Comme Malik Oussekine avant eux, comme Adama Traoré après eux, et comme beaucoup trop de jeunes hommes racisés, Zyed Benna (17 ans) et Bouna Traoré (15 ans) sont morts des suites d’un contrôle policier.

Les deux adolescents rentraient, à pied, d’un foot à Livry-Gargan, ville limitrophe à la leur, Clichy-sous-Bois. La peur de la police, l’oubli de leurs papiers d’identité, une course-poursuite, un transformateur EDF. La suite, vous la connaissez.

« S’ils rentrent sur le site EDF, je ne donne pas cher de leur peau » avait affirmé un des deux policiers, poursuivis pour non-assistance à personne en danger. Il sera finalement jugé et relaxé, dix ans plus tard. Après leur mort par électrocution, les quartiers de Seine-Saint-Denis, d’Ile-de-France puis de toute la France s’embrasent. Nous sommes fin octobre 2005. Pendant trois semaines, la colère des quartiers s’exprime.

Un traitement médiatique entre criminalisation et dépolitisation

Malgré la complexité de ce moment et la multitude d’histoires à raconter, la plupart des journalistes préfèrent dresser des bilans et faire des gros plans de voitures brûlées. En prime, la criminalisation des victimes et la dépolitisation de ces révoltes. Dans les articles et reportages de l’époque, rares sont les guillemets ouverts et les micros tendus. De quoi ajouter de l’huile sur un feu qui avait déjà pris.

Le Bondy Blog naît alors dans l’urgence de recueillir et redistribuer cette parole aux premiers concernés, l’urgence de rééquilibrer cette représentation médiatique chaotique. Le BB devient vite un média à part entière, un espace d’expression dans lequel on peut se former au journalisme.

27 juin 2023, Nanterre. Il y a quatre mois, jour pour jour, Nahel Merzouk, 17 ans, meurt à la suite d’un contrôle routier. « Tu vas te prendre une balle dans la tête » lance le policier qui l’interpelle. Cette phrase retentie dans la vidéo qui tourne immédiatement sur les réseaux sociaux.

La mort du jeune homme entraîne, à nouveau, des révoltes, de Nanterre à Clichy-sous-Bois, en passant par Strasbourg et Metz. Médiatiquement, certains journalistes sont parfois plus prévoyants et vigilants qu’en 2005. Pour autant, les images et les mots choisis restent, la plupart du temps, très problématiques. La qualité de certains « débats » télévisuels fait peur. Politiquement, aucune réponse n’est apportée dans l’immédiat. Aucun débat sur les violences policière n’est posé, aucune solution n’est évoquée.

Elisabeth Borne a finalement annoncé hier, jeudi 26 octobre 2023,  une liste de mesures en réponse aux révoltes de juin dernier.  Au programme : TIG et « stages de responsabilité parentale ». Des parents, encore pointés du doigt. Ce soir, on pense fort à ceux de Zyed et Bouna.

Sarah ICHOU

 

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