La suite des aventures d’Idir qui passe son permis depuis… On a arrêté de compter.

Speedy-Permis, c’est le nom de mon auto-école. Pour l’instant… Le soir où j’ai raté le permis pour la deuxième fois de ma vie, je suis allé digérer la nouvelle en marchant un peu du côté de Carrefour. J’ai donné 6 euros 53 à une caissière sri-lankaise, et muni d’une bombe à peinture sortie d’un petit sac plastique bleu, j’ai fait ma Valérie Damidot avec la devanture de mon auto-lycée. Speedy-Permis mon cul ! J’ai rageusement repeinturé l’endroit Never-Permis.

Ça fait 119 heures que cette plate forme pétrolière pompe tout le liquide au fond de mes poches, et je ne sais même pas faire un demi-tour. Les chiens et les hérissons m’appellent Himmler. Les auto-tamponneuses respectent mieux les distances de sécurité, on dirait que je conduis un aimant. Aussi à l’aise derrière un volant que Pharaon au dîner du Crif. J’ai même fait un constat avec une grue, au tournant d’un chantier.

Pourtant, si j’en crois mes cours d’histoire à la fac, au bout de 119 heures de formation, je peux piloter un Messerschmitt et bombarder Londres. Et si j’avais été russe sous Staline, je pointe à l’école de pilotage à 8 heures, à midi j’affronte le Baron rouge avec deux branches attachées dans le dos, une boule de neige dans chaque main, ma boîte de flageolets entre les dents et une sarbacane plantée dans le cul pour tirer pendant les loopings. Je vous cause d’une époque, depuis, l’eau de la Volga a coulé sous les ponts. Avec les progrès technologiques, la pédagogie, l’ABS, l’an 2000 et tout le pataquès, de nos jours, avec 119 heures de conduite, le commun des mortels est assez entraîné pour prendre des virages sur les anneaux de Saturne. Moi, je peux même aller chercher du pain au coin de la rue sans risquer l’infanticide. A 31 ans, j’ai la capacité de locomotion d’une anémone de mer. Peut-être aussi sa capacité d’apprentissage.

Parce qu’un moment faut dire ce qui est : soit je suis trop con pour apprendre à faire un créneau  – ça ne m’étonnerait pas j’ai redoublé deux fois – soit j’ai appris à conduire dans un gros pigeonnier. Je ne suis pas la flèche du sagittaire niveau cogite mais je mettrais ma main au four qu’on m’a surtout pris pour un biset bien en plumes de la place Saint-Marc. Cette affaire sent la pastilla aux pigeons et c’est avec la peau de mes fesses qu’on l’a cuisinée.

Je prends pas des cours de conduite, je paye un loyer : sur le toit de l’auto-école, il y a un nid à ma taille. On m’a pigeonné tellement fort que maintenant, je chie des œufs ! A chaque heure de cours, le moniteur me balançait les clefs comme si c’était du pain sec. Je quittais le parking, il y avait du courrier attaché à ma cheville. Je joue plus à la Wii, c’est fini, j’ai peur. Je remue les bras trop fort, je m’envole pour un pays chaud. Je suis devenu un pigeon, un dodo, un touriste à Marrakech ! Ma peau, elle est toute rouge à force de me faire plumer.

Elle pèle, ça pique ! Ils m’ont ratiboisé, poncé, limé, décapé au rabot de 60, rasé jusqu’au muscle. Un dindonneau Loué, label rouge. Au prochain Thanksgiving je rencontre Obama, Il me gracie. A ce niveau de viol pécunier, ces gros malhonnêtes se disent désormais : « Il n’a plus de duvet, on attaque la cuisse ». J’ai mal. En un an, cette auto-école m’a tellement saigné, que si par miracle on me file un jour le permis, on me donnera un sandwich avec pour récupérer.

La vengeance d’un poivre et sel

Mais ce soir, tout ça c’est fini. Sur le courant alternatif, je mettrai plus une plume dans cette fabrique d’Édredon. Comme la France en 1940, j’abandonne ! Je n’aurai jamais mon permis. J’accepte mon destin. Mais les espoirs d’un kabyle ne meurent jamais seuls.

