Après le mariage blanc, le halal non conforme, le mariage mixte, l’union pas très halal, l’annulation de mariage, j’en passe et des meilleurs, voilà que certains décident d’innover avec le Pacs par intérêt. Non pas pour entrer plus facilement en France, mais plutôt pour en sortir, à très bas prix. Vous allez comprendre très vite. En effet, je ne vous apprends rien en vous disant qu’un grand nombre de jeunes travaillent dans des compagnies aériennes, les aéroports Roissy Charles de Gaulle ou Orly étant deux des plus grandes pépinières d’emplois pour les banlieues limitrophes.

Outre la facilité d’accès à ces emplois, un gros avantage attire foule : les fameuses GP (guest passenger) d’air France ou réduction tarifaire des billets d’avion. Tout employé d’Air France bénéficiaire de ces GP ne paye donc que 15% du prix du billet et peut faire bénéficier son conjoint des mêmes avantages. Jusque-là, rien d’anormal, sauf lorsque deux amis décident de se pacser non pas parce qu’ils sont amoureux l’un de l’autre, mais juste pour leur amour des grands espaces.

C’est le cas d’Ahmed et Mickael*, âgés de 25 et 26 ans, amis depuis de nombreuses années. L’un travaille à Air France et l’autre pas. Pour que tous deux puissent bénéficier des GP, ils ont décidé de se pacser. « Plein de collègues à moi l’ont déjà fait, ils se sont pacsé avec leur pote pour leur faire profiter des GP. J’en ai parlé à mon pote, il a voulu qu’on se pacse, alors j’ai dit oui », raconte Mickael. « J’y connaissais rien à ces trucs-là, un de mes pote déjà pacsé m’a donné l’adresse d’un site où on peut trouver des conventions toutes prêtes. J’en ai rempli une et je l’ai imprimée, on a réuni tous les papiers nécessaires, et on a pris rendez-vous au tribunal pour la signer », explique Ahmed. Qui ajoute : « C’est super simple, mais juste un truc : sur la convention, on devait choisir entre deux options pour la propriété des biens ; on a choisi le plus simple, chacun garde ses affaires et on se prend pas la tête avec ça. »

Pas de prise de tête… C’est vite dit ! Le PACS impose une solidarité à l’égard des dettes et une aide matérielle que nos tourtereaux des airs n’ont pas l’air d’avoir réalisé : « Non, mais on n’est pas un couple, on s’est pacsé, mais on n’est pas vraiment ensemble, chacun se débrouille avec ses dettes », rétorque Mickael en rigolant. Sauf qu’aux yeux de la loi, si l’un se trouve en situation d’endettement, l’autre aura l’obligation de l’aider financièrement. Nouvelle qui – au vu de leur tête – ne semble pas leur avoir beaucoup plu.

Les deux compères parlent de leur pacs, mais pas à tout le monde. Collègues et amis savent. Les familles, elles, sont laissées dans l’ignorance de cette union. Elles pourraient ne pas bien comprendre le sens de cette démarche… « Tous les potes de la cité le savent, la plupart d’entre eux sont pacsés, les autres ont envie de le faire, par contre j’en parle pas chez moi, ils vont rien comprendre, ils vont croire que je suis homosexuel, et là ça va pas trop le faire », avoue Ahmed.

C’est sûr, se pacser avec un homme, en cité, quand on s’appelle Ahmed, ça risque de ne pas plaire à tout le monde. Religieusement parlant, vis-à-vis de l’islam notamment, tout cela est un peu complexe : « La religion n’a rien à voir là-dedans, je me marierai un jour, inch’Allah ; là, c’est juste pour voyager en faisant des économies, c’est rien, on fait rien lui et moi. » Moi qui pensais que les hommes avaient peur de l’engagement, j’ai maintenant compris pourquoi ils évitent les sujets liés au mariage… Il ne nous reste plus qu’a faire comme eux. A bon entendeur…

Widad Kefti

*Prénoms modifiés

Widad Kefti

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