit en passant, ère Facebook oblige, le mot « ami » est quelque peu galvaudé puisque moi-même suis amie de Barack O. Les amis de mes amis sont mes amis, donc Nick Sarkozy – ben ouais il est américain maintenant – est mon ami. Encore un peu et il m’invitera à manger un hot-dog dans le restaurant conseillé par son friend Barack.

MERCREDI. Aujourd’hui je me suis rendue au Salon du livre. En tant que caution culture de la rédaction, en jachère en ce moment, je devais y aller. Je me suis dit que je trouverais bien un ou deux écrivains à harceler au gré des allées. Les écrivains sont mes rocks stars à moi. Ça partait mal car de toutes les manières, j’ai loupé Eric Fottorino. Je ne m’en remets pas. Je me sens comme un fan qui avait son billet pour le concert de Michael Jackson.

En parlant de mort, le Salon du Livre ça sent le sapin. D’ailleurs je réalise que la plupart des écrivains que je vénère sont morts. Franchement, l’ambiance était digne d’un thé dansant organisé au Macumba pour les séniors dans le Nord-Pas-de Calais. Certes, les salons du livre en général ne sont pas des lieux propices à la rigolade, mais quand même. Les rares gens qui traînaient là avaient l’air d’être morts à l’intérieur.

Le pire, c’est que j’ai juste déniché un livre que je cherchais depuis des lustres. La vendeuse était aimable comme une porte de prison. La communication étant réduite à « 17 euros » et « merci ». Pourtant, pour une libraire, elle aurait pu développer son vocabulaire vu la tonne de livres disponibles autour d’elle. Je suis sûre qu’elle ne devait maîtriser que les anglicismes et qu’elle a eu peur d’Alain Joyandet. Elle s’est donc abstenue de formuler la moindre phrase.

JEUDI. Tradition oblige, c’est le 1er avril et son cortège de blagues plus ou moins inspirées. Par exemple, j’ai entendu que le père du président, Paul Sarkozy, avait écrit ses mémoires et que les médias français allaient lui faire un pont d’or. On n’est pas en Corée du Nord, avec Kim Jong-Il et son père Kim-il Sung. Elle est bien bonne celle-là, les journalistes, malgré leur « petite cervelle » dixit Jean-Luc Mélenchon, ont de l‘imagination, y a pas à dire. Sinon, il y a une information qui je suis sûre, est véridique. Shakespeare aurait eu une mère française. Je vais même plus loin et je parie qu’il est un des ancêtres de Jean-Pierre Raffarin. Ce qui expliquerait son talent inouï dans la pratique de la langue anglaise. La génétique ne trompe jamais, comme on dit, bon sang ne saurait mentir.

Moi, aujourd’hui, personne n’a songé à me faire de blagues. A part quelqu’un qui a décommandé un rendez-vous au sommet. Ah non, ça ce n’était pas une blague… Certes, si quelqu’un s‘était amusé à usurper l‘identité d‘un journaliste que je porte aux nues, je l’aurais mal vécu. J’aurais fait une attaque cardiaque si j’avais reçu ce genre de coup de fil « Allô c’est Eric Fottorino, j’ai accompli mon œuvre, à toi Faïza de reprendre mon flambeau et d’écrire des sublimes romans et de diriger Le Monde à ma suite ».

Mais la plus belle blague du jour reste le retour de Walid, amoureux éconduit par la cruelle Allison qu’il aimait très forte (sic), dont notre talentueuse mondaine Widad nous avait conté la mésaventure. Il nous gratifie d’une sublime chanson dont il a le secret.

VENDREDI. 1er avril ça continue, Nicolas Hulot, l’homme couteau-suisse tout terrain d’« Ushuaïa », de retour de ses vacances médiatiques, déclare que le Grenelle de l’environnement n’est pas mort. La taxe carbone, si. Ce qui est marrant en France, c’est qu’il suffit qu’il y ait trois ou quatre péquenots autour d’une table et on appelle ça un Grenelle. Donc, Nicolas Sarkozy et Barack Obama ont fait le Grenelle de la gastronomie à la Maison-Blanche. Que Nicolas Hulot se rassure, le gouvernement œuvre bien en faveur de l’écologie. Brice Hortefeux en tête. A Tremblay-en-France, les habitants renouent avec les joies du chauffage naturel en brûlant un bus. Et Rachida a été privée de sa voiture très polluante.

Faïza Zerouala

Faïza Zerouala

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