Deux minutes après avoir été baptisée Never-Permis grâce à mon coup de peinture, cette auto-école va devenir Carglass-Permis. Un mini rocher qui fout rien de ses journées à mes pieds va réaliser ses rêves de météore. Et quand  assez de courants d’air auront dansé entre ses quatre murs, on pourra appeler cette cage à pigeons PIPIdeBOUGNOLEsurlesMurs-Permis. La consommation intensive de Selecto, boisson nationale des Algériens et des trolls,  fait de ma vessie un laboratoire de chimie plus inflammable que le pet d’un phœnix dans un haut fourneau. Un petit pissou, une allumette et cette école de conduite va  finir sa vie comme un bouquin de Karl Marx édité en 1933 à Berlin (je sais, faut vraiment que je me sorte la Seconde guerre mondiale du cul).

L’opération « Pigeon largue sa diarrhée » est sur le point de débuter avec toute la bonne volonté du monde. Dans deux minutes, je sors un arc en ciel de ma bite. Une grosse pierre au bout de mon bras vengeur va franchir le mur du son et celui tout vitré de BRAQUAGE-Permis. Mon offrande à la gloire de Némésis, déesse de la vengeance et des divorcées marocaines est prête à être goulûment consommée quand une voix de baryton enroué arrêta tout le processus et mon cœur avec : « Haut les mains ! », lance-t-elle dans mon dos, brisant le silence des belles nuits du 9-3.

La police ? Non. Mieux. Plus efficace. Les bananes que je projetais de voler à l’épicier de la cité quand j’avais 5 ans ? Mission avortée après qu’il ait surgi d’un buisson. La bombe à l’acide chlorhydrique concoctée à l’attention du conseil de classe de la 1ere S1 ? Il a tiré un coup franc dans la bouteille en prenant de l’élan et en visant ma tête,  cinq secondes avant la fin du compte à rebours. Le fight club de petites sœurs maliennes à la récré, le lâché de furets saouls en salle des profs, la stagiaire d’anglais attachée à un poteau de foot pour venger Jeanne d’Arc, voler le feu d’artifice du 14 juillet à l’occasion d’un stage à la mairie pour faire de mon jardin un Disneyland Bondy…  A chaque fois que dans ma chacal de vie j’avais un plan qui rimait avec expulsion ou prison, papa et son ceinturon surgissaient du néant.

Cette homme a un radar à délinquant dans son cerveau réglé sur le mien, doublé d’un pouvoir de téléportation. J’avais une chance sur mille que son taxi croise ma route à minuit, un peu moins d’une sur un million que cet homme reconnaisse son sang sous ma capuche alors qu’il ne m’a jamais reconnu en venant me chercher à la sortie de l’école. Ce soir, j’ai gagné au loto.

Son souffle dans mon dos annonce la colère d’un dragon, la colère du daron. Son « haut les mains!  » de flic à Miami m’a pris de court mais avec père, pas le temps de se remettre de ses émotions. Avec père, le temps c’est des coups. J’ai donc tout de suite lâché ma pierre en réalisant un retourné-volte-face qui aurait fait honneur au Bolchoï. Zut ! Sa terrifiante silhouette est déjà à portée de gifles. Son ombre s’étend tout autour de moi, poussée par les feux de croisement d’un taxi garé en travers de la chaussée, portière conducteur grande ouverte. Je suis dans un épisode de Starsky, Papa et Hutch. Instinct de survie oblige, mon regard fonce tout de suite sur ces mains de cow-boy dégainées et prêtes à me tirer une mandale ou deux en pleine tête. Madame Lopez, prof  d’espagnol, qui lui remit mes bulletins de notes en quatrième, avait parfaitement saisi le personnage. Monsieur Sentenza qu’elle l’appelait, la sentence, le personnage de western que papa préfère.

