« De mémoire de militante, ça fait longtemps qu’il n’y avait pas eu une mobilisation d’une telle ampleur à cet endroit-là », se satisfait Alixe Rivière, porte-parole de fédération des parents d’élèves de la Seine-Saint-Denis. À l’appel de l’intersyndicale, les enseignant.es du département ont convergé à pied, munis de banderoles, vers Bobigny pour réclamer une nouvelle fois un « plan d’urgence pour le 93 », ce jeudi 14 mars.

Professeur.es, parents d’élève, accompagnant.es des élèves en situation de handicap… Une foule s’est emparée de l’esplanade de la préfecture de Bobigny : 5 000 manifestants en tout, revendique le syndicat FSU-SNUipp 93. Depuis le 26 février, le mouvement de grève se tient et différentes actions parfois moins conventionnelles ont lieu. Comme les vidéos mettant en scène sur un ton humoristique les multiples affres auxquels enseignants et élèves sont confrontés. Des enseignants ont d’ailleurs été convoqués par leur hiérarchie après s’être adonné à cet exercice.

Sacrifier des heures de cours pour en gagner

Vendredi, les parents d’élèves appellent à une journée « écoles, collèges et lycées déserts ». Des modes d’actions de dernier recours, souligne Alixe Rivière de la FCPE. « Franchement, si on le fait, c’est que la situation est vraiment grave », insiste-t-elle. Dans le département, les élèves ont sensiblement moins d’heures de cours qu’ailleurs en raison du non-remplacement des professeurs. Et dans ce contexte, décider d’une grève de cette ampleur n’a rien n’anodin. « On fait ça justement parce qu’on espère que nos enfants auront autant d’heures de cours qu’ailleurs », soulève la porte-parole de la FCPE.

À ce titre, le plan d’urgence réclamé par l’intersyndicale depuis décembre appelle à un plan d’investissement de 358 millions d’euros et à la création de 5 200 postes d’enseignants.

Jusqu’à présent, le ministère de l’Éducation nationale a semblé sourd à la mobilisation des enseignants de Seine-Saint-Denis. Interpellée à l’Assemblée nationale, le 6 mars, par le député PCF, Stéphane Peu, la nouvelle ministre s’est dite « très attentive au mouvement social en Seine-Saint-Denis » et a reconnu la singularité de la situation dans le département.

Une mobilisation qui peine à se faire entendre

« On essaie de considérer cela comme une porte ouverte », espère le député de Seine-Saint-Denis. Auteur d’un rapport parlementaire sur les politiques publiques dans le département, Stéphane Peu tirait déjà la sonnette d’alarme sur l’état des établissements scolaire dans le département en décembre dernier. Un rapport qui fait lui-même écho à celui remis en 2018 sur l’état catastrophique des services publics dans le département. « Tout est documenté », soupire la porte-parole de la FCPE qui espère que cette mobilisation d’ampleur renversera la vapeur.

Il aura cependant fallu trois semaines de mobilisation pour qu’une délégation de l’intersyndicale obtienne un entretien avec le cabinet de la ministre de l’Éducation nationale. Un rendez-vous qui devrait avoir lieu le vendredi 15 mars, mais qui a peu de chances d’entamer le mouvement de grève. Les représentants syndicaux ne se satisferont pas d’un « pansement sur une hémorragie » et savent par ailleurs qu’un plan de coupes budgétaires est prévu dans les finances du ministère de l’Éducation nationale.

« Mardi prochain, nous rejoindrons la mobilisation nationale et le jeudi suivant, il y aura de nouveau une mobilisation », annonce Solange Gaffet, après l’assemblée générale qui s’est tenue à la bourse du travail de Bobigny.

Héléna Berkaoui

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