MUNICIPALES 2014. Le fauteuil le plus molletonné de l’hôtel de ville a fait l’objet de nombreuses convoitises ces derniers jours. Sa conquête dans toutes les villes de France a fait couler l’ancre, pour le meilleur et pour le pire. Billet d’humeur.

A la base, en mairie les élus sont censés avoir des rapports directs avec les citoyens grâce à leurs compétences : du serrage de pinces dans les kermesses, à la gestion des logements sociaux, en passant par la validation des plans d’aménagement du territoire. La vie municipale prend sans qu’on s’en rende compte une importance considérable dans notre quotidien, c’est pour cela que la campagne municipale est sur le papier, la plus proche et donc la plus intéressante à suivre. D’ailleurs nous connaissons tous le cousin d’un pote ou l’inverse qui est sur une liste, nous jetons tous un petit coup d’œil sur les visages postés dans les affiches qui jalonnent nos écoles. L’absence de renouvellement dans le paysage politique français, la pénurie de débats constructifs et le manque d’auto-critique de nos élus ont eu raison de cette élection qui dans certaines villes a ressemblé à une mauvaise rencontre du troisième type avec une classe politique déphasée s’approchant momentanément des électeurs lassés.

La multiplication des scandales politiques, la perte du triple A, la starification de Nabilla, les Unes de Libé, le chômage des jeunes, les Unes de Libé, les fermetures d’usines, les Unes de Libé. Beaucoup de choses ont amené ma libido civique au point mort. Cette période de recréation du nouveau militant était d’un ennui sans nom. Le « a voté » de la vielle dame qui a galéré pour épeler mon nom de famille, était peut-être le seul moment de grâce de cette période si floue politiquement. J’ai paradoxalement accompli mon devoir dans l’inconscience civique quand certains ont loupé leur rendez-vous avec les proxénètes tribuniciens. J’ai eu un frisson de peur en me sentant appartenir à une catégorie d’hypocrites passifs faisant semblant d’ignorer l’obsolescence programmée des promesses de campagnes. Les poujadistes m’ont dit de ne pas y aller, les complotistes m’ont demandé de dessiner un triangle sur mon bulletin et les quelques autres rescapés m’ont incité à aller voter pour le moins pire, chose que je fais depuis que j’ai l’âge de voter, bordel.

Il fallait aussi esquiver ces militants qui récitaient leurs discours formatés comme un Maxi Best Of. Il y en avait des sympathiques bien sûr, qui tractaient tôt, sans calcul avec cette déprimante joie de vivre devant le métro. Certes, ils tweetaient comme des footix en pleine soirée de Champions League, mais il ne faut pas leur en vouloir, aujourd’hui ils décuvent discrètement, encore ivres de cette nostalgie de campagne, cœur sur eux, même les pros Balkany.

Aussi surprenant qu’une cloche portée par une vache à Montbéliard, plus attendu que des méchants islamistes en couverture d’un hebdo, le score du FN n’a pas étonné grand monde. Certains ont crié qu’ils avaient mal à la France, qu’ils avaient honte, avec moins de retentissement qu’en 2002. Le FN aurait pu présenter des affiches avec des asperges, le plébiscite serait resté intact. Le troisième parti de France a simplement récupéré les quelques viennoiseries des indigestes incompétences de certains élus locaux. Une belle soupe à la grimace voir une chorba tiède sans citron pour le Front Républicain improvisé à la va vite par le chef du Gouvernement, une stratégie de plus qui a davantage servi à faire culpabiliser qu’à remobiliser les sympathisants de gauche.
Les tractations, fusions et retraits de campagnes dans l’entre-deux tours ont frôlé le tragique. Le débat NKM/Hidalgo était juste inaudible, un concours du « qui qui ment le plus » aussi affligeant qu’inutile. Les derniers Des paroles et des actes n’avaient rien à envier à un épisode de Docteur Quinn femme médecin. Pendant ce temps-là on, applaudissait les élus du premier dimanche par moins de 20% d’une population en âge de voter, bravo Morray.

Les institutions républicaines n’ont pas eu besoin de particules fines pour s’essouffler et infliger aux électeurs, les marronniers d’une campagne presque inintéressante. Et François Hollande dans tout ça ? Élu en 2012 après ce qui a plus ressemblé à un référendum pour ou contre Paul Bis… Depuis cette élection les rapports entre le chef de l’Etat et les Français n’étaient « humainement » pas clairs. Perdu entre normalité et dorures élyséennes qui accueillait il y a peu en grande pompe et sans broncher le mastodonte chinois, François Hollande se prépare aujourd’hui pour la grande redistribution des portefeuilles. A la grande crainte des ministres qui vont difficilement trouver le sommeil, mentons pointés vers le soleil.

Le Président de la République est un joueur de tennis qui n’a plus de service, il se prend une multitude de retours cinglants de l’opinion publique qui cherche les angles les plus extrêmes pour trouver une brèche dans ce marasme démocratique ambiant. Alors on espère, on participe, même si le jeu de la Ve République n’est plus intéressant à regarder.

Saïd Harbaoui

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