Khaddouma, mère de sept enfants, est divorcée depuis une dizaine d’années. Elle est âgée de 56 ans et est actuellement sans emploi. Ses enfants ont tous la nationalité française. Cete femme a eu une enfance difficile et n’a jamais pu étudier quand elle vivait au Maroc. En arrivant en France pour rejoindre son époux il y a 30 ans, elle ne savait ni lire, ni écrire. Pour elle, son rôle consistait à s’occuper de son foyer et de ses enfants. Depuis son divorce, les choses ont bien évolué et Khaddouma est désormais une citoyenne française à part entière.

Après son divorce, Khaddouma a dû tout apprendre, elle dont le mari s’occupait de tout. Prendre les transports en commun seule, la langue française. Une soif d’apprendre et de se débrouiller seule l’animait. Vivant depuis un certain nombre d’années en France, elle ne voyait pas la nécessité d’obtenir la nationalité française. Mais les discours sur les immigrés s’aggravant, Khaddouma s’est décidée un jour à franchir le pas.

Deux ans et demi passent avant qu’elle n’obtienne enfin sa naturalisation, en 2007. Un simple rendez-vous, de la paperasse… Six mois plus tard, elle était convoquée à la préfecture de Bobigny pour la remise du document officiel de naturalisation.

Khaddouma se souvient de ce moment, de cette grande salle, assise à côté d’une femme d’origine maghrébine, attendant patiemment que son tour arrive. Elle se souvient aussi de cet homme venu les voir en affirmant : « c’est bon mesdames, maintenant que vous êtes devenues françaises, vous pouvez enlever votre foulard. Allez dans la cabine là-bas, il y a un miroir devant lequel vous pourrez enlever votre foulard et vous faire belle ». La répartie de cette dame assise à ses côtés, elle s’en souvient encore : « Je n’enlève rien, je suis peut-être devenue française mais mon visage n’a pas changé, j’ai toujours une tête d’arabe. »

Khaddouma veut aussi rester elle-même, car pour elle, devenir française ne signifie pas changer d’apparence. Elle devient  aussi une citoyenne ayant le pouvoir de voter. C’est en décembre 2011 qu’elle décide de s’inscrire sur les listes électorales pour la première fois. Sans vraiment connaître les démarches administratives, elle se rend à la mairie sans aucun document. Puis revient bredouille. « J’ai demandé à ma fille de dire quels documents je devais fournir » se souvient Khaddouma, déterminée.

La paperasse administrative étant réglée, la voici officiellement inscrite sur la liste des électeurs. Autour d’elle, elle n’entend pas que du bien du Président actuel. C’est d’ailleurs sa première motivation : faire en sorte que Nicolas Sarkozy ne renouvelle pas son mandat.

Pour la prochaine présidentielle, son choix se fera en partie en fonction de ce que votera son entourage, en commençant par ses enfants, puis ses amies. Son intention s’est d’abord, dans un premier temps, sur le Parti socialiste. Mais avec l’épisode de la loi du 17 janvier 2012 sur les assistantes maternelles voilées -et clairement visées par le texte, son regard a changé. « Les socialistes sont désormais classés dans la case des racistes pour moi », affirme Khaddouma. Une case dans laquelle son vote n’ira pas, elle qui pensait que chaque parti avait son urne.

Chahira Bakhtaoui

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