Quatre ans après la première Pride des banlieues, ce « mouvement queer des quartiers populaires » s’ancre dans le paysage et prépare la prochaine marche. « On se situe à l’intersection de plusieurs problématiques et on agit localement pour essayer d’y répondre », définit Gilliane Coudrey, coordinateur du mouvement.

Initiée par Saint-Denis ville au cœur, cette marche des fiertés a défilé pour la première fois en 2019 dans les artères de Saint-Denis. L’association continue à lutter contre les discriminations et pour  « stimuler la cohésion sociale » dans le département. Une aventure militante que retrace le film documentaire La première marche. 

10 000 manifestants dans les rues de Saint-Denis en 2020

Si la marche prévue à Saint-Denis n’a pas pu avoir lieu en 2020, en raison du contexte sanitaire, celle de 2022 a été un franc succès. Plus de 10 000 manifestant·e·s ont défilé dans les rues de la ville, sous le mot d’ordre « plus personne à la rue. » Autre revendication : la formation des personel·le·s des centres d’accueil aux problématiques spécifiques aux personnes LGBTQI+.

Comme en 2022, la manifestation de cette année est prévue au mois de juin. Le mot d’ordre de la marche est désormais connu : l’égalité d’accès à la procréation médicalement assistée (PMA). Une pétition a été lancée le 1er février pour appuyer la revendication et interpeller les pouvoirs publics.

La loi exclut explicitement les personnes trans et intersexes 

En juin 2021, le Parlement a adopté l’ouverture de la PMA aux femmes seules et aux couples lesbiens. Une avancée permise par la mobilisation sans faille des militantes lesbiennes et féministes. Mais la loi reste inégalitaire et « exclut explicitement les personnes trans et intersexes », rappelle Gilliane Coudrey.

Les personnes racisées, en situation de handicap ou en surpoids tenues à l’écart

En effet, les hommes trans n’ont pas le droit d’y recourir. Les femmes trans n’ont quant à elles pas accès à l’autoconservation de leurs gamètes avant leur transition. La Pride des banlieues milite pour « un droit à la famille égale pour toustes ». Aujourd’hui, « les personnes racisées, mais aussi les personnes en situation de handicap visible ou invisible, de même que les personnes grosses sont tenues à l’écart de l’application de la loi », indique également Gilliane Coudrey.

Les femmes noires engagées dans un parcours de PMA peuvent attendre jusqu’à 10 ans pour recevoir un don d’ovocytes. « C’est en moyenne deux ans d’attente pour les personnes blanches », souligne le porte-parole de la Pride des banlieues. « Il y a le principe d’appariement qui stipule que le don de gamètes se fait sur des critères phénotypiques, qui doivent être proches de ceux de la receveuse, qui conditionne l’accès à la PMA », poursuit Gilliane Coudrey.

Concrètement, cela signifie que les personnes en parcours de PMA doivent recourir à des donneurs d’ovocytes aux caractéristiques physiques proches des leurs. Notamment, des personnes qui ont la même couleur de peau. « Nous, on n’est pas contre le fait de pouvoir avoir un enfant qui nous ressemble, mais l’enjeu, c’est d’avoir le choix. »

Ainsi, la pétition a pour objectif « la mise en œuvre de campagnes de sensibilisation à destination des personnes racisées. Parce que la campagne lancée par le gouvernement ne représentait que des personnes blanches » et à « la formation des personnel·le·s concernant les enjeux de handicap et de grossophobie. »

« On veut la réouverture du débat parlementaire de la loi »

À la suite du confinement du printemps 2020, pour endiguer la pandémie de Covid-19, les hôpitaux avaient annoncé que les personnes ayant un IMC supérieur à 30 se verraient refuser l’accès la PMA. De la même manière, « il y a des personnes qui souffraient de troubles psychiatriques, qui étaient sous antidépresseurs, à qui on a refusé l’accès à la PMA », relate Gilliane, prenant en exemple des témoignages reçus par les militants et militantes de l’association. Ces personnes ne peuvent pas être médicalement accompagnées tant qu’elles ne seront pas considérées comme guéries.

« On veut la réouverture du débat parlementaire de la loi, c’est un débat qui est encore d’actualité », explique-t-il. Avec cette pétition, il entend toucher le plus de monde possible et, ainsi, « susciter une mobilisation, qui nécessitera, peut-être, de nouveaux modes d’organisation, de nouveaux modes de bataille. » Avec toujours en vue, l’objectif de donner l’accès à la PMA à tous et toutes, sans distinction.

Eva Fontenelle

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