Bobigny est en passe de rougir à nouveau. Evincés de l’Hôtel de Ville en 2014, les communistes avec Abdel Sadi se placent en tête du scrutin et recueillent 37,7% des suffrages. Les sortants de l’UDI glanent 26,4% des voix. Une victoire aux allures de revanche, donc, pour la gauche. En troisième place, on retrouve le socialiste Fouad Ben Ahmed avec 11,4 % des suffrages qui se qualifie, lui aussi, pour le second tour.

Mais comment parler de ce scrutin sans évoquer son véritable vainqueur, l’abstention, dans ce contexte si singulier de crise sanitaire ? Distributeurs de solution hydroalcoolique, gants, distance de sécurité… L’ambiance des bureaux de vote à Bobigny comme ailleurs avait des airs de mascarades. Fermer des écoles et inviter les gens à se rendre dans ces mêmes écoles pour voter pose franchement question. Entre 2014 et aujourd’hui, l’abstention augmente de 5 points. Dans une ville de 52 000 habitants, on compte seulement 7991 votants et un taux d’abstention de 65%.

Surprise du scrutin, Faysa Bouterfass, ancienne élue de la majorité UDI, se place en quatrième position avec 6,8%. Elle a été la dernière à lancer sa campagne, trois semaines avant le second tour. En 5e position, on retrouve le candidat de la France insoumise, Sylvain Léger, (lui aussi un ancien de la majorité), avec 6,4%. Pour finir : Jean-Michel Jean-Romain (5,6%), Youssef Zaoui (2,3%), Habib Babindamana (1,9%), Rodolphe Feger (1,5%). Si tant est qu’il y ait un second tour, l’entre-deux-tours devrait donner lieu à des tractations qui rendent incertaines l’issue du scrutin.

L’épilogue d’une campagne tendue

A l’image de la campagne, cette journée électorale a connu son lots d’incidents, rien de comparable toutefois avec la tension des municipales de 2014 qu’on vous racontait ici. Mais cela suffit à en démobiliser certains. « Je les laisse faire leur guerre entre eux, je ne vais pas aller voter. Vous avez vu tout ce qui tourne sur les réseaux sociaux ? », nous disait par exemple une mère de famille à la cité de l’Etoile. La campagne a effectivement été ponctuée de coups bas : l’incendie de la permanence de campagne de Fouad Ben Ahmed, les tags racistes sur les affiches de Habib Babindamana, les tracts anonymes…

 

La sortie d’un livre-enquête sur la mairie a encore tendu les choses (lire notre article). Chez d’autres Balbyniens, c’est au contraire les affaires visant la mairie qui mobilisent. A la sortie d’un bureau de vote, Jean-Michel, un électeur, souhaite « que la municipalité sortante dégage, ce qui est dramatique c’est que les listes de gauche ne soient pas rassemblées ».

Aux abords des bureaux de vote, on n’attendait pas grand-chose de ce scrutin. En guise de réponse, un habitant de l’Etoile nous invite à tourner la tête vers l’un des immeubles, « voilà, ça dit tout, on est toujours les derniers servis ». Un peu plus loin, ce n’est pas l’envie de voter qui manque mais le droit. Pour beaucoup d’autres, ce n’est pas l’envie de voter qui manque mais plutôt le droit.

Le fameux droit de vote aux élections locales pour les étrangers non-européens. « Ca fait 10 ans que je vis là et pourtant je ne peux pas voter. C’est le cas pour beaucoup de gens ici », déplore une habitante de l’Abreuvoir qui paie ses impôts comme tout le monde sans pour autant avoir un droit de regard sur la manière dont est gérée sa ville.

Héléna BERKAOUI

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