À Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), un chapiteau se dresse à une dizaine de mètres du métro Porte de Paris, au bord d’une autoroute. Devant le chapiteau, des personnes patientent. C’est ici que le Secours Islamique France (SIF) organise des distributions de repas. Le SIF une organisation non gouvernementale (ONG) de solidarité internationale à visée sociale et humanitaire, fondée en 1991.

Il est environ 19h30, ce mercredi 19 avril. Un dispositif ouvert à tous, appelé “Les tables du Ramadan” est organisé par le SIF. Plus de 1 000 repas chauds et complets y sont distribués chaque soir, pendant tout le mois de Ramadan. Ce qui en fait le dispositif ponctuel d’aide alimentaire, le plus important d’Ile-de -France.

Une organisation bien rodée

Sous le chapiteau, Adrien, chargé des relations avec la presse et Karim Ouachek, un des responsables du projet nous accueille. « 1000 personnes vont bientôt arriver ! C’est une organisation bien rodée ! ”, annonce ce dernier. À l’intérieur, c’est l’effervescence : des dizaines de bénévoles s’affairent pour préparer les repas de la soirée. L’atmosphère est chaleureuse et joyeuse. « Il y a beaucoup de solidarité et de cohésion parmi les bénévoles », observe Adrien.

Le SIF est composé de 70 bénévoles, pour la plupart des jeunes. L’endroit accueille un public très diversifié : des familles, des étudiants, des travailleurs pauvres, mais en majorité des hommes seuls âgés de 30 à 40 ans. Des maraudes sont planifiées trois fois par semaine. Adrien souligne le fait que « la majorité des personnes qui viennent sont musulmanes, mais pas toutes. Tout le monde peut venir. Nous ne faisons pas de prosélytisme. »

À quelques mètres de l’entrée, une cuisine semi-industrielle a été installée. Dix personnes s’attellent à la tâche, mais seul le chef est un professionnel. Des dizaines de longues tables s’étalent tout le long de la salle. Virginie bénévole depuis deux ans au SIF, répond à nos questions, tout en préparant des assiettes avec du riz et des légumes.

Cette dame d’une quarantaine d’années, enjouée, porte une charlotte et des lunettes. Elle explique avoir commencé par des maraudes. « Aider les autres est quelque chose qui me tient vraiment à cœur, et ça fait un bien fou. »

« On se rend compte qu’on a beaucoup de chance. Quand les gens rentrent chez eux le soir, ils ont de quoi manger. Ça n’a pas de prix », explique la bénévole.

Pour certaines personnes, c’est le seul repas de la journée, ramadan ou pas

Keridin Bensalah, 18 ans, étudiant, embraye : « C’est ma sœur qui faisait ça avant. Elle m’a proposé de participer. J’ai accepté parce que c’est une belle expérience. » Virginie estime que l’impact des tables du Ramadan redore le blason de la ville de Saint Denis. « Ça leur fait une bonne publicité, car la ville n’a pas une bonne réputation. »

« Pour certaines personnes, c’est le seul repas de la journée, ramadan ou pas. Pour les mères qui ont des enfants, ça permet un peu de se décharger aussi », constate Keridin. Le jeune homme considère qu’à travers son bénévolat,  il est utile à la société : « On sert à quelque chose. On apprend beaucoup. On voit des gens bien. »

Un projet nécessaire en période d’inflation

Rachid Lahlou, président du SIF, nous raconte la genèse du projet. « Le SIF a été sensible à la cause des personnes à la rue. Dès les premières années, nous avons mis en place un projet qui s’appelle le couscous de l’amitié, note-t-il. Ça consistait à distribuer, une fois par semaine, un couscous pour les personnes sans abri. » Avec l’inflation et la pauvreté qui s’étend, une initiative comme les Tables du ramadan s’avère indispensable. Après le ramadan, d’autres actions humanitaires sont prévues.

 Vers 20 h 20, un briefing a lieu dans le chapiteau, face à l’entrée pour répartir les différentes tâches entre les bénévoles. Quelques minutes plus tard, des centaines de personnes affluent. Une file se forme. Chacun récupère son repas et s’assoit sur une des longues tables. Bientôt un immense concert de paroles envahit le chapiteau.

À la fin du service, des repas gratuits sont offerts aux gens à la sortie du chapiteau. Les bénévoles s’activent pour récupérer les plateaux dans des caddies et jeter les déchets dans des bennes à ordures.

Une dame d’une quarantaine d’années accompagnée par ses deux enfants salue les Tables du Ramadan. « L’organisation est vraiment formidable, surtout pour toutes les personnes qui ne peuvent pas se nourrir pendant le ramadan. » Pour elle, il s’agit de renouer un certain lien social : « C’est bien pour manger entre amis. C’est aussi un moment de convivialité, car on peut discuter avec des gens qu’on ne connaît pas. »

Hervé Hinopay

Crédit photo ©ThiadianeLouisfert 

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