Au cœur de l’hôpital de Saint-Germain-en-Laye, l’Institut est un lieu qui dégage une atmosphère de confiance. Un salon chaleureux enveloppé d’une lumière douce remplace la sempiternelle salle d’attente à fauteuils grinçants. En décembre 2012, Frédérique Martz et le Docteur Foldès ont fondé à l’Institut en Santé Génésique une consultation spécialisée dans la prise en charge des victimes de l’excision. Ce type de violence imposé aux femmes est un problème de société. « L’humanité est constituée d’hommes et de femmes, si nous ne réfléchissons pas ensembles sur des sujets de genre nous ne pouvons pas agir efficacement », explique la directrice pour illustrer sa collaboration avec le chirurgien.
Le Dr Foldès est une référence dans le domaine de la chirurgie réparatrice clitoridienne, il est intervenu dans la reconstruction de plus de 5000 femmes excisées. Chaque mois, il opère plus de cinquante patientes. Sa technique, le médecin l’a transmise à de nombreux confrères à travers le monde. Mais au delà du bistouri, l’accompagnement post opératoire de ces femmes traumatisées par leur histoire est le véritable enjeu de la reconstruction. C’est dans ce cadre que le rôle de Frédérique Martz, en tant que femme, est essentiel.
Des femmes qui souffrent en permanence
« Les femmes qui viennent ici sont extrêmement abîmées et peu écoutées… Ce sont des personnes qui souffrent en permanence lors de rapports sexuels. Elles accouchent plus difficilement que les autres », explique Frédérique Martz. L’excision est encore pratiquée de façon traditionnelle dans certaines régions du Monde : Afrique Subsaharienne, Asie du Sud Est et Moyen-Orient. Elle laisse des séquelles médicales et psychologiques réellement handicapantes pour ses victimes.
Avec son équipe de 21 bénévoles, elle anticipe les peurs, les douleurs et les angoisses des patientes. « Le chirurgien ne peut pas passer son temps à expliquer qu’il y a des phénomènes post opératoires alors je suis aussi présente dans la douleur, pour les prévenir qu’elles vont peut être avoir très mal… Comme à la suite de la réparation d’un nez ou de toute autre chirurgie (…) la peau peut tirailler un peu ». Cet échange basé sur l’humain et l’écoute est essentiel, « plus vous en parlez moins elles ressentent ces phénomènes. C’est bête, mais c’est efficace. Certaines viennent même me dire qu’elles n’ont pas eu si mal que ça ».
La confiance comme moteur de la reconstruction
L’équipe ajuste au cas par cas l’accompagnement des victimes. « Elles sont toutes uniques ». Une véritable confiance se crée. À tel point que certaines femmes appellent Frédérique Martz pour partager des moments clefs de leur vie de femme, « Une fois une patiente m’a appelé pour me dire qu’elle avait eu son premier orgasme ». Pour libérer le témoignage de ces femmes, l’Institut a formé des cercles de paroles. Certains sont ouverts aux patientes victimes de tous types de violences. Même dans un lieu où les souffrances personnelles se mêlent aux soins, l’humour a sa place. Le lien tissé entre les patientes et l’équipe qui les entoure est un rapport humain, fraternel avant toute chose. Les fondateurs de l’Institut se souviennent de situations amusantes et émouvantes. Comme cette femme à un groupe de parole qui témoigne de sa féminité retrouvée et sort de son sac de la lingerie qu’elle vient tout juste d’oser acheter.
Victoire Chevreul

Se reconstruire après l’excision
Articles liés
-
Pride des banlieues : « Ici, il y a plus de punch »
La 3e Pride des banlieues, forte de plus de 15 000 participant.e.s, a défilé dans les rues de Saint-Denis, samedi 3 juin. Une ambiance festive a régné et une revendication a été mise en avant : une PMA (réellement) pour tout.e.s. Retour sur cet événement.
-
Pantin : jusqu’à six mois de prison ferme requis contre des policiers en roue libre
Six policiers de la brigade territoriale de contact des Quatre-Chemins ont comparu de mercredi à vendredi devant le tribunal de Bobigny pour des faits de violences commis contre des jeunes de Pantin et des faux procès-verbaux entre 2019 et 2020. Article en partenariat avec Mediapart.
-
#10 « Un toit, c’est un droit » : après trois mois à la rue, d’anciens résidents du squat Unibéton investissent un bâtiment à Rosny-sous-Bois
Carnet de route documente la situation de campements, de bidonvilles et de squats en Île-de-France. Julie Déléant et NnoMan se sont rendus, samedi 3 juin, dans un nouveau squat ouvert à Rosny-sous-Bois. Le bâtiment abrite en grande partie des exilés expulsés du squat Unibéton à l'île-Saint-Denis en avril dernier.