Ali est un jeune électeur de 21 ans, étudiant en comptabilité. Il a reçu automatiquement sa carte électorale. Pour cette année, il doute encore et hésite entre les différentes candidatures dans sa ville, Aulnay-sous-Bois (93). Rencontre avec un jeune électeur.

D’après le site officiel de l’administration française « Chaque jeune Français qui devient majeur est inscrit d’office sur les listes électorales. La mairie informe par courrier le nouvel électeur de son inscription, sans que celui-ci n’effectue de démarche particulière. Si toutefois son inscription n’avait pas eu lieu, le jeune peut régulariser sa situation en s’adressant à sa mairie ou au tribunal d’instance ».

As-tu déjà voté ?

Ali : Oui j’ai déjà voté. La première fois que j’ai pu voter, c’était aux élections présidentielles de 2012. Au premier tour, j’avais voté François Bayrou. C’était un vote par défaut, j’ai pris le moins pire. Et au deuxième tour j’ai voté François Hollande contre Nicolas Sarkozy. Puis j’ai voté aux législatives.

Vas-tu participer aux municipales cette année ?

Au premier tour je vais d’abord regarder les listes indépendantes, ce qu’elles peuvent proposer. Je verrai celles qui sont le plus orientées vers la problématique des banlieues, des jeunes en banlieues qui sont dans ma ville à Aulnay-sous-Bois. Il y a un gros clivage entre Aulnay sud qui est la zone pavillonnaire où les gens sont aisés, et la partie nord, un peu plus problématique avec les cités.

Dans quelle partie de la ville habites-tu ?

J’ai la chance d’habiter dans la zone pavillonnaire, la partie où tout se passe bien. Mais il y a quand même la partie nord qui est pauvre où il y a de la délinquance. Quand il y a eu les émeutes en banlieue, il y a eu des émeutes là-bas, et il y a eu beaucoup de dégâts. Aujourd’hui je regarderai qui s’intéresse à ces problématiques-là, voir ce que les candidats vont proposer par rapport à cela. Si j’apporte mon soutien ça sera à ces personnes-là.

Connais-tu les candidats de ta ville, leur programme ?

Non, je n’ai pas encore pris le temps de regarder. Je connais le maire actuel, Gérard Segura du Parti socialiste. J’ai vu un petit peu ce que ça a donné depuis le début. La façon dont a été gérée la commune est une catastrophe, d’après ce que des personnes m’ont dit.

As-tu des affinités avec un parti politique ?

Je m’en fiche, gauche ou droite. Concrètement, ce qui m’intéresse, c’est ce que la personne propose en terme de politique sociale, comment il s’intéresse aux jeunes de banlieue… Sinon je ne voterai pas.

Comment comptes-tu t’y prendre pour faire le tri parmi les candidatures ?

Aulnay est une grande ville et il y a beaucoup de candidats. Parmi les listes indépendantes, ils ont tous de bonnes idées. Elles ont le défaut de ne pas fédérer forcément du monde autour d’eux. Des bonnes idées on en a tous. Je vais essayer, si j’ai l’occasion, de les rencontrer et de parler avec eux. Et de vraiment voir avec eux ce qu’ils ont à proposer. J’éviterai de m’appuyer seulement sur des affiches et lire ce qu’il y a de beau dedans.

A ton avis pourquoi beaucoup de jeunes s’abstiennent ou ne votent pas ?

L’abstention est due, je pense, à plusieurs raisons. Certains ont perdu espoir et n’ont vu aucun changement dans leur ville, leur quartiers, là où ils habitent. Aujourd’hui, clairement, les partis traditionnels qui tiennent les villes, les départements ou les régions, ont complètement déserté les quartiers populaires. Donc pour la jeunesse qui vient de ces quartiers-là, il y a ce sentiment d’abandon. A titre personnel, je le ressens. Ils ont l’impression qu’ils votent, qu’ils ne votent pas, ça ne change rien. Deuxièmement, certains vont penser que la politique ça ne sert à rien. Et peut-être que pour certains, notamment des jeunes avec qui j’ai eu l’occasion de discuter, il n’y a pas la conscience politique, de ce qui se passe dans leur ville.

Penses-tu que les hommes politiques peuvent changer ton quotidien ?

Très honnêtement, non. Parce que j’ai aujourd’hui le sentiment que la politique ce n’est plus vraiment de la politique dans l’action sur le terrain. C’est plus de la communication, des intérêts matériels. Aujourd’hui on veut le pouvoir, on veut le prestige mais il n’y a pas clairement une volonté d’agir au niveau de la population. Ils ne sont pas assez à l’écoute de la population, pas assez à l’écoute des besoins et des préoccupations.

Dans ta ville concrètement, comment souhaiterais-tu que les choses évoluent ?

Il y a une grande disparité entre les quartiers sud et nord, j’aimerais bien qu’il y ait plus d’égalité. Aujourd’hui quand on entend Aulnay-sous-Bois et quand je dis que j’y habite on va tout de suite penser aux quartiers chauds alors que j’habite dans la zone pavillonnaire.

Ressens-tu un décalage entre ce que les politiques proposent et ce qui est fait concrètement ?

A titre d’exemple, François Hollande avait promis le vote des étrangers aux municipales. C’était prévu pour 2014. C’était une des 60 propositions. Cela n’a pas été fait. On a clairement l’exemple le plus frappant. On tiendra les promesses qu’on peut tenir et les promesses qui ne sont pas forcément celles qui arrangent, on ne les tiendra pas. Ça a été le jeu malin d’essayer d’attirer les voix de partout. Le but du PS était d’attirer les voix de la banlieue. Ça a été chose faite mais la promesse n’a pas été tenue. On verra d’ici la fin du quinquennat mais il y a peu de chance que ce soit mis en place.

Un dernier mot à dire en direction des politiques ?

S’ils veulent vraiment candidater pour des élections, et bien qu’ils réfléchissent à ce qu’ils veulent. Et si vraiment ils le veulent, qu’ils se dévouent corps et âmes pour les habitants. Et qu’ils aient une vraie conscience politique. Et d’un côté on aimerait bien aussi les voir agir, pas seulement quand il y a des élections mais aussi à côté. Ça montrerait qu’ils sont vraiment au service des autres. Quand on se présente à des élections, on sait dire qu’on est au service d’autrui, pas au service d’intérêt politiques ou idéologiques.

Chahira Bakhtaoui

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