Arrivée à l’amphithéâtre à 14 heures 30, c’est avec grande surprise que je découvre une salle quasiment vide. Le hasard a fait que nous étions réunis dans une salle aux tables vertes, couleur principale du parti. Un drôle de concours de circonstance. Quelques militants s’activent pour les derniers préparatifs. Test-micro, test- son, tracts disposés sur la petite table, dernières affiches accrochées, sur lesquelles on peut lire « En 2012, utilisez un rectangle pour arrêter de tourner en rond », tout y est. Les voilà fins prêts à accueillir la candidate. L’espace a déjà un goût de révolution. Sur les murs gris souris, quelques slogans sont griffonnés : « Nous ne croyons pas au progrès comme sens de l’histoire » et même, « Les prisons sont faites pour que ceux qui sont dehors croient être libres ». On aperçoit aussi une vieille affiche faisant référence à Mai 68, déchirée : le ton est donné, les jeunes sont là et ne se tairont pas.

Jusqu’ici presque vide, l’amphithéâtre se remplit soudainement d’étudiants à 15 heures. Les personnes de 20 à 25 sont majoritaires. Avant l’arrivée d’Eva Joly, deux courts-métrages sont projetés. Le premier, filmé sur le ton de l’humour, réunit des personnes s’exprimant avec un accent sur un fond de la célèbre mélodie Douce France. Le deuxième, plus politique, reprend les maladresses du président sortant ainsi que de quelques membres de l’UMP, dont la  phrase maintenant connue, « toutes les civilisations ne se valent pas ».

Cinq minutes plus tard, Eva arrive enfin. Les étudiants se lèvent et l’acclament. A l’entrée, ça se bouscule. Les journalistes l’entourent et les retardataires tentent de se frayer un chemin, en vain. Et bien que les sondages indiquent que les intentions de vote s’élèvent à 3% pour elle, la candidate semble plaire. Avant l’échange avec les étudiants vient le discours d’ouverture dans lequel deux grands sujets préoccupants sont abordés : la précarité et la diversité. Eva Joly porte ses idées à bout de bras. Elle veut donner un nouveau souffle à cette jeunesse qui souffre du manque de moyens : « J’ai envie de donner une nouvelle vie au étudiants ». Selon elle, « il n’est pas normal que les jeunes soient en situation précaire ». Après quelques applaudissements, elle enchaîne sur la diversité : « J’ai envie que dans les administrations et partout, il y ait de la diversité » car « la diversité est beaucoup absente ».

A la suite de ce bref discours vient le moment d’échanger, de débattre, de discuter. La première question porte sur l’insécurité dans les cités. Pour Eva Joly, il faut légaliser le cannabis. Cela permettrait aux forces de l’ordre de se concentrer sur les vrais problèmes, ce à quoi un homme rétorque « Vive Marine Le Pen ! » La séance continue, sur le ton de l’humour. L’ambiance est détendue et lorsque quelqu’un réclame le micro au milieu de la foule, celui qui se charge d’animer la conférence  plaisante, « on arrive. On a fait la gauche, la droite, on fait le centre maintenant ». Un fou rire s’empare de la salle. A chaque réponse donnée par la candidate, la plupart des jeunes applaudit et se lève, le regard empli d’espoir. Ils s’y retrouvent, se sentent écoutés. Il reste toutefois des personnes peu convaincues. C’est le cas de Saïf, qui pense que « les idées d’Eva Joly sont utopiques ». Après avoir passé une heure et demie à la faculté, il est temps pour Eva Joly de quitter les lieux.

Cette intervention consacrée uniquement aux jeunes tombe à pic. En effet, le matin même, l’association AC le feu occupait des locaux pour protester contre le manque d’implication des candidats à l’élection présidentielle sur le cas des jeunes de banlieue.

Wassila Belkadi

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