Sous un ciel grisâtre, une fine averse s’est mise à tomber, accompagnée par un vent violent. Mais ce temps brumeux n’a pas découragé les Noiséens à se rendre, en ce dimanche matin du 8 mars, sur le marché situé en plein centre-ville. En cette période d’élections municipales, Emmanuel Constant, tête de liste de « A Noisy respirons », explique : « Il y a des enjeux qui sont spécifiques à Noisy-le-Grand qui touchent à des choix en matière d’urbanisme et de développement. Et puis il y a des enjeux qui ne sont pas spécifiques à Noisy-le-Grand mais qui sont plus globaux, comme par exemple les questions de dérèglement climatique. »

Il fait ensuite brièvement référence à son programme politique : « À Noisy, dans le projet qu’on propose aux Noiséens, il y a l’articulation entre ces deux grandes thématiques, locales et nationales, voire mondiales. On doit prendre notre part concernant le dérèglement climatique. On doit évidemment réussir à maîtriser le développement et l’urbanisme. » Dans cette optique, le conseiller municipal de 51 ans a réuni une liste de gauche constituée par Europe Ecologie-Les Verts, Génération.s, le Parti socialiste et le Parti radical de gauche. Ses principaux adversaires déclarés, tous présents sur le marché, se nomment Vincent Monnier tête de liste d’un projet citoyen, la maire sortante LR Brigitte Marsigny et Michel Pajon pour une liste divers gauche.  

Une élection dans un climat tendu

Ce dernier, socialiste, a dirigé Noisy-le-Grand pendant vingt-ans. Dans cette ville du sud de la Seine-Saint-Denis, la campagne municipale a lieu dans un contexte de très fortes tensions politiques entres les candidats, et même entre personnes issues du même camp. En 2014, la dernière élection avait été annulée en raison d’irrégularités par le Conseil d’Etat. La ville était finalement passée à droite avec l’élection de Brigitte Marsigny, pour à peine 33 voix d’écart avec Michel Pajon. 

Afin de marquer sa différence, Emmanuel Constant affirme d’ailleurs au sujet de la droite : « Ils sont à la tête de listes qui sont issues de divisions. En 2015, il y avait une liste avec Mme Marsigny, aujourd’hui, il y en a 3. Ca fait donc 3 listes de droite. De notre côté, nous sommes une liste de rassemblement de gauche qui représente la ville, une liste écologiste. » Avant de poursuivre : « Ensuite, on a des aventures individuelles, celle de Michel Pajon qui souhaite reprendre la main. » Lorsque nous évoquons, un possible rapprochement avec l’ancien maire, le conseiller municipal balaie l’hypothèse d’un revers de main. Mais il déplore cependant cette division : « Sa liste a pour fonction de faire gagner celle de Brigitte Marsigny, malheureusement. »

Les militants de la liste d’Emmanuel Constant sont enthousiastes et confiants. Alors que le vent continue à souffler, ils tractent inlassablement à travers le marché pour imposer les idées de leur candidat. Même motivation pour les militants des autres prétendants à la mairie. Pour marquer cette journée internationale du droit des femmes, les militantes de Brigitte Marsigny tiennent des fleurs à la main, habillées en bleu et blanc. 

Hervé Carré, secrétaire de la section PS de Noisy, nous explique son attachement à la préservation de l’environnement : « Il faut protéger la nature, reverdir la ville parce qu’effectivement c’est trop minéral. On l’a vu lors de la canicule de l’été dernier. Il y a des quartiers où c’est irrespirable, et c’est lié justement au fait qu’il n’y a pas du tout de verdure. » Et précise : « On propose donc de reverdir. On s’engage à créer dix lieux de rafraîchissement dans la ville, des espaces verts qui permettent de baisser la température. »

Sur le marché, la campagne municipale bat son plein. La foule traverse les étals, dans un vacarme incessant. En cette journée internationale du droit des femmes, quelques-unes apparaissent,  improvisent une danse et chantent : « Même si Macron ne veut pas, on est là ! C’est la faute à Macron ! » Intriguées et curieuses, certaines personnes s’arrêtent pour observer ce spectacle incongru. C’est à ce moment-là que nous croisons Mme Bessière. Très intéressée par l’écologie, elle déclare : « Une réflexion doit être menée sur le dérèglement climatique, changer beaucoup de choses du système économique, analyse-t-elle. Une des priorités à Noisy-le -Grand, c’est de verdir la ville. Si on ramène plus de gens vers la terre, ils seront plus sensibilisés à l’écologie. »

L’action de la maire sortante critiquée

Elle tient aussi à s’exprimer sur le travail de la maire sortante : « Elle n’a rien changé par rapport à la culture. Elle avait promis de limiter les constructions, mais ce n’est pas le cas. Sous prétexte que les villes sont obligées de construire, cela s’est accéléré. Il y a des opérations immobilières à faire, surtout avec le Grand Paris » soupçonne-t-elle.

Jean-Michel est boucher et un habitué du marché. Accoudé sur un mur, il est d’abord réticent à nous parler, mais se laisse finalement convaincre. Il porte lui aussi un regard critique sur le bilan de Brigitte Marsigny : « Elle a essayé de faire un marché couvert qui n’a pas été réussi. Il y a pas mal de monde mécontent à cause des impôts élevés. Les gens ne connaissent pas trop son programme. » Il tempère toutefois son propos : « Elle a descendu les loyers des boutiques pour que les commerçants puissent rester. »

Monsieur Puil, très engagé politiquement et votant historiquement pour le PCF, nous livre son ressenti sur la maire en place: « Elle s’est faite élire sur des promesses, notamment au niveau du bétonnage, qu’elle n’a absolument pas tenues puisque ça a continué de plus belle, fait-il remarquer. Et de toute façon, c’est une promesse que personne ne peut tenir. » 

En dépit de ces nombreux griefs, le mandat de la tête de liste LR ne s’avère pas aussi négatif que cela. C’est ce qu’assure Thibaud Barranco, un de ses co-listiers : «  Il y a de belles actions qui ont été faites, notamment au niveau du PLU. Parce qu’il a été modifié pour protéger les zones pavillonnaires, comme par exemple les Yvris. Tout ce quartier pavillonnaire ça devait être des immeubles. » Il poursuit et salue l’action du maire sur le plan de l’urbanisme : « Protéger les pavillons est une très bonne chose. Limiter les constructions également, car on devait en avoir d’énormes sur certains quartiers. Malheureusement vu que le permis était déjà accepté, on a pu limiter sur les hauteurs, sur le nombre de logements, ce qui a permis de faire quelque chose à taille humaine. »

A l’instar des autres prétendants à la mairie, la maire LR se dit aussi engagée en matière d’écologie : « Le fait de pouvoir enfin, avec le concours de la région, avoir le bois Saint Martin c’est quelque chose d’énorme. D’avoir un gigantesque poumon vert dans une commune comme Noisy-le-Grand, c’est génial !, s’enthousiasme-t-il. Au niveau associatif, il y a une ferme pédagogique. Ramener une ferme dans une ville comme Noisy, ce n’est pas courant ! »

A Noisy, l’écologie et l’urbanisme s’avèrent des thématiques essentielles au bien-être de la population. Les candidats devront donc s’emparer au mieux de ses sujets. Et dépasser les anciennes querelles.

Hervé HINOPAY

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