Du courage, de la ténacité, il en aura fallu aux porteurs du projet de Pôle culturel au Grand Pressigny. Quatre ans de préparation, le voilà enfin, présenté aux habitants de la commune. Le pôle culturel du Grand Pressigny sera géré par l’association Côté jardin et a déjà reçu l’aval des collectivités : l’Etat, la région, le département et la commune. 500 000 à 700 000 euros, très peu d’argent pour un projet très ambitieux.

Le Pôle culturel habitera dans l’actuelle gare désaffectée du village et s’appellera Gare du Sud. Centre de documentation, il fonctionnera en réseau avec le reste de la France et l’Europe. Résidence d’artiste, il pourra développer des partenariats avec d’autres lieux de création comme la Chartreuse de Villeneuve-lès-Avignon, la maison du comédien de Maria Casarès en Charente, et d’autres prestigieux lieux de culture. Une salle de spectacle pour une programmation de théâtre annuelle est annoncée par le metteur en scène José Manuel Cano Lopez, consulté à titre d’expert sur le projet.

S’il est expert, ce n’est pas seulement qu’il est l’ami du maire, comme on le dit, et qu’il anime chaque année un festival à la fois contesté et pour lequel on vient de loin, les Nocturnes de juillet. C’est aussi qu’il est chevronné: il dirige un projet autrement plus coûteux à Pézenas, avec l’Espace Molière qui ouvre ses portes cette semaine. Les porteurs du projet on fait remarquer que pour obtenir la subvention de la région, les locaux devront être bâtis aux normes HQE, Haute qualité environnementale. Le site sera pour les amateurs locaux une passerelle vers la culture urbaine et professionnelle.

Evidemment, des voix se sont levées, inquiètes, dubitatives ou franchement hostiles. D’abord, l’aménagement de la gare va-t-il être compatible avec le reste, notamment la CAT (Coopérative des agriculteur de Touraine), en fonctionnement à l’époque des moissons? Ce projet ne va-t-il pas entraîner la commune dans la ruine? Si les collectivités cessent de subventionner, que va devenir le lieu ? C’est certain, par les temps qui courent, faire de la culture est un défi. Cependant, comme a insisté José Manuel, si on doit céder à la peur de n’avoir plus de subventions à l’avenir, il vaut mieux renoncer à faire de la culture. Le maire a rappelé que la participation de la commune est dérisoire, 100 000 euros, pour un projet culturel de cette envergure, si l’on ne perd pas de vue les avantages économiques et culturels dont bénéficiera la population de la Communauté de communes grâce à cet équipement.

L’hostilité à l’égard du metteur en scène de la compagnie s’est également manifestée. Charlie, un habitant local, trouve que son théâtre est ennuyeux, peu divertissant (il veut dire théâtre d’intello) et Claude Véron, un opposant, a semblé ne pas vouloir poser la question franchement au nom de ceux qui n’aiment pas un travail jugé élitiste. Et qui sera le directeur artistique du pôle qui devrait ouvrir ses portes en 2010 ? José Manuel Cano Lopez (l’ami du maire) ? Car on le sait, et ce n’est pas mauvais signe, si son travail pour le festival du Grand Pressigny est apprécié de beaucoup, il est aussi vivement critiqué. Et ce n’est pas forcément un autre sujet. Et c’est pourquoi, ce vendredi 13, la présentation du projet Gare du Sud a donné lieu a un vif débat.

Un animateur culturel « qui travail avec les enfants » à Ligueil, un village voisin, a salué le projet pour rappeler la chance du Grand Pressigny de pouvoir se doter d’un bel équipement de ce genre. Les communes alentours seront-elles impliquées? Il le faudra nécessairement, comme l’a rappelé François Nicolas Joannès, le maire, mais pour l’instant la communauté de communes n’a pas voulu prendre de compétences dans l’aventure. Jacques Vezin, ancien maire du village parlant en tant que « patriarche », c’est voulu rassurant : « Le projet est exceptionnel et a été choisi par les collectivités entre de nombreuses propositions. Les impôts de la commune n’ont pas augmenté depuis des années et ça ne changera pas. »

On se prend alors à rêver, dans la concorde qui revient, de la réhabilitation de la voie de chemin de fer et d’un village de nouveau relié à Port-de-Pile. Le train de la culture décentralisée par ces temps de restriction budgétaire et de pétrole cher, c’est une voie verte…

Pierre Murcia

Dilgo

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