Je souris comme un con quand je me rends enfin compte que je panique pour rien. De l’encre rouge a coulé depuis le premier trimestre de 4e D. Le vieux lion a fait son époque. Ses fulguro-poings calibrés pour mes joues, ne me font plus du tout peur. Depuis l’année du Bac, mon père ne me corrige plus. Aujourd’hui, je suis une affaire réglée. J’ai dépassé les 30 ans et les 1m87. Un homme ! Le vieillard devant moi a le double de mon âge et je le dépasse d’une bonne tête de cheval. Le temps où il pouvait porter la main sur moi est… »SBAHHH !!! », fit la paume bien calleuse de sa main droite en résonnant sur ma joue.

Le bon à rien, la brute et le ceinturon

J’avais l’impression d’être les cloches du Sacrée Cœur à la Libération quand la réplique main gauche de papa vint bousculer ma mâchoire à tribord. Ce maître corde marron de boxe kabyle est resté véloce, vif et graisseux comme une bonne goulée d’huile d’olive. Moi par contre : Titanic ! J’ai coulé. Jamais je me serais pris une gifle en vol aller-retour à la belle époque de mes 18 printemps. Pourtant, comme tous les Hocini sur cette terre, je connaissais la célèbre technique de la tenaille croisée de Tizi-Ouzou par crochet du droit, héritage de famille. Une précision et une intelligence du ring qui fait de Padré Mio le Robin des bois de la gifle. Il ne m’avait pas frappé depuis mes 19 ans, mais je suppose qu’il n’y a pas que le vélo qu’on n’oublie pas dans la vie.

« Tu vois fils, dit-il après avoir fait craquer ses doigts rougeoyants, généralement, les parents considèrent qu’une fois que leurs saletés de mioches ont eu leur bac, un boulot ou un logement à eux, ils sont pantoufles pénards pour la vie. La police ne les appellera plus jamais à 4 heures du matin, plus de vitres à changer où de voisin à dédommager. Pour la première fois depuis la maternité, maman rentre du marché de Bobigny le cœur en paix, sans peur de croiser sa progéniture devant le tribunal. A tous ces parents qui ont fait leur temps, les vigiles de Carrefour lancent des grands sourires de Zaïrois, beaux comme la vie. Ils ont passé le Cap Horn. Plus belle la retraite ! Eh ben c’est faux! Archi-faux ! Vous êtes des Aliens, des Gremlins ! Il ne faut jamais lâcher le poste. Être père, c’est déménager dans un mirador. Je suis l’ONU et t’es une centrale nucléaire iranienne. Le jour où je fermerai les yeux sur tes conneries tu seras orphelin, salopard ! A ce moment là, libre à toi de dormir  au frais du contribuable, taulard en sursis ! Il paraît que les Vandales sont passés en Algérie. En te regardant avec ta pierre et ta bombe à peinture à la main, je me dis qu’ils ont laissé un petit quelque chose dans le pays du côté de ta mère! »

Réflexe atavique, pendant toute la diatribe de père, j’ai pas moufté un mot. J’avais juste super mal aux joues et une grosse envie de me pisser dessus à cause du litron de Selecto que j’avais sifflé en prévision de la soirée. L’humiliation de m’être fait choper par papa et d’avoir bouffé deux grosses gifles dans la gueule, 15 après ma puberté ? Inexistante. L’amour n’existe pas à Bondy. L’amour propre non plus.

« De toute façon, je vois pas pourquoi je parle », repris papa en débouclant sa ceinture, totalement exaspéré par mon silence  » Ça sert à rien. T’es une bête. Un animaux ! Il y a que le fouet que tu comprends. Je veux même pas savoir pourquoi un mec de trente ans tague les murs d’une…c’est quoi ça ?! »
Surprenant. D’habitude, « father » ne pose pas de question. C’est une brute. La police municipale et le CPE ont toujours raison. Ils se plaignent, il cogne, je pleure. Simple. Répression c’est sa mission. Qui plus est, puisque la route est  visiblement à Grand-Père, un chauffeur de taxi ne s’intéresse jamais à l’endroit où il a garé son véhicule à la manière d’un mikado.

– C’est ton auto école ?!, demande-t-il.
– Oui, fis-je, presque  honteux.
– Et tu voulais  vandalo-berberiser cette enseigne. Pourquoi ? Parle sans crainte.

Il y a encore de la colère dans sa voix et le ton est toujours celui d’un général qui parle au chien d’une nouvelle recrue. Mais – et c’est une grande première dans mon dossier correctionnel – père, avant de me besogner à coups de poing, est curieux du pourquoi de ma connerie. J’ai envie de lui dire que mon différend avec mon Pigeonnier-école ne le regarde en rien, puisque jugeant mon cas désespéré, ce virtuose de la conduite, avec 40 ans de taxi au compteur, a refusé de me donner ne serait-ce qu’un petit conseil de père à fils pour m’apprendre l’art dans lequel il excelle. Mais je suis un pigeon, et de la pire espèce, celle qui va à la piscine le mercredi après-midi, un gros pigeon mouillé. J’ai tout avoué :
– Ils m’ont pris tous mes sous. 6000 euros, une vie entière ! Et j’ai toujours pas mon permis. Alors tes coups, si tu savais comment je m’en tape l’anus par terre.  Maintenant, tu seras gentil de vite finir ta séance de lancer de phalanges, j’ai une vendetta à mijoter.

Père reboucle sa ceinture, je me détends, ruse de rangers : il me remet une gifle surprise pour la forme et parce que j’ai dit anus en sa présence. Une fois mon axe facial remis en place, son regard plongea dans le mien. Il semble chercher une perle au fond de mon âme. Mon strabisme convergent aurait dû brouiller les pistes mais visiblement il a trouvé ce qu’il cherchait : « Le seum  finit-il  par marmonner, le seum, ce bon à rien périmé a enfin trouver son seum intérieur… »

Vini, Vidi, Vici

Qu’est ce qu’il me fait le daron là ?! Bien sûr que j’ai le seum ! Mon seum est au summum ! Je suis en colère, ça veut dire chez les jeunes. On ne reprend pas une carrière de délinquant juvénile à 30 ans comme ça, sans raison valable! Je fais pas ça pour chourave le dernier iPhone ou entendre le jolie bruit d’une baie vitrée qui explose !

Je ne comprends plus ce monsieur qui m’a élevé. Ses mots sont du chinois parlé par un petit Peul adopté par une maman chleuh, ça me consterne, tout comme ces gestes. Son discours achevé, voilà mon « Pater » qui fonce vers le coffre de sa voiture pour en sortir une bouteille de White Spirit. Il me la lance, ainsi que ces mots, « nettoie-moi ce tag de skined ».

Son ordre émis, il a disparu. Un battement de cil a suffi. Le célébre dépose-seconde du taxi parisien, subtil mélange de ninjutsu et de Formule 1, utilisé quand vous avez oublié votre portable sur la banquette arrière. Apparemment très confiant quant à l’exécution de ses directives, Père s’en est allé plus vite qu’un pet au pays du haricot. Vini, Vidi, Vici disait monsieur Bruel, mon prof d’histoire en troisième, quand il voyait papa débarquer à la remise des bulletins.  Il est venu, il a giflé,  il est parti.

Mais un daron algérien retourne toujours sur les lieux d’un crime filial. Pour lui, bêtise rime avec récidive. Le temps d’une marche arriéré, revoilà père qui me dit :

– Tu te dandines comme une ballerine le soir du bal. Tu t’es saoulé au Selecto toi !
– On peut rien te cacher.
– Super ou sans plomb ?
– Quoi ?
– Du light ou du normal ?
– Du normal…
– Pisse dans le réservoir ça m’économisera un plein.

Bien sûr, comme tous les natifs bondynois, je remixe mes péripéties. Même si Air Algérie utilise le Selecto comme kérosène, jamais papa ne m’a demandé de pisser dans sa voiture. Un sacrilège pour tout artisan-taxi qui se respecte. Je ne compte plus les fois où maman a essayé de détruire sa 405 SRDT diesel à grand coup de masse, son éternelle rivale dans le cœur de son époux. Cette caisse a un compte ouvert chez PSA Banque et tout un paragraphe du testament de Père lui est consacrée en haut de la page 1 (je suis en annexe 8 airial 2,5).

Le reste est vrai. Cette nuit encore, Père a empêché sa progéniture de nuire à la société. Lui, qui n’a pas foutu les pieds dans une école depuis le CM1 version colonial, a reçu en 1999 les Palmes académiques pour « sang versé au service de l’Education nationale ». Il a été fait chef Honoris causa de la police municipale de Bondy après avoir interrompu in extremis la coupe inter-quartiers de boules de pétanque aux prisonniers, organisée par mon grand frère au centre aéré quand ce dernier passait son BAFA. La ville d’Éphèse aurait toujours un temple à la gloire d’Artémis si Erostrate avait eu mon papa, (pour graver son nom dans l’histoire deux solutions : envahir la Russie ou brûler l’une des sept merveilles du monde).

Cette rencontre nocturne avec le Terminator paternel a bloqué mon cerveau. J’étais parti pour tout casser, ivre de colère parce que je pense que cette auto-école partage une part de responsabilité dans le fiasco qu’a été pour moi l’apprentissage du permis. Soudain, cet homme surgit, distribue une paire de mandale, puis s’en va très satisfait d’avoir lu la haine et le désespoir au fond de mon âme. A n’y rien comprendre.

Avant de faire ce que m’a demandé papa – je suis pas un pigeon mouillé à ce niveau, je suis un pigeon-poisson – j’ai desséché un arbre en lui pissant dessus. Le White Spirit à coté du pipi issu du Selecto, c’est de la tisane de myrtilles. Une fois mon bras bouffé par les crampes et la devanture de mon auto-école lavée du tag de ma colère, celle-ci brille tel l’éclatant sourire d’un ennemi à qui je viens de lécher le derrière. Elle me nargue cette peste, c’est tout du moins comme ça que je l’ai pris. C’est pour ça, avant de rejoindre mon pieu, je lui ai envoyé un gros glaoui tout jaune que j’ai cherché au fond de ma glotte avec plein de maladie du Moyen-Âge dedans…

Le roi pigeon

5 heures 05 du matin. C’est ce qu’affiche mon iPhone 4, 8 Gigas. J’ai dormi trois heures. Je crois que c’est ce bruit de klaxon ininterrompu qui m’a réveillé moi et tous les voisins de l’immeuble. Je connais cette voix : 405 SRDT année 2004 intérieur cuir, le cri de la mécanique qui m’a nourri. Je m’étais vraiment trompé sur les capacités de nuisance de papa, il s’est plus qu’amélioré. Avec le temps, il a muté, c’est devenu un virtuose de l’humiliation. L’âge l’a rendu vicieux. Les deux tartes de la soirée c’était pour attendre le buffet de ce matin. Je vais avoir droit à un brunch de gifles pour mes bêtises de la veille, ça va me mettre du bon pied pour la journée. Le travail bien fait méritant d’être vanté, Père réveille toute la rue à coup de klaxon pour remplir les gradins. Alors, soit : je sors, il me démonte devant tout le monde, puis je retourne me coucher.

Comme toujours, son taxi est garé mi-trottoir mi-rue avec la grâce d’un as de pique dans un château de cartes après un tsunami. J’ai à peine posé le pied sur mon paillasson que les réjouissance commencent : « Oueld  el haram  (fils du pêché) ! Tu dors en slip ! Mets un pantalon ! T’habites au rez-de-chaussée, pas dans un camp de nudistes. Allez dépêche-toi ! Aujourd’hui, tu vas reprendre ta place dans le cycle de la vie ! »

Ai-je bien entendu ? Certainement. Le caca c’est dans les yeux le matin, pas dans les oreilles. Je pleure, de joie, de stupeur, de peur, je ne sais pas. Maintenant c’est sûr : je vais avoir mon permis. Le Schumacher du Djurdjura, la perfection faite chauffeur, l’homme qui  au compteur  vaut 3 milliards, va me donner des cours de conduite !

Je pense qu’il a décidé de s’occuper de mon cas social la nuit dernière, après avoir vu que j’ai abandonné tout espoir. Ce que m’a dit Père quand j’ai pris place dans la voiture conforte mon hypothèse et donne raison à Dante :
« Je te préviens fils.  Ça va être l’enfer !  »

A suivre…

Idir Hocini

Lire le épisodes précédents :

Le permis B : le plus beau des combats ! 1/4

Le permis B : le plus beau des combats ! 2/4

 

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