Si le vote catholique en France a passionné les sociologues et instituts de sondages dans le passé, aujourd’hui, avec le recul de la foi, un certain désintérêt pour cette tranche de la population se fait sentir. Le vote conservateur est-il en déclin ? Pour Sonia, une jeune catholique et bondynoise de 23 ans qui termine actuellement son DEA en langues étrangères et commerce international, la communauté croyante accorde beaucoup d’importances aux grandes questions de société actuelles. Interview.

Comment vis-tu ta chrétienté aujourd’hui ?

Nous sommes dans un pays de tradition judéo-chrétienne. Le catholicisme est la première religion de France. Si je vous disais que je vivais mal ma chrétienté, je ne serai pas crédible une seconde ! Je vais à l’Eglise tous les dimanches, je célèbre toutes les fêtes importantes du calendrier chrétien. Maintenant, il est vrai qu’avec l’évolution de notre société, les choses ont changé, principalement dans les grandes villes, c’est moins vrai dans le monde rural. En tout cas, aujourd’hui, croire en Dieu ne fait pas partie de la norme. L’athéisme est « à la mode ». Lorsque je dis que je suis catholique, on me regarde avec des grands yeux, comme si je venais d’un autre âge. Je suis désolée mais religion et modernité ne sont pas incompatibles.

Comment te positionnes-tu sur l’échelle gauche/droite ? Tes convictions religieuses influencent-elles tes choix politiques ?

Je ne suis pas particulièrement intéressée par la politique. Mais depuis ma majorité, je n’ai jamais manqué aucune élection, tant au niveau local que national. Je ne sais pas si c’est culturel, mais lorsque l’on vit en banlieue et que l’on n’est pas français de souche, on a plutôt tendance à rejeter la droite. Lors des précédentes élections présidentielles de 2002, je n’ai eu aucun mal à voter pour Jospin, j’étais même satisfaite et heureuse de voter pour ce candidat. Puis, j’ai été contrainte, comme beaucoup, à voter Chirac au second tour pour contrer Le Pen. Depuis, je ne dirai pas que je suis devenue de droite mais disons que je m’en suis rapprochée, peut-être par défaut.

Pourquoi ?

Depuis la prise en compte croissante de la question homosexuelle, les partis politiques ont davantage considéré les attentes de cette population, la gauche en prime, ce qui fait que j’ai petit à petit pris mes distances. Je ne suis pas prête et ne serait sans doute jamais prête à accepter le sacrifice du mariage. C’est une institution fondamentale, qu’on ne doit pas prendre à la légère. En plus, à l’heure actuelle, dire ce qu’on pense par rapport à cette question est devenu tabou. Etre contre le mariage et l’adoption par les couples homosexuels, c’est tout de suite être intégriste, rétrograde, vieux jeu. Je trouve ça complètement anormal et injuste. Les gens font ce qu’ils veulent de leur vie. Mais de là à bouleverser les fondements de notre société, de la communauté humaine, là j’ai le droit de donner mon avis. Quand on voit à quel point notre monde court vers la dérive, au nom des idées libertaires, il n’y a plus de place pour la morale. A ce rythme là, demain, au nom du principe de la liberté individuelle, la pédophilie sera admise.

Cela signifie-t-il qu’à différents niveaux de scrutin, ton vote se portera toujours à droite ?

Non. Les législatives approchent, les municipales juste derrière. Là dessus, quel que soit le candidat, je suis sûre de voter à gauche. Sur la politique économique et sociale au niveau local, la vision de la gauche correspond à mes attentes. Mais sur des questions qui ont trait à la morale, à l’éthique, j’ai un avis plus conservateur d’où mon positionnement plus à droite pour les élections présidentielles. Je me souviens que lors des dernières élections présidentielles aux Etats-Unis qui opposaient Georges W. Bush au démocrate John Kerry, je souhaitais voir la défaite du second, les Républicains étant plus conservateurs. Pourtant, Dieu sait que je n’ai aucune affection particulière pour le Président américain, mais je préfère réfléchir sur le long terme et toujours par rapport à mes convictions religieuses.

Ainsi, il peut paraître contradictoire de jongler entre parti de droite et parti de gauche sur différentes types d’élections. Il reste cependant que l’offre politique correspond de moins en moins aux attentes de la jeunesse française. De ce fait, beaucoup considèrent que les enjeux n’étant pas les mêmes pour une élection nationale que pour une élection locale, il est possible d’osciller entre les deux camps. Mais, en réalité, le clivage gauche/droite n’étant plus ce qu’il était, peut-être nous allons vers une nouvelle manière de considérer le jeu politique ?

Hanane Kaddour

Hanane Kaddour

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