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Une banlieue dans un écrin de verdure, c’est en ces termes que le maire PCF d’Allonnes (Sarthe), Gilles Leproust, décrit sa commune. Le président de l’association Villes et Banlieues a accueilli sur ces terres l’assemblée générale de l’association le mercredi 18 septembre. En cette rentrée politiquement mouvementée, les dossiers abordés gardent, eux, une atterrante stabilité : pénurie de logements sociaux, manque d’accès aux soins, éducation en souffrance, finances fragiles pour les communes populaires…

« Nous sommes dans un moment particulier, nous n’avons pas de ministre ou de secrétaire d’État chargé de la Politique de la ville », rappelle le président de l’association Villes et Banlieues. En octobre 2023, la Première ministre de l’époque, Élisabeth Borne, a présenté des mesures sociales pour pallier les difficultés des quartiers populaires à l’issue du comité interministériel des villes (CIV). Des annonces consécutives aux révoltes urbaines déclenchées par la mort de Nahel Merzouk.

Mais ces mesures au caractère social, après une réponse sécuritaire d’ampleur de l’été 2023, ne sont pas au rendez-vous. « Nous avons réussi à avoir quelques ajustements, notamment sur les Cités éducatives, mais les quartiers restent dans l’angle mort d’Emmanuel Macron », constate Gilles Leproust.

La crainte d’un tour de vis budgétaire

Pourtant, les attentes ne manquent pas, au premier rang desquels : la question budgétaire. L’association des Villes et Banlieues s’inquiète d’une baisse des crédits alloués aux collectivités. « De nouvelles contraintes budgétaires ne pourraient pas être supportées », préviennent-ils, alors que la précarité monte en flèche dans les territoires les plus défavorisés. « La question dominante pour nos territoires, c’est le respect du droit commun », pose Gilles Leproust qui demande que les quartiers populaires soient traités à égalité avec les autres territoires.

Dans l’auditorium de la maison des Arts Mélinée et Missak Manouchian, ces élu.es de quartiers prioritaires de la ville se sont activé.es toute la matinée dans le cadre de l’assemblée générale. À la sortie, les élu.es rendent compte de difficultés communes, comme sur l’éducation. « Il y a une absence de médecine scolaire et la prévention n’existe pas ou peu », prend en exemple le maire d’Allonnes.

« Sur 10 rendez-vous, 8 concernent des demandes de logements »

Le logement, premier poste de dépense des plus précaires, reste lui aussi, un sujet majeur. Un jour par semaine, le maire d’Épinay-sous-Sénart (Essonne), Damien Allouch, organise des rencontres avec ses administré.es. « Sur 10 rendez-vous, 8 concernent des demandes de logements », rapporte-t-il. Et de rappeler que « depuis 9 mois, personne n’a encore été nommé à la tête de l’Agence nationale de rénovation urbaine (ANRU) ». 

Sous la présidence d’Emmanuel Macron, différentes lois ont affaibli les finances des bailleurs sociaux, comme la loi Elan. Dans un récent rapport, l’Union sociale pour l’habitat dénonçait à ce titre « les mesures politiques et budgétaires prises depuis 2017 qui ont réduit sensiblement la capacité de production et de rénovation des bailleurs sociaux ».

La dangereuse opposition entre « les tours et les bourgs »

Alors que la rentrée politique a été animée par un faux débat sur la France des bourgs et celle des tours, la représentation des quartiers populaires était également très présente dans les discussions. « Il ne faut pas laisser le récit d’une opposition entre quartiers populaires et zones rurales s’installer », prévient Fannie Le Boulanger, adjointe aux quartiers politique de la ville de Bordeaux.

« On est dans une France qu’on cherche à fracturer et c’est assez facile de trouver un bouc émissaire, souffle l’élue. On le voit partout, la racine du problème, c’est le démantèlement des services publics », rappelle-t-elle.

« Nous prévoyons de rencontrer l’association des maires ruraux pour travailler à faire remonter des problématiques communes », annonce, de son côté, Gilles Leproust. Il s’inscrit ainsi dans le sillage de cette tribune d’élus qui appellent à retisser un récit commun entre les zones rurales et les quartiers populaires de banlieue.

« Il y a un nouveau récit à écrire sur les quartiers populaires »

« Il y a un nouveau récit à écrire sur les quartiers populaires pour redonner de la fierté aux habitants », poursuit Gilles Leproust. Lui voudrait qu’on insiste sur les premiers de cordées mis en lumière durant la crise sanitaire, celles et ceux qui occupaient les métiers essentiels quand le reste de la population était confiné.

Le maire d’Allonnes évoque aussi les médaillé.es des Jeux olympiques et paralympiques (JOP) dont un certain nombre viennent de ces quartiers. « Au vu de l’engouement qu’ont suscité les JOP, il faudrait également voir quels moyens sont alloués aux clubs sportifs et aux collectivités pour les équipements sportifs », ajoute le maire. La Seine-Saint-Denis reste par exemple le département le moins bien doté en termes d’équipements sportifs.

Alors que le nouveau gouvernement devrait être annoncé dans les jours qui viennent, l’association Villes et Banlieues espère pouvoir être entendue. La question de la fiscalité des communes sera un sujet important, rappelle Damien Allouch. Un sujet indispensable pour stabiliser leurs finances et gagner en autonomie.

« Nous demandons par ailleurs à ce que le prochain ministre ou secrétaire d’État chargé de la Politique de la ville soit rattaché au Premier ministre », insiste Gilles Leproust. La dernière secrétaire d’État à Ville, Sabrina Agresti-Roubache, était rattaché au ministère de l’Intérieur. Une démarche inédite qui n’avait pas manqué d’interroger. Sans espoir démesuré, ces élu.es espèrent que la politique de la ville deviendra enfin un sujet pour le nouveau gouvernement.

Héléna Berkaoui 

 